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    25/11/2011

    Partie 1: Interview "c'était mieux avant"

    Anthony Gonzalez AKA M83: « J'ai encore du mal à manipuler et écouter des mp3 »

    Par Etienne Gin

    Sur StreetPress Anthony Gonzalez l'homme-orchestre de M83 prend des airs de papy: «Aujourd'hui tu ne te passionnes plus pour tel ou tel groupe». Son excellent album Hurry Up, We're Dreaming a un lien pèle-mêle avec les Beatles et Madonna. CQFD.

    Pourquoi avoir gardé pour nom M83 alors que tu es seul dans le groupe depuis 2005 ?

    En fait M83 c’est mon projet, mon bébé ! Nicolas est venu par la suite, on a fait deux albums ensemble. Donc il n’était pas question de changer de nom. Avec Nico, on a commencé au lycée. On avait monté un groupe très noisy rock, influencé par Sonic Youth. Et puis à partir de 17-18 ans, je me suis lancé à faire M83 seul avec quelques démos. Je les ai envoyées à certains labels, et en 2000, l’un d’eux m’a proposé de faire un album. C’est à partir de ce moment-là que j’ai pensé à Nico, qui bossait alors avec d’autres personnes. C’était un membre à part entière, mais ça restait mon projet, vu que c’était essentiellement moi qui composait les chansons. Mais on bossait quand même quelques fois à deux…

    Quels sont les grandes nouveautés sur ton nouvel album « Hurry up, we’re dreaming »  ?

    J’essaye de me renouveler sur mes albums mais en y réfléchissant le moins possible. Je souhaite être assez sincère avec ma musique. J’ai déménagé à Los Angeles il y a 1 an et demi. Le fait d’avoir commencé cet album dans une nouvelle ville et un nouveau pays, je savais forcément qu’il allait sonner différemment. Mais de toute façon, je bosse à chaque fois avec de nouveaux collaborateurs. Et puis, j’essaye toujours de me renouveler musicalement : en achetant du nouveau matériel et en expérimentant toujours. Je pense donc qu’il y a une touche unique sur chacun de mes albums.

    Midnight City

    Je trouve que les productions des albums des années 80 sont magistrales

    Pourquoi avoir fait un double album ?

    Ça me fait rêver depuis que je suis gosse, quand j’écoutais l’album blanc des Beatles ou Ummaguna des Pink Floyd. J’ai toujours aimé les projets ambitieux, avec beaucoup de matière. Après 10 ans de carrière, je me sentais prêt à aller vers un double album. Je pense que si je ne l’avais pas fait maintenant, ça aurait été difficile plus tard. Je trouve que le marché de la musique évolue de manière assez étrange, donc c’est ma manière à moi de protester. C’est un peu mon manifeste par rapport à la musique d’aujourd’hui.

    Ton manifeste, c’est-à-dire ?

    J’ai encore du mal à manipuler et écouter des mp3, à faire que le marché soit tourné vers des singles en téléchargement. Moi, ma qualité première c’est de faire des albums. J’ai été éduqué comme ça, j’ai grandi en allant acheter les disques de mes groupes préférés. Il y avait cette attente en te disant que dans 1 mois tu feras la queue devant le disquaire pour la sortie de l’album et que tu vas l’écouter pendant un moment en te plongeant dans l’univers de l’artiste. Aujourd’hui, il y a tellement de sorties par semaine, tu passes ton temps à découvrir des choses nouvelles et tu ne te passionnes plus pour tel ou tel groupe. Pour moi, le marché du disque actuel c’est un peu du fast-food de la musique.

    C’est un peu mon manifeste par rapport à la musique d’aujourd’hui

    Parlons justement de ton single : il s’appelle « Midnight city ». Quelle serait « la ville de minuit » pour toi ?

    Lorsque que l’on parle de ville lumière, on pense plutôt à New York. Mais pour moi, c’est vraiment Los Angeles ! Je jouais toutes les semaines dans une équipe de foot là-bas, et pour rentrer le soir, j’allais dans le cœur historique de la ville. Je passais vers 22h, en écoutant de la musique classique contemporaine dans ma voiture. Le fait d’être devant tous ces buildings illuminés, il y avait un côté science-fiction. C’était tellement américain, et même si ce sont des choses que tu as vu 150 fois dans des films, ce n’est pas propre à ta culture. En tant que français, ça a un côté magique ! Cette chanson est un hommage aux lumières de la ville de Los Angeles, mais aussi à toutes les villes où j’ai voyagé la nuit.

    Midnight city est un hommage aux lumières de la ville de Los Angeles

    À l’écoute, on ressent beaucoup d’influence musicale des années 80. Qu’est-ce qui t’intéresse dans cette période ?

    Déjà parce que je suis né dans les années 80 et que j’ai baigné dedans. Même si j’ai découvert Tears For Fears, Madonna ou The Cure en étant ado, je trouve que les productions des albums des années 80 sont magistrales ! Quand tu écoutes les sons, les artistes laissaient beaucoup de place à l’improvisation et aux expérimentations. Aussi parce qu’ils découvraient les instruments électroniques et laissaient beaucoup de place à l’accident en studio. Cette production de sonorités électroniques avec des guitares très brillantes donne au son un côté très clean, très fort émotionnellement. En fait, c’est une période musicale qui m’a toujours fascinée !

    On retrouve un titre sans électro sur cet album, « Soon, my friend », entièrement acoustique. C’est quelque chose que tu veux développer ?

    Je pense que cet album ressemble à toutes mes influences. Comme j’écoute beaucoup de folk, j’avais envie d’expérimenter la guitare acoustique. C’est quelque chose d’aventureux car je n’avais jamais utilisé de guitare acoustique sur mes disques. Mais quand on fait un double album, il n’y a rien de pire qu’un album qui se répète avec les mêmes sonorités et les mêmes ambiances. Donc j’avais besoin d’explorer de nouveaux paysages sonores.

    Tu es aussi cinéphile. Le cinéma influence-t-il tes compositions?

    Je pense être autant influencé par le cinéma que par la musique. Tout jeune, je regardais énormément de films. Et puis j’écoute aussi beaucoup de musiques de films. Quand il y a cette osmose entre la musique, le jeu des acteurs, l’histoire et la lumière, c’est quelque chose de vraiment très fort !

    Le dernier film qui t’a marqué ?

    « The tree of life » de Terrence Malick.

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