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    20/01/2017

    Disparition de filières, coupes budgétaires et augmentation des frais d’inscription

    La fusion des universités parisiennes : folie néfaste et autoritaire

    Par _Camille , Tomas Statius

    Pour Camille, étudiant à Paris 7, il n’y pas de doute : la fusion entre les université Paris 3, Paris 5 et Paris 7 s'annonce comme une galère sans nom pour les étudiant-e-s et les personnels.

    La fusion des universités Paris 3 – Paris 5 – Paris 7 est un projet qui date de 2013. Il a pour but la création d’un grand établissement, une sorte de super université, de 90.000 étudiants. L’idée derrière tout ça est de récupérer des crédits « d’excellence », de s’afficher comme une université label rouge « excellence » et de faire remonter ces facs dans le classement de Shanghai. Pourtant, ce que l’on sait, c’est que toutes les universités qui ont fusionné se sont cassées la gueule. Et que les facs en tête du classement de Shanghai n’ont pas plus de 15.000 étudiant-e-s.

    C’est un appauvrissement disciplinaire

    Le premier risque de cette fusion, c’est la disparition de nos spécificités disciplinaires. Par exemple, l’informatique théorique, la psychanalyse ou les masters de socio du genre et de la migration de Paris 7 risquent d’être noyés dans des équipes qui n’ont pas les mêmes présupposés théoriques. Cette fusion va provoquer un appauvrissement des enseignements et de la recherche. En plus, on peut craindre une baisse du nombre de places, puis de postes, dans les filières les moins nobles pour dégager des marges budgétaires.

    Ce à quoi on s’attend aussi, c’est que les UFR de Sciences Sociales et de Sciences fondamentales soient les premières visées par des coupes budgétaires. Les marges réalisées serviront à remplir les caisses des facs de médecine pour concurrencer Paris 6.

    Ce sera une galère sans nom pour les étudiants

    Du point de vue étudiant, cette fusion c’est une galère. D’abord cela veut dire une fusion des cursus. Les étudiant-e-s d’un même parcours pourront être baladé-e-s entre les différents sites de cette nouvelle super université pour aller en cours.

    Pour pouvoir imposer les modifications d’organisation qu’elles projettent, les trois facs deviendront un “grand établissement”, comme l’université de Lorraine. Les présidences d’universités seront ainsi libres de fixer les frais d’inscription. Sans protection légale, on pourrait très vite atteindre les tarifs anglais, du genre 4000 livres dès la licence !

    Un coût humain et financier irresponsable

    Le pire c’est que cette fusion risque de coûter très cher. À Aix-Marseille, où une fusion du même genre a été mise en place, plus 20 millions d’euros ont été dépensés.

    Mais pas pour créer des postes ! Ils embaucheront peut-être des gens pour lancer la restructuration, mais globalement les services centraux vont se faire mutualiser. On va virer des personnels administratifs et, comme c’est tout de même du boulot de gérer 90.000 étudiants, on va refiler leur charge de travail à celles et ceux qui restent, après leur avoir imposé des mutations forcées. Au bout du compte, tout cela sera géré de manière centralisée, loin des campus, et il y aura de moins en moins de monde pour bosser auprès des enseignant-e-s et des étudiant-e-s. Beaucoup de postes utiles vont disparaître ou être transformés en postes bureaucratiques. On vous laisse imaginer l’efficacité, le service à l’usagèr-e et le soutien à l’enseignement et la recherche de la nouvelle université…

    La méthode

    Au-delà de la fusion, il y a la méthode. À Paris 7, 10 UFR sur 16 se sont prononcées contre cette fusion. Neuf d’entre elles ont même organisé des référendums, avec des scores toujours supérieurs à 70 %, souvent à 90 %. Et pourtant la présidence continue à pousser son projet.

    Vendredi 16 décembre, la présidence de Paris 7 avait invité les membres du conseil d’administration à voter une « feuille de route » entérinant la fusion. Avec les étudiant-e-s mobilisé-e-s, on était naturellement là pour protester. La présidence a convoqué les élu-e-s qu’elle pensait opposé-e-s au projet… à un autre endroit et ne leur a jamais communiqué la salle du Conseil d’administration (C.A).

    Par contre, ce qu’on a bien pu voir, c’est la violence et les coups des vigiles. Il faut dire qu’ils et elles étaient menaçant-e-s ces étudiant-e-s, posté-e-s devant eux, sur leur chemin, se tenant agressivement bras dessus-bras dessous, chantant des chansons, dans un calme cachant sûrement leurs intentions belliqueuses.

    Suite à ça, on a fini par trouver la salle. Les serrures avaient été enlevées, les portes plâtrées et barricadées. Dans une université… Normal ! Ceci dit, au bout du compte, on a quand même réussi à empêcher cette mascarade anti-démocratique.
    Et du coup, vous croyez qu’ils auraient remis en cause la fusion, devant l’opposition de la communauté universitaire ? Qu’ils auraient lancé un débat ? Non. Ils ont refait voter, à l’aube le jour de la rentrée, pendant les partiels, loin de la fac et protégés par 7 camions de CRS.

    Et maintenant ?

    Maintenant on est là. On compte bien y rester. On réclame toujours un minimum de démocratie dans la fac, que l’avis des premier-e-s concerné-e-s soit écouté. Et que le vice-président du C.A. démissionne.

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