20/08/2010

Xénophobie: les réactions au rapport du Cerd

Par Sharif Affane

Les experts du Cerd - Comité des Nations Unies pour l'Élimination de la Discrimination Raciale - ont pointé du doigt la France la semaine dernière évoquant une montée du racisme. Ces propos ont violemment fait réagir la classe politique.

Roms, déchéance de la nationalité, débat sur l’identité nationale, vidéo-surveillance, ou encore contrôle au faciès, les experts du comité onusien, le Cerd, n’ont épargné aucun sujet sensible. Selon leur rapport publié le 14 août, la France manque cruellement de volonté politique pour lutter contre les discriminations dont sont victimes les gens du voyage, ainsi que « les français d’origine étrangère ».

« La France de Pétain » selon le Cerd

Face à cette situation, les experts onusiens ne mâchent pas leurs mots. Selon le nigérian Waliakoye Saidou, le carnet de circulation des gens du voyage « rappelle la France de Pétain ». Les mots les plus durs à l’égard de la France sont à mettre à l’actif de l’expert algérien Nourredine Amir. « Je ne comprend pas que dans un même pays, on puisse faire la différence entre un citoyen de première et de deuxième catégorie. Les Roms peuvent être extrader comme s’ils n’appartenaient pas à l’Union Européenne ». L’expert togolais Dieudonné Ewomsan, s’en prend directement à Nicolas Sarkozy, en citant ses déclarations du 30 juillet: « Le discours du chef de l’État n’est pas seulement discriminant, il incite aussi à la haine », martèle le diplomate africain.

Certains membres du Cerd, estiment que les propos tenus par le Chef de l’État ne sont guère en adéquation avec le contenu de la constitution de 1958. C’est le cas de l’expert turc Gun Kut. « Je ne comprends pas ce que c’est qu’un français d’origine étrangère, et en plus je me demande si cela est bel et bien compatible avec la constitution française ».

L’opposition monte au créneau

Les ONG, ainsi que l’opposition se disent entièrement satisfaits du contenu du rapport du Cerd. « La politique menée par le gouvernement français favorise le replis communautaire, assène Blaise Cueco, président du pôle étudiant de SOS racisme. Et, si la France est aujourd’hui condamnée ce n’est pas un hasard ». M. Cueco dénonce également l’hypocrisie du gouvernement. « La nomination de Rama Yade, au poste de secrétaire d’état aux sports n’est qu’un simple décor. Ça reste un arbre qui cache la forêt ».

Pour Noel Mamère, député de Gironde, le gouvernement vire de plus en plus à droite. « Le rôle d’un président de la République n’est pas de souffler sur des braises, mais de rassembler les Français », affirme le parlementaire. Même son de cloche pour Arnaud Montebourg. « Le pouvoir se front-nationalise », prévient le député de Saône-et-Loire.

« Nous n’avons aucune leçon à recevoir des dictatures »

A droite, l’UMP et ses alliés contre-attaquent. Le secrétaire d’État aux affaires européennes, Pierre Lellouche justifie les mesures mises en œuvre par Nicolas Sarkozy: « Toutes les politiques actuelles visent précisément à garantir les libertés publiques. La France est un état de droit rigoureusement respectueux des Droits de l’Homme; dont elle a été la première inspiratrice depuis des siècles ». Christian Vanneste, député du CNI (Centre national des indépendants) remet en cause la légitimité du Cerd: « Sa constitution même le rend suspect. Tous les pays qui y font partie ne sont pas des exemples de démocraties vivantes et de respect des minorités. Nous n’avons aucune leçon à recevoir des dictatures ».

Source: Sharif Affane | StreetPress
Crédits photos: Siège de l’Onu à New-York, Laurent Quinquis | Flick’r Creative Commons