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    10/11/2015

    L’ex-militant FN n’en était pas à sa première interpellation pour injures racistes

    Frédéric Pauze condamné à 6 mois avec sursis pour l’agression de l’éditeur de StreetPress

    Par Mathieu Molard

    Ce mardi Frédéric Pauze comparaissait pour l’agression de Marc Grinsztajn. Du bout des lèvres il reconnait les propos antisémites. Et malgré la bouteille jetée à la tête de notre éditeur, son avocat plaide la relaxe. Sans succès.

    Paris – 23e chambre du Tribunal de Grande Instance. « La bêtise, l’alcool, la haine : voilà ce qui a entraîné les faits », lance la procureur de la république pour qualifier l’agression de l’éditeur du livre de StreetPress. Comme nous vous le racontions ici, dans la nuit du 11 au 12 septembre, Marc Grinsztajn, l’éditeur du livre de StreetPress consacré au Système Soral, a été victime d’une agression à caractère antisémite. Ce mardi 10 novembre 2015 Frédéric Pauze comparaissait pour « violences en raison de la religion, en état d’ivresse et avec arme par destination ».

    Un CV bien chargé

    A la barre, costard-cravate noir et pull gris, Pauze écoute en silence le récit détaillé de l’agression qu’il a commise. Les premières insultes : « Sale bobo, le peuple aura ta peau ! » La violence des propos monte crescendo jusqu’à l’injure antisémite balancée par l’ingénieur de 37 ans :

    « Sale juif, les goys relèvent la tête ! »

    Quand la présidente du tribunal lui demande s’il reconnait avoir tenu de tels propos, il concède du bout des lèvres : « Ca m’arrive d’employer ce genre d’expressions quand je suis saoul… » – Ca sera sa ligne de défense. « Mais pourquoi ‘sale juif’ ? », s’étonne encore la présidente. « Par bêtise de préjugés sociaux. D’associer juifs et argent. » Car le soir des faits, il en est certain, Marc Grinsztajn est riche. Il détaille au tribunal l’indice qui lui aurait mis la puce à l’oreille :

    « La beauté de la porte, c’était une très belle porte en bois. »

    Tout au long de l’audience, Frédéric Pauze justifiera ses actes par son état d’ébriété, constaté au petit matin : 0,65 mg par litre d’air expiré. Pourtant son CV souligne bien le pédigrée de l’accusé. Côté injures, il n’en est pas à son coup d’essais : août 2014, il est interpellé pour des invectives antisémites. Une affaire classée à la condition qu’il participe à un stage au mémorial de la Shoah. Pauze s’exécute, sans pour autant tourner le dos à cette idéologie. Et sur « sur le bureau de la chambre », trône toujours une tasse à l’effigie d’Adolf Hitler et quelques ouvrages consacrés au troisième Reich. Sa compagne, interrogée par la police, reconnaît également qu’il a, un temps, possédé un drapeau nazi.

    Un acte prémédité ?

    Pour Marc Grinsztajn, la présence à sa porte d’un individu aussi marqué politiquement, à peine plus d’une semaine après la publication de notre livre, ne peut être le fruit du hasard. Son avocat, Michaël Ghnassia*, met en avant un « faisceau d’indices » qui tendraient à prouver la préméditation : un vocabulaire et des références politiques partagées avec Alain Soral. Et les propos de ce dernier, qui seulement quelques jours plus tôt, nous accusait – en substance – de travailler pour le lobby juif.

    Une version que conteste l’accusé. Il reconnaît bien avoir lu un ouvrage de Soral et vu quelques vidéos, mais il n’apprécierait pas vraiment le polémiste d’extrême droite. Et si comme Alain Soral, Pauze a participé à la manifestation « Jour de colère », il l’aurait fait en soutien aux bonnets rouges. Et sa présence dans le quartier de résidence de notre éditeur ? Un rendez-vous manqué avec un ami, comme lui, ancien militant Front National.

    Poing final

    Dans sa plaidoirie, Maître Thierry Laugier, demande la relaxe de son client. La bouteille n’aurait été lancée qu’en défense, après le premier coup porté par Marc Grinsztajn. Il réfute donc la qualification de violences volontaires. Peine perdue, le tribunal condamne Frédérique Pauze à 6 mois de prison avec sursis et 2 ans de mise à l’épreuve avec obligation de soin. Il est également condamné à verser 2000 euros au titre des dommages et intérêts. Une somme que Marc Grinsztajn s’était engagé à verser à une association.

    A la sortie de l’audience, Vincent Lapierre, un proche d’Alain Soral, s’approche de Frédéric Pauze avec sa caméra, et tente de l’interviewer pour le site d’Egalité et Réconciliation. Pauze s’enfuit tout en dissimulant son visage avec une écharpe. StreetPress n’aura pas plus de succès : « Comptez-vous faire appel ? – Vous verrez bien ». De son côté Marc Grinsztajn déclare être « content que la culpabilité de [son] agresseur soit reconnue ».

    *Il est également l’avocat de StreetPress.

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