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    12/06/2012

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    Haribo, Nintendo, baskets Nike : « Les 25 - 30 ans se dirigent vers la consommation régressive »

    Par Robin D'Angelo

    Sur StreetPress Aurélie Kessous, chercheuse en marketing, se souvient d'une trentenaire qui lui racontait ses soirées où «elle dansait sur de vieux génériques en buvant du Nesquik.» Entre crise et peur de l'engagement, «la nostalgie fait vendre.»

    Les 25 – 30 ans sont-ils particulièrement sensibles à la nostalgie de certains produits et de certaines marques ?

    Les 25 – 30 ans, qu’on appelle la génération Y, c’est une génération qui est née dans une époque de crise : le terrorisme, le sida, les divorces … C’est aussi une génération qui ne veut pas grandir, qui a peur de l’engagement parce qu’elle a connu l’allongement des études, une arrivée tardive dans la vie active. Donc c’est une génération qui a réellement besoin d’être rassurée, qui est en quête de sécurité. Pour satisfaire ce besoin, elle a tendance à se diriger vers la consommation régressive. Et pour les marketeurs, les indicateurs sont au vert : la nostalgie fait vendre. Donc on entretient les consommateurs dans ce regret douloureux du passé, tout simplement pour les inciter à consommer. De tous les entretiens que j’ai fait avec des 25-30 ans, tous, tous, tous, mettent l’accent sur l’enfance et le besoin d’être rassurés.

    Pouvez-vous nous citer des exemples de ce besoin de régression ?

    Je me souviens d’un entretien avec quelqu’un de 31 ans qui me parlait de soirées où ils faisaient des cocktails à base d’alcool et de bonbons. Par exemple, vodka-Haribo. Des bonbons étaient distribués, ils dansaient sur de vieux génériques en buvant du Nesquik. Tous les ans, vous avez aussi les Halloween Party organisées par Haribo où on distribue dans les boîtes de nuit des Dragibus.

    Mais surtout ce qui est propre à cette génération, ce sont les marques de jeux vidéo. Je pense à Nintendo qui suscite énormément de nostalgie chez les 25 – 30 ans. La notion de première fois est primordiale. Les 25 – 30 ans sont nostalgiques des débuts de leur indépendance. Ça va être les premières sorties, les premiers plaisirs. Souvent des objets interdits – comme la cigarette – ou des objets qui évoquent la liberté.

    Comment les marques se servent de ça ?

    Ça peut être relancer des packaging anciens, utiliser des slogans cultes, être l’objet d’un réseau du distribution vintage… Ça se voit beaucoup dans le cinéma, je pense à Titanic. Il y a Nintendo aussi qui a ressorti une vieille console.

    Avant, les marques étaient dans une optique transactionnelle. On cherchait à vendre au maximum et à conquérir de nouveaux clients. Aujourd’hui on est dans une optique relationnelle, on cherche à fidéliser et à créer de l’attachement aux marques parce que ça coute moins cher de fidéliser des clients. Et parce qu’ils émettent un bouche-à-oreille positif. On cherche à créer des relations de proximité.

    Et puis avant on n’utilisait pas les communautés de marques. Aujourd’hui il y a les réseaux sociaux. On fait tout pour que ce soit les gens qui parlent des marques, et pas les marques qui parlent d’elles.

    Est-ce que c’est pour ça qu’il y a autant de collectionneurs de baskets Nike ?

    Oui je pense. Ça favorise. Le phénomène de collection, d’attachement, va avec la nostalgie. Et ça se développe parce qu’on a les moyens de développer ce phénomène-là. Avant eBay n’existait pas ! C’est parfait pour les baskets Nike de collection.

    Sinon c’était qui votre Spice Girls préférée ?

    Honnêtement pour moi, c’était LES Spice Girls. Il n’y en a pas une plus que les autres.


    Bio Express

    Aurélie Kessous est chercheuse et professeur assistant en marketing à l’Inseec Business Schools . Elle est l’auteur d’une thèse intitulée « Nostalgie et relations des consommateurs aux marques » et de plusieurs articles sur ce thème.

    C’est une génération qui ne veut pas grandir, qui a peur de l’engagement


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