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    18/12/2012

    Vincent Laurent, de Génération Précaire, était l'invité de notre Matinale Politique sur Radio Campus Paris

    « L'encadrement des stages n'a jamais autant avancé que sous un gouvernement de droite »

    Par Elodie Font

    Vincent Laurent ne cache pas sa déception : selon lui, les stages ne sont « pas une priorité » pour le gouvernement. Pourtant, le nombre de stagiaires a explosé : 500.000 en 2006, 1,5 million aujourd'hui. Comment éviter de se faire manipuler ?

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    La question vestimentaire

    On reconnaît le collectif Génération Précaire aux masques blancs que vous portez dans les manifs, un peu comme ceux des Anonymous. Ils ont copié sur vous ?

    Non, Anonymous a pris le masque du film V comme Vendetta. Nous, on s’est inspirés du théâtre et ça a plusieurs symboliques : le fait d’être une personne interchangeable dans une entreprise, une personne invisible – et on disparaît ensuite. Pour un employeur, pas la peine de savoir qui est la personne derrière le stagiaire, de toute façon, on va en reprendre un après. C’est le symbole du stagiaire qu’on jette comme un mouchoir après utilisation.

    La question des chiffres

    Vous dites qu’on est passés de 500.000 stagiaires en 2005 à 1,5 million aujourd’hui. Comment on explique une telle progression ?

    Il y a dans la loi un encadrement des stages, mais il est plus ou moins respecté. Y’a peu de moyens mis par l’Etat pour contrôler cette législation. […] Y’a eu aussi la crise, la montée du chômage. Et malgré la législation, on constate qu’il y a toujours cette utilisation abusive des stages.

    La question des planqués

    Seules la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière ne paient pas forcément leurs stagiaires quand ils restent plus de 2 mois (436,12 € par mois). Pourquoi elles échappent à la règle ?

    Je crois pas du tout à cette histoire de fin du monde

    Pour la fonction publique territoriale, ça s’explique par un refus de la majorité à l’époque dans les collectivités, qui était et qui est une majorité socialiste. Parce qu’il y avait des restrictions budgétaires, ils n’avaient pas les moyens de payer les stagiaires, ce qui est un peu injustifié. Pourquoi créer une dérogation ?

    Pour le milieu hospitalier, c’est plus complexe : ils font des stages de plusieurs années en médecine et ce n’est pas exactement le même statut, mais j’aurais du mal à me prononcer dessus, je ne connais pas assez ce milieu.

    La question des mini entreprises fauchées

    Y’a-t-il un juste milieu entre les petites entreprises qui n’ont pas les moyens de payer leurs stagiaires et les stagiaires qui ont besoin d’un salaire pour vivre ?

    Le gouvernement tente de mettre en place des contrats comme le contrat de génération pour aider les TPE (les très petites entreprises) et les PME (petites et moyennes entreprises) à recruter. C’est l’enjeu de faire confiance aux petites entreprises, de les aider, comme l’a fait l’Allemagne. Il faut investir dans le moyen et long terme pour permettre à ces entreprises de recruter.

    La question droite/gauche

    Génération Précaire existe depuis 2005. C’est la première fois que vous évoluez sous un gouvernement de gauche. Qu’est-ce que ça change ?

    C’est l’enjeu de faire confiance aux petites entreprises, de les aider, comme l’a fait l’Allemagne

    Vous savez, la question de l’encadrement des stages n’a jamais autant avancé que sous un gouvernement de droite. Aussi parce qu’on a réussi à convaincre les partenaires sociaux d’avoir un accord en juin 2011, de convaincre par nos actions le gouvernement De Villepin d’intégrer quelque chose dans la loi de 2006 sur l’égalité des chances.

    C’était au moment du CPE

    Oui, on a très clairement utilisé cette vague pour parler des stages, les deux sont liés. Là, on a de fortes espérances avec la gauche même si on a constaté pendant la campagne présidentielle que François Hollande était un peu flou sur la question des stages…

    Parce que je rappelle que vous avis inventé une agence de notation des candidats sur le sujet…

    Oui, sur les stages, François Hollande était pas très bon. D’ailleurs, pour l’instant, on n’a pas l’impression qu’il bouge vraiment le petit doigt pour faire que la question des stages soit dans les négociations sur le contrat de génération, sur la sécurisation de l’emploi… Pour eux, ce n’est pas une priorité sauf que ça touche un bon nombre de jeunes ! Il nous faut arriver à de nouveaux droits mais surtout mieux encadrer le dispositif existant. Donc pour l’instant, nous sommes un peu déçus, dans l’expectative on va dire, dans l’attente.

    La question souvenirs, souvenirs

    Parmi toutes celles que vous avez vu passer, y’a-t-il une offre de stage qui vous a particulièrement choqué ?

    Je pense que c’est Kiabi, le fameux employeur qui disait « c’est génial les stagiaires, on vit dans le meilleur des mondes avec 10 stagiaires pour un employé et on attend que l’inspection du travail vienne nous contrôler. » C’était bien sûr de la provoc’, mais en même temps, un vrai scandale. Parce que ça faisait partie de beaucoup de cas d’abus de stages dans le milieu de la vente où on utilise des stagiaires comme vendeurs alors qu’avant, c’était des jobs alimentaires.

    La question Pascal, le grand frère

    Quel conseil pourriez-vous donner aux jeunes stagiaires pour qu’ils ne se fassent pas manipuler ?

    S’ils recherchent vraiment un emploi, de ne pas aller vers des fiches de postes de stagiaires qui ressemblent à des emplois, des fois ça peut être un peu masqué, parfois y’a une promesse d’embauche et finalement, à la fin, l’entreprise explique qu’elle n’a pas l’argent, que ce sera juste un stage, donc il faut être très vigilant. Il faut aussi bien cibler sa recherche, ne pas accepter n’importe quelle offre.

    La question primordiale

    Est-ce que vous croyez que la fin du monde est pour vendredi ?

    Non, je ne crois pas. J’avais regardé un reportage du Monde qui expliquait que c’était seulement une fin de cycle, donc j’imagine que pour certains, c’est une occasion de vendre plein de choses, de faire peur aussi, mais bon, je crois pas du tout à cette histoire. Et si c’était mes 4 derniers jours, je resterai avec mes proches et puis j’essaierai de faire la fête, un petit peu.

    bqhidden. Pendant la campagne présidentielle que François Hollande était un peu flou sur la question des stages

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