Montreuil (93) – En face de la mairie de Montreuil, par une après-midi ensoleillée de juillet, Franck se régale d’une glace deux boules pistache-noisette de Chez Martinez. « Ce glacier, c’est une institution ici », clame le jardinier de 55 ans :
« Dans le temps, il y avait deux glaciers sur la place. Les gens choisissaient leur camp. Moi j’étais pro-Martinez. »
Une boule pistache ou rien / Crédits : Tomas Statius
Derrière le comptoir, José Martinez esquisse un sourire. Depuis 1996, l’homme est à la tête de cette entreprise familiale quasi centenaire, qui a marqué l’histoire de la ville du Nord-est parisien. Car à Montreuil, tout le monde se lève pour les Glaces Martinez et ses 3 camions installés à Mairie de Montreuil, Croix de Chavaux et au parc Montreau. Même l’ex-maire, Dominique Voynet, lui a envoyé un mot de remerciement au nom de tous les habitants.
Dès les premiers rayons de soleil, José, sa femme Noémi et leur deux employés ouvrent boutique :
« Le reste du temps, on se repose et on répare les camions. »
Le patron, entouré de sa nièce et sa femme / Crédits : Tomas Statius
Back in the days
L’histoire des Glaces Martinez commence au sortir de la première guerre mondiale. A l’époque, le grand-père de José, Olivier, débarque en France. Il atterrit à Saint-Denis :
« Il vivait dans le bidonville. Il travaillait dans une usine de gâteaux et puis dans le métro. »
Le père et le grand-père de José / Crédits : Famille Martinez
Mais le week-end, le padre Martinez arpente l’île-de-France avec sa brouette. Il vend des glaces faites maison aux passants. « Il avait appris à faire des glaces avec son frère qui lui-même avait appris de son cousin, l’un des premiers glaciers espagnols » rembobine José :
« Il avait tous les ingrédients avec lui. Il faisait les glaces sur place. Puis il a investi dans un vélo. »
Au début des années 30, l’ancien troque le bleu de travail pour un tablier de cuisine. Il s’installe à Montreuil et rentre dans le business de la crème glacée.
José ne fait que de l’artisanal
Rapidement la petite entreprise cartonne. « Dans les années 70 / 80, mes parents avaient déjà plusieurs camions. Ils vendaient des Mico et des Mr Freeze », se souvient José alors que les clients se massent devant la petite remorque.
Quand le bonhomme prend le relai, il change du tout au tout. Finies les glaces industrielles, les friandises et les canettes de Soda. José veut rendre ses lettres de noblesse au métier et mise sur des glaces artisanales « sans arômes, ni colorants artificiels » :
(img) La mère de José devant les camions à glaces
« Je ne voulais pas que le métier disparaisse. Aujourd’hui, les vendeurs de glaces sont trop souvent des vendeurs de merde. »
Depuis, chez Martinez, tout sort d’un atelier installé en sous-sol de la maison familiale. Noisette, caramel ou miel de Montreuil… C’est ici que l’on invente les nouvelles recettes. Et toute la famille met la main à la patte :
« A 11 ans, mon fils faisait déjà ses propres parfums. Il m’a même remplacé pendant 4 jours à la caisse. »
Les glaces de José font parler d’elles au-delà de l’Île-de-France claironne le patriarche. A Charleville-Mézières et à Saint-Quentin, des glaciers Martinez ont même ouvert boutique. Et José ça le chiffonne :
« Parfois des clients m’appellent et me reprochent de n’être pas venu à leurs évènements. Alors que ce n’est pas moi qu’ils ont eu au téléphone. Ces mecs se font passer pour moi, ils ne s’appelaient pas Glaces Martinez au départ. »
Les clients se massent devant la petite remorque / Crédits : Tomas Statius
Les clients
Les beaux jours, c’est la croix et la bannière pour choper une glace Martinez. « Parfois, il y a de la queue jusqu’à la mairie. Le pic c’est vers 16h, à la sortie de l’école. » Au comptoir, José a un petit mot pour les clients réguliers. Ceux qui ont connu sa mère et ses portions copieuses. Ceux qui continuent à faire des kilomètres pour venir pécho une glace chez lui. « Tu vois eux deux, ce sont des clients réguliers », explique José en montrant deux jeunes mecs qui sortent d’une merco noire :
« Ils font partie d’une vieille famille gitane de Montreuil. Ils ont même le droit à une spécialité qui n’est pas à la carte. De la glace entourée de gaufrette. »
L'homme et sa gaufrette / Crédits : Tomas Statius
« Mon père venait ici tous les jours à l’époque. La mère de José lui donnait 2 francs et un ticket de métro pour qu’il aille à Paris. »
Il n'y a pas d'âge pour une glace de chez Martinez / Crédits : Tomas Statius
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