15/02/2023

Notre documentaire retrace le combat de son père pour la vérité

Allan est mort dans une cellule du commissariat de Saint-Malo

Par Inès Belgacem

Allan Lambin est mort dans une cellule du commissariat de Saint-Malo en 2019. Il avait 19 ans. Dans le documentaire Violences Policières, le combat des familles, son père Franck Lambin se confie sur ses quatre années de deuil impossible.

« Je passe toutes mes journées ici », explique, calme, Franck Lambin, assis sur la tombe de sa femme et de son fils, Allan. « Du matin au soir, je vais uniquement voir mon fils au cimetière et chez le médecin. » La première est partie il y a moins d’une décennie d’un cancer incurable. « On a eu du mal à se remettre de son décès », commence Franck :

« C’est Allan qui m’a remis sur pied… »

Allan, lui, décède quelques années plus tard, en 2019, dans une cellule du commissariat de Saint-Malo (35). Il avait 19 ans. Dans le documentaire Violences Policières, le combat des familles, Franck Lambin prend la parole. Il était là le jour du drame. Il a vu l’interpellation musclée, puis les cellules du commissariat. Depuis, il peine à vivre. Sa maison est devenue un mausolée pour son fils. Il tient la journée avec de la morphine et dort la nuit à l’aide d’antidépresseurs. Il a déposé six plaintes et tente de se battre pour avoir justice et vérité pour Allan. Mais ce combat semble trop lourd pour sa santé :

« On m’a enlevé mon fils, mais on m’a enlevé ma vie. Le 9 février 2019, c’est ma mort. »

Cédric Chouviat, Claude Jean-Pierre, Allan Lambin, Gaye Camara, Wissam El Yamni, sont morts après une intervention de police. Leurs familles se sont engagées corps et âme dans un combat pour comprendre les circonstances de leur décès. Elles organisent des manifestations et des actions pour faire perdurer leur mémoire et réclamer un procès. Malgré les preuves et les témoins, la version des familles est systématiquement écrasée par celle des forces de l’ordre.

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Les faits

Le 9 février 2019 était pourtant un joyeux week-end à la mer. Après un tournoi de billard à Dinard (35), Allan loupe l’entrée du camping où ils rejoignent des amis. « Il a freiné un peu trop dur et la voiture a glissé, il pleuvait des cordes », raconte le père. Allan plante sa voiture dans un fossé. Plus de peur que de mal. Franck le rejoint pour l’aider à gérer la situation. « Allan est agacé, préoccupé, il s’inquiète pour sa voiture », raconte un des amis présents. Les pompiers passent, puis une voiture de police. « Ils étaient arrogants, ils nous ont pris de haut », explique Franck :

« Ils s’en sont vite pris à Allan, parce qu’il a pris une bière dans son coffre. Il en boit une, puis une deuxième. Ils ont pris ça comme une provocation. »

Le jeune homme est violemment plaqué au sol. Lui et son père sont « roués de coups », affirment ses amis présents au média France 3. Ils ajoutent qu’Allan s’est plaint d’avoir très mal au thorax, alors qu’il est encore immobilisé au sol. « Je me suis couché sur lui pour lui éviter les coups qu’il prenait », raconte Franck. « Après, quand tout s’est calmé, Allan s’est relevé mais il était complètement hagard. Il n’était plus là, Allan. »

Franck Lambin était là le jour du drame. Depuis, il peine à vivre. Il a déposé six plaintes et tente de se battre pour avoir justice et vérité pour Allan. / Crédits : DR

Ils sont emmenés au commissariat de Saint-Malo et placés en cellule de dégrisement. Le taux d’alcoolémie d’Allan est au-dessus de la limitation. Un médecin le déclare apte au placement en détention à 22h40. Le garçon se lève et s’effondre quelques minutes après, selon l’avocate de la famille, maître Laudic-Baron, qui a pu visionner les images de vidéosurveillance de la cellule. L’IGPN note qu‘« aucun policier ne s’est inquiété de son sort pendant près de deux heures ». Quand le médecin revient à minuit trente, le cœur d’Allan s’est arrêté. Il est déclaré mort à 1h10, le 10 février 2019. « L’autopsie nous apprend que la cause du décès est un syndrome asphyxique à la cage thoracique, avec présence de syndrome hémorragique », explique maître Laudic-Baron.

Allan

Franck Lambin perd pied depuis la mort de son fils. Il voudrait trouver la force de réclamer justice pour Allan. Il est assisté par l’ex-petite amie d’Allan, Emmy. Elle s’est rapprochée des autres familles victimes de violences policières et tente de communiquer sur la mort d’Allan sur les réseaux sociaux. « Tout ce qui peut faire avancer les choses fait du bien à Franck. J’essaie de le soulager », confie Emmy. Dans le documentaire, tous les deux racontent leur amour pour le jeune homme de 19 ans. « C’était quelqu’un qui était toujours joyeux, un peu fou, avec plein de projets dans la tête. Avec beaucoup d’humour », sourit tristement Emmy :

« Il avait pour projet de monter une entreprise avec son papa, de pouvoir travailler ensemble. De construire une maison, d’avoir une vie stable, de fonder une famille, de devenir papa. C’est des choses dont on a parlé ensemble. »

Franck Lambin est assisté par l’ex-petite amie d’Allan, Emmy. Elle tente de communiquer sur la mort d’Allan sur les réseaux sociaux. « Tout ce qui peut faire avancer les choses fait du bien à Franck. J’essaie de le soulager », confie-t-elle. / Crédits : DR

Franck a déposé six plaintes pour « violences policières », « coups et blessures » sur sa personne, « mort suspecte » ; mais également pour « non-assistance à personne en danger » contre le médecin qui a examiné Allan. Les deux dernières plaintes concernent l’IGPN : pour « dissimulation de preuves » (les images de vidéosurveillance) et « modification de témoignages ». Franck conclut dans le documentaire :

« Mon objectif est de voir tous ces policiers impliqués, être punis. »

Violences Policières, le combat des familles est disponible gratuitement et en intégralité sur France.Tv Slash et sur toutes les box TV sur France.Tv.

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