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    26/11/2020

    « Ça été mis en place deux-trois jours après la fermeture des petits commerces. »

    Comment Carrefour contourne l’interdiction de vendre des produits non-essentiels

    Par Gabriel Gadré

    Les supermarchés sont restés ouverts, mais ils ont l’interdiction de vendre de nombreux produits jugés non-essentiels. Une règle que Carrefour a contournée en détournant le système du click and collect.

    Depuis le 3 novembre dernier, dans les travées des magasins Carrefour, des rubans de signalisation, des bâches et parfois des barrières barrent l’accès à certains rayons. Deux décrets parus au Journal officiel listent les produits jugés essentiels. Pour tous les autres, la vente en magasin est totalement interdite. Impossible d’aller acheter en boutique un élément de déco ou un jouet pour enfant avant le 28 novembre… Sauf chez Carrefour !

    Le géant de la grande distribution n’a pas joué le jeu. Carrefour a légalement mis en place un système de click and collect, puis en a détourné son usage. Le click and collect consiste à commander sur internet ou sur son téléphone pour ensuite récupérer ses achats en magasin. Mais chez Carrefour « tout était fait sur place », atteste un salarié.

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    « C’est comme ça pour tous les supermarchés » de l’enseigne, estime une déléguée syndicale. / Crédits : Gabriel Gadré

    Au supermarché d’Épinay-sur-Orge (91), sur des affiches disposées sur des étals, on peut lire :

    « Retrouvez nous en point COMMANDES. Nos équipes vous préparent vos produits. Retirez-les 1h après au point RETRAIT »

    Les commandes sont prises à l’accueil. À Sainte-Geneviève-des-Bois (91), c’est carrément un guichet dédié qui a été installé. Situé en plein milieu de l’allée centrale, les clients viennent et sélectionnent les produits. Et pas besoin d’attendre une heure pour les récupérer. Immédiatement après avoir noté la commande, le responsable du rayon va aller chercher la marchandise et la dépose à une caisse dédiée. « C’est comme ça pour tous les supermarchés » de l’enseigne, estime Dominique Hautier, caissière à Carrefour Market Sud Seine-et-Marne et déléguée syndicale à la CGT :

    « Ça été mis en place deux trois jours après la fermeture des petits commerces. Ils ont été rapides. »

    Pas vraiment légal

    Le groupe Carrefour sait qu’il flirte avec la légalité. Le 6 novembre dernier, interrogé par Le Parisien, le ministère de l’Économie et des Finances tapait du point sur la table :

    « Il ne faut pas confondre le click and collect et le ask and collect. Le ask and collect doit cesser immédiatement. »

    À La Ville-du-Bois (91), le supermarché Carrefour aurait – une semaine après le début du confinement – reçu une visite de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) (1). Les inspecteurs auraient menacé l’établissement de sanctions s’ils ne se mettaient pas en conformité avec la règle. Le directeur du magasin a mis fin à la magouille. Les autres commerces de l’enseigne ont, quant à eux, continué.

    (1) Contacté par StreetPress, Carrefour n’a pas répondu à nos questions. La DGCCRF n’a également pas souhaité s’exprimer sur le sujet.
    Photo d’illustration : Carrefour Market de Voisins-le-Bretonneux, prise le 19 avril 2016, via Lionel Allorge sur Wikimedia Commons. Certains droits réservés

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