22/09/2023

Le vingtenaire a comparu pour avoir organisé une manifestation non-déclarée

À Annecy, un militant d’extrême droite condamné

Par Christophe-Cécil Garnier

Le 16 mai 2023 à Annecy, une quarantaine de militants d’extrême droite parfois très radicaux s’étaient réunis pour une marche aux flambeaux et aux slogans fafs. Problème : la manif’ n’était pas déclarée. Son organisateur est passé devant la justice.

Tribunal d’Annecy (74) – Chaque fois qu’il se lève, Pierre T. prend quelques secondes pour bien remettre en place le gilet gris qui enserre sa chemise claire aux manches retroussées. Cet ingénieur en développement informatique comparaît devant les trois juges parce qu’il a reconnu être l’organisateur d’une manifestation sur la voie publique sans déclaration, le 16 mai 2023 à Annecy. Un rassemblement d’extrême droite, en « hommage à nos morts » – comprenez, ceux de la France – qui a défilé dans une marche aux flambeaux. « Je ne conteste rien, je suis d’accord », lâche d’un air aimable l’homme de 28 ans, qui tente d’en expliquer la raison :

« On a organisé ça sans déclaration préalable pour éviter tout attroupement d’éléments adverses qui auraient pu causer de la violence. »

L’événement a causé un petit émoi dans la ville bourgeoise des Alpes, avec la publication d’une vidéo sur Twitter – par un compte désormais suspendu – où l’on entend des slogans comme « La France aux Français », mais aussi le slogan préféré du Gud, syndicat étudiant et violent, « Europe, jeunesse, révolution ». Et également la chanson « Les Lansquenets », l’hymne de l’extrême droite militante depuis les années 1960. « Les messages qui sont véhiculés ne sont pas acceptables dans notre démocratie, ni à Annecy, ni ailleurs », avait dénoncé François Astorg, l’édile local (divers écologiste), à l’époque.

Des membres d’un groupe néofasciste

La procession a rassemblé certains membres de l’extrême droite la plus radicale. StreetPress a reconnu Franck Cuter et François Delagrande sur la vidéo, bien connu pour leur participation à Chambéry (73) au groupe néofasciste Bastion social – dissous par le gouvernement en 2019. Les deux hommes avaient écopé d’un rappel à la loi en 2017 pour l’attaque d’un concert de la Fédération anarchiste locale. Ils ont aussi milité au sein d’Edelweiss, groupe qui a servi de base au Bastion social Chambéry et qui est ressorti des cartons après la dissolution. Un autre militant du groupe d’extrême droite radical, Bastien C., a aussi été identifié par StreetPress.

Des profils que les agents annéciens n’ont pas remarqué. Pourtant, ils étaient tout proches, la police ayant escorté tout du long le rassemblement qui a finalement compté une quarantaine de militants. Une réaction qui décontenance d’ailleurs Pierre T. au vu de sa présence dans le prétoire :

« On a eu une autorisation verbale du commissaire de police. On nous a dit de ne pas être sur la route. On a pensé sur le moment que c’était autorisé par l’autorité sur place. On n’a pas eu d’appel à se disperser sinon on l’aurait fait. »

En moins d’une heure d’audience, le tribunal a rendu son verdict contre l’ingénieur, qui a confié à la barre avoir été « obligé de démissionner » par son employeur une fois qu’il a appris son implication dans l’histoire. Pierre T. est condamné à 1.500 euros d’amende. Il ne doit pas détenir ou porter une arme pendant deux ans, et il ne peut pas participer à une manifestation pendant six mois.

À Annecy, un mois après cette marche, des dizaines de militants d’extrême droite avaient défilé malgré l’interdiction de la préfecture après une attaque au couteau dans un parc pour enfants. Là encore, StreetPress avait repéré Franck Cuter et l’Edelweiss de Chambéry.