06/03/2015

Machines bricolées, tatouages et perfecto

Dimitri HK, le punk qui tatouait dans sa cité

Par Thibaud Delavigne

Premier tattoo à 14 piges. Puis dans les années 1980, Dimitri lance un atelier clando dans sa cité du Val Fourré. Le tatouage se démocratise et le petit biz’ de l’artiste décolle. Aujourd’hui, il faut patienter 2 ans pour se faire tatouer par le maestro.

« Les tatoués? C’est à côté de Poquelin, le lycée pour coiffeurs au bout de la rue. » 21 ans que le salon de tatouage de Dimitri HK est installé à Saint-Germain-en-Laye, à 10 minutes du château médiéval. C’est le temps qu’il a fallu pour que le tatouage se banalise et que Dimitri s’impose sur la scène française comme un des meilleurs dans son style, un mélange d’esprit punk et d’univers SF. A tel point qu’aujourd’hui, il faut patienter près de 2 ans avant de se faire tatouer une pièce dessinée des mains de l’artiste.

Un insecte dans le cou

La tête de chèvre stylisée qu’il porte sur le mollet droit part d’une blague avec son frangin. / Crédits : Thibaud Delavigne

Dimitri a 14 piges quand il se fait tatouer pour la 1ère fois. A Londres, le milieu punk-rock qu’il fréquente assidûment fait du tatouage un emblème de contre-culture. Pour l’ado, cette petite bestiole – un insecte – est une façon de montrer aux types plus âgés qu’il fait partie du groupe.

« Ma mère m’a dit que c’était mignon mais que c’était bien si je m’arrêtais là. Raté… »

De l’adolescence de Dimitri, nous saurons que ses parents gravitaient dans un environnement plutôt hippie, qu’il est fasciné par la culture rock, la BD tendance Humanoïdes Associés, et que son rêve de gosse était d’être dessinateur. Mais aussi que depuis cette époque, il n’a jamais vraiment cessé d’utiliser le tatouage comme un jeu. Pour preuve, la tête de chèvre stylisée qu’il porte sur le mollet droit et qui part d’une blague avec son frangin.

Les iroquois du Val Fourré

Dans les années 80, Dimitri tatoue « à l’arrache » et se fait tatouer – beaucoup. Le mélange idéal entre milieu rock et dessin le conforte dans l’idée de faire du tatouage son activité principale. Dimitri finit par s’installer à Mantes-La-Jolie, plus précisément au Val Fourré. C’est de cette cité qu’il lance son business avec des machines bricolées. Pendant plusieurs années, des rockeurs portant perfecto, coupes iroquoises et Doc Martens traverseront le Val Fourré pour se faire « encrer ». Ce qui donne parfois lieu à de mémorables rencontres avec les lascars du coin :

« Je me souviens d’un client, qui est devenu un copain, qui sonne chez moi au Val. Je venais de me réveiller, j’ouvre la porte, le type était en sueur. Il m’explique qu’il y a 10 types qui l’attendent en bas pour lui faire les poches… Faut dire que j’habitais tout au bout de la cité, fallait tout traverser à pied. »

C’est à cette époque, quand les tatoueurs étaient rares et les machines difficiles à trouver, que Dimitri se fait un nom et affirme son style graphique. Le Val Fourré devient un frein, il déménage… pour Saint Germain-en-Laye.

Saint Ger’ et la mode du tatouage

A partir des années 90, le tatouage se démocratise et Dimitri surfe sur la vague – « j’ai même tatoué mon dentiste, entièrement ». Les affaires marchent bien, ce qui lui permet d’affirmer un peu plus son dessin et de compter aujourd’hui parmi les références du tatouage français. A tel point qu’il ne fait plus que de grosses pièces : bras, jambe ou dos entier.

(img) Session tatouage dans le salon de Dimitri

Il y a 10 ans, Dimitri a aussi lancé sa maison d’édition “Around The Caps”, consacrée aux dessins de tatouages évidemment. Il expose régulièrement ses dessins, notamment au 59 Rivoli, et participe à de grandes conventions comme le Mondial du Tatouage. Le tattoo s’est institutionnalisé et Dimitri avec lui. Mais pas complètement non plus, le boulot et Saint Ger’ ne l’ont pas empêché de jouer de la guitare dans le groupe Happy Kolo….

« Des concerts dans lesquels tu peux tout faire sauf péter des bouteilles de verre… ça risquerait de blesser les chiens… »