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    11/11/2014

    Un ancien bâtiment de l’armée transformé en centre alternatif

    A la caserne de Reuilly, la culture squat a remplacé les képis

    Par Maëlle Lafond

    Bidouilleurs, artistes, teuffeurs, gitans : depuis 2013, la caserne de Reuilly est un hot spot du Paris alternatif. Le bâtiment était jusqu’à peu un centre de l’armée et a aussi servi à la Milice pendant l’Occupation.

    MAP Caserne de reuilly

    Caserne de Reuilly – Paris 12e. « Si tu veux, tu peux : c’est une mentalité qui s’est perdue culturellement. Mais ici, c’est une philosophie de vie. » Andrei, cracheur de feu de formation, ne tarit pas d’éloges sur la caserne de Reuilly. Ancien bâtiment militaire devenu hot-spot alternatif, il accueille aujourd’hui une ribambelle d’associations.

    Andrei fait partie de la Gare XP , un collectif culturel. Mais autour de l’immense cour du bâtiment, la liste des locataires est longue et variée : Emmaüs, Le Jardin D’Alice, Technopole , le cirque Romanes, un centre d’hébergement d’urgence. Autant d’associations qui se sont fait un petit nid d’amour dans ce qui servit … de centre de mobilisation à la Milice française pendant l’Occupation.

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    Les locaux du Jardin d'Alice, vus de la cour de la caserne / Crédits : Maëlle Lafond

    De l’armée à la culture squat

    Aujourd’hui, à part les bâtiments en dur et le centre de formation de l’armée au coin de la rue, la caserne n’a plus rien de militaire. Entre le potager, les ateliers où s’entassent des sculptures et la décharge d’Emmaüs, on ne croise pas un uniforme. « Les seuls militaires qu’on voit, ce sont les retraités qui viennent comme en pèlerinage sur leur ancien lieu de travail. Et ils sont vraiment surpris ! » se marre Héloïse, une des membres du collectif le Jardin d’Alice qui s’est installé en avril dernier.

    (img) Héloïse devant le Jardin d’Alice mini-caserne-eloiseok.jpg

    Les locaux du Jardin d’Alice sont voisins d’Emmaüs et ils portent parfaitement leur nom. Dans l’avant-cour des fauteuils en fil de fer, une table en matériaux de récup’ et toutes sortes de constructions avant-gardistes. A l’intérieur, on a l’impression d’être dans une version plus alternative de la coloc’ de Friends : un grand salon avec un bar et un joyeux bordel qui semble servir de cuisine. Antoine, un occupant, savoure le travail accompli :

    « A part les vis d’origine, je crois qu’on a tout cassé et tout fait nous-mêmes. »

    Querelles de voisinage

    Comment passe-t-on d’une caserne militaire à un centre culturel qui promeut le Do It Yourself comme le Jardin d’Alice ou la culture Rave avec Technopole ? En 2005, Paris Habitat , un bailleur social, récupère les bâtiments. En attendant que leur projet d’HLM voit le jour, ils proposent à des associations et des collectifs d’occuper temporairement les lieux contre un loyer modique, en accord avec la Mairie de Paris. Un moyen pour eux de se faire de l’argent de poche. Et d’éviter que leur bien soit squatté, ce qui engagerait des procédures pour déloger les occupants récalcitrants.

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    Dans les rayons de la boutique Emmaüs de la caserne / Crédits : Maëlle Lafond

    Mais tout n’est pas rose au pays de la colocation géante, et les occupants en ont gros sur la patate. « On est un peu les cobayes de Paris Habitat, c’est une première pour eux et on rencontre pas mal de problèmes », tance Héloïse. « A l’origine ils avaient laissé un compteur pour tout le domaine et il a fallu qu’on leur explique que ce n’était pas possible de s’arranger entre nous pour savoir qui avait utilisé combien de litres d’eau à chaque fois… ». Même son de cloche chez Marie, 27 ans, couturière-costumière de la Gare XP, au fond de la cour :

    « Ils nous font payer le chauffage pour tout le bâtiment alors qu’ils ne nous autorisent qu’à occuper le rez-de-chaussée ! On a perdu en surface en emménageant ici. Ils nous avaient promis l’immeuble en entier mais pour l’instant ils ont installé des cadenas et des alarmes ! »

    Pour ne rien arranger, les occupants ont tous signé un bail précaire avec Paris Habitat et la mairie : la convention du Jardin d’Alice par exemple, s’étend jusqu’en août 2015. A partir de cette date, ils devront quitter les lieux pour de plus verts pâturages afin que Paris Habitat puisse livrer ses HLM comme convenu. Au grand dam des habitants du quartier qui voit d’un mauvais œil l’arrivée de logements sociaux. En 2012 des riverains s’étaient constitués en association pour bloquer le projet d’HLM et proposer un projet alternatif.

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