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    03/05/2011

    Comment les cyber-activistes orchestrent la révolution à Deraa sans électricité mais avec des téléphones satellitaires

    Ausama Monajed, cyber-activiste syrien: « On donne une dernière chance à Bachar »

    Par Jacques Torrance

    Le réseau d'activistes et de politiciens baptisé « la coalitition » continue d'informer la planète sur ce qui se passe en Syrie. Mais à Deraa « pas d'électricité, ni d'eau ou de lits »: Heureusement il y a des modems satellitaires.

    Allo Oussama? Bonjour. Vous dites former une coalition. Qu’est-ce que c’est exactement une coalition ?

    Quelques jours après le début de la révolution, on a commencé ce qu’on appelle « la coalition » : communiquer avec des pages de la révolution syrienne sur Facebook, telles que Shaam Network, FNN, Ugarit, etc.… Nous sommes liés à travers nos messages, nos vidéos, nos comptes-rendus en direct. Je fais partie de ce réseau.

    Comment vous vous connaissez tous là-bas ?

    On se connaît par notre cyber-activisme.

    Les cyberactivistes, ce sont des personnes qui vivent en Syrie ?

    Les administrateurs de ces pages sont en Syrie et à l’extérieur. Sans les personnes qui sont sur le terrain on ne pourrait pas coordonner nos actions.

    Qu’est ce que tu entends par « actions »?

    Il y en a beaucoup : les tactiques, les slogans, choisir les thématiques du vendredi, les manifestations, les bannières, on explique aux gens comment filmer, ce qu’il faudrait filmer, on rédige quelques mots pour authentifier les vidéos. On communique dans les 2 sens.

    Il y a eu de très grosses coupures d’électricité en Syrie. Comment faites-vous pour communiquer sans électricité ?

    A Deraa, il n’y a plus d’électricité, d’eau, de nourriture et de lits depuis 5 jours. Le seul moyen de communiquer est d’utiliser des téléphones satellites. C’est comme ça qu’on reçoit les vidéos de là-bas, par téléphone et modem satellite. Dans le reste du pays les gens s’arrangent pour trouver une connexion et envoyer les vidéos. Il y a une équipe à travers le monde qui travaille avec moi, pour gérer les données qu’on reçoit.

    Il y a combien de gens sur place ?

    On est beaucoup, ça fait un gros réseau, il y a des gens dans toutes les villes, dans tous les villages. Nous sommes en contact avec tout le monde. On avait déjà tous un réseau d’activistes, que ce soit à Damas, Homs, Alep ou ailleurs. Mais quand ça a commencé, on a unifié les principaux groupes/réseaux, pour que les autres, plus petits, bénéficient de notre organisation.

    Comment êtes-vous organisés ?

    On a formé une opposition syrienne récemment, constituée de 150 personnes à travers le monde, de différents horizons religieux, ethniques et politiques. Nous avons aussi des représentants, dont je suis le porte-parole en Europe. Il n’y a pas de « groupes », seulement des individus. Il n’y a pas de partis politiques impliqués. De toutes façons, les partis politiques traditionnels n’ont rien fait jusqu’à présent…

    Les personnes qui s’impliquent dans cette opposition sont des gens renommés, il y a des politiciens, des activistes mais vous savez, ils ont signé en tant qu’individu. Et ils ont les contacts, les informations et l’expérience. Certains d’entres eux sont avocats, plus précisément dans les droits de l’homme. Mais nous n’avons encore approché personne de la Commission européenne. On se concentre sur certains gouvernements pour l’instant, nous verrons plus tard avec la Commission européenne.

    Qu’est-ce que vous espérez pour la Syrie ?

    On espère encore que les forces pro-gouvernementales aient encore une once d’humanité et qu’ils arrêteront les massacres. On donne encore quelques jours à Bashar pour prouver qu’il peut ou veut faire quelque chose, pour montrer qu’il a toujours du leadership, de l’autorité, qu’il a encore le contrôle. Et si ça ne change pas dans les jours qui viennent, on va tous lancer un appel pour qu’il parte. On lui donne une dernière chance. Comme vous avez pu le voir sur les vidéos d’aujourd’hui, dans toutes les villes et villages, le peuple veut renverser le régime en place. Oui on va vers une impasse, c’est pour ça qu’on demande à l’armée de prendre un rôle historique en protégeant les civiles. Et aussi pour faciliter la période de transition. On est en discussion à ce sujet mais je ne peux pas en parler.

    div(hash). h4>Qui es-tu Ausama Monajed? Ausama est consultant en communication. En tant que cyber activiste, il passe 18 à 20 heures par jour sur son ordinateur portable à contacter des personnes en Syrie et à organiser des évènements sur place. Il fait partie de Shaam News Network, un groupe d’activistes sur Facebook. Sa coalition coordonne des actions en Syrie et aide les médias à couvrir les évènements en leur fournissant des témoins, des photos et vidéos vérifiées par leur soin.


    Le 29 avril à Homs des civils montent sur des chars de l’armée Syrienne et portent les soldats sur leurs épaules

    div(border). h4>Le MJDAusama Monajed est membre du MJD (Movement for Justice and Development.) Fondé en Angleterre en 2006 c’est un des nombreux partis clandestins syriens. Selon un câble du département d’Etat américain mis à jour par Wikileaks , les fondateurs seraient « libéraux, islamistes modérés et en partie d’anciens membres des frères musulmans.» Le MJD tend vers un changement démocratique non idéologique en Syrie. Ausama a aussi travaillé à Barada TV, une chaîne satellite syrienne d’opposition, basée en Angleterre et proche du MJD, financée par le gouvernement Americain en 2006 à hauteur de 6 millions.

    Pour écouter l’entretien avec Ausama c’est ici:

    Son cutté ausama.wav by streetpress

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