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    30/10/2012

    Philippe Hayat, auteur du rapport sur l'entreprenariat pour Fleur Pellerin, au micro de la « Matinale Politique »

    « En France, on n'encourage pas un entrepreneur à développer son business »

    Par StreetPress

    Le serial-entrepreneur Philippe Hayat était l'invité lundi de « La Matinale Politique », l'émission politique hebdomadaire de StreetPress et Radio Campus. L'occasion de défendre les propositions de son rapport « Pour un new deal entrepreneurial ».

    Sur son parcours

    Vous êtes diplômé de Polytechnique et de l’Essec, vous commencez votre carrière en tant que consultant dans un grand cabinet de conseil, puis à 28 ans, vous reprenez une entreprise créée par votre grand-père, les Bâches de France. C’est comme cela que vous faites fortune ?

    Disons que quand je l’ai reprise, c’était le contraire de la fortune, j’ai dû m’endetter pour racheter des parts, cela a été un peu compliqué et j’ai perdu 20 à 30 % de mon chiffre d’affaires dès la première année. J’ai fait toutes les erreurs du monde donc je n’ai pas tout de suite été sur la voie la fortune. Mais après les choses sont allées un petit peu mieux !

    Vous avez revendu cette entreprise quelques années plus tard…

    J’ai multiplié par 5 le chiffre d’affaires, et par 10 le bénéfice. En fait, quand je l’ai rachetée, je faisais des bâches pour couvrir les camions, et quand je l’ai vendue, c’était le leader français du coffrage de chantier pour faire des bâches publicitaire pour protéger les chantiers.

    div(border). h4>La Matinale PolitiqueChaque lundi à 19h, la « Matinale Politique » vous donne rendez-vous pour parler politique… en se prenant la tête mais pas trop quand même. L’émission est diffusée en direct sur Radio Campus 93.9FM et en streaming sur StreetPress. Pour réécouter l’émission en podcast, c’est par ici.

    Sur l’entrepreneuriat en France

    Dans votre rapport rendu à la ministre des PME et de l’innovation, vous expliquez que sur les 550.000 entreprises qui se créent chaque année en France, il y en a seulement 7.000 qui, à terme, vont créer 10 emplois dans la structure. Et qu’il y en a seulement 1.000 qui créeront plus de 50 emplois. Cela veut dire que la quasi-totalité des entreprises ne créent pas d’emploi ?

    Oui, absolument, c’est exactement ce que cela veut dire. En France, on a un très fort nombre de création d’entreprises mais on ne sait pas les faire grandir, ce qui fait qu’au bout de la chaîne, vous arrivez avec seulement 4 .500 entreprises qui dépassent 250 salariés, contre le double en Angleterre, le triple en Allemagne. Or c’est vraiment cela qui crée les emplois donc c’est bien dommage de s’en priver.

    La faute à qui ?

    En fait, l’entrepreneur de croissance n’a jamais été véritablement encouragé en France, c’est-à-dire que lorsque vous regardez les plans gouvernementaux des 30 dernières années, on a toujours encouragé « l’entrepreneur par nécessité », c’est-à-dire celui qui entreprend [parce qu’il cherche] du travail. Mais, on encourage beaucoup moins « l’entrepreneur par opportunité », qui monte une affaire qui se développe. Et pour encourager celui-ci, il faut réunir un ensemble de facteurs. On peut les détailler : il y a la fiscalité, la flexibilité sociale…

    Dans votre livre, vous dites que ça s’explique aussi parce que les hommes politiques n’ont jamais été à la tête de PME

    Malheureusement, oui, dans le gouvernement je crois que l’on a un patron d’une clinique, et c’est tout.

    Est-ce qu’il y a des risques que votre rapport, commandé par Fleur Pellerin, soit enterré d’une manière ou d’une autre, comme c’est le cas de beaucoup de rapports ?

    Le risque est certain, oui.

    On vous murmure nommé Haut Commissaire à l’entrepreneuriat…

    Ce poste n’a de sens que s’il correspond à une vraie motivation et à une volonté politique du gouvernement, ce qui n’est aujourd’hui, je ne pense, pas encore le cas.

    Et si la ministre vous propose ce poste, vous accepteriez avec enthousiasme ?

    Je demanderais d’abord qu’il y ait une réelle volonté politique au plus haut sommet de l’État.

    Sur les licenciements

    L’actualité, ce sont les licenciements, essentiellement chez Peugeot, Electrolux, dans les hauts fourneaux à Gandrange. Vous auriez été le patron de Peugeot, vous auriez licencié vos salariés ?

    Je crois, malheureusement, que lorsque les entreprises licencient, c’est qu’elles n’ont pas le choix. Elles ne font pas cela, comme on le dit trop souvent, juste pour optimiser ou pour faire plaisir à des actionnaires. Elles le font pour se réorienter et affronter l’avenir et il faut qu’on se le dise, une fois pour toutes, que l’emploi à vie dans un grand groupe n’existe pas et que cela fait 20 ans que les grands groupes détruisent des emplois. Raison de plus pour prendre sa vie en main, entreprendre et ne compter que sur soi pour créer son propre emploi.

    Sauf qu’après, on a créé sa propre entreprise, avec des salariés, qui pourront aussi être licenciés…

    Oui, mais ce sont les petites entreprises qui créent le gros des emplois donc en créant une société, en arrivant à la faire passer à cinq, dix, vingt ou même trente salariés, on arrive à créer trente emplois, donc c’est là qu’est l’avenir de l’emploi.

    Vous insistez dans votre rapport sur la valorisation de l’image de l’entrepreneur. Mais avec ces annonces de licenciements à la chaîne, l’image des entrepreneurs en prend un sacré coup !

    Attention, il ne faut pas confondre l’entreprise et l’entrepreneur. Les dirigeants de Peugeot ne sont pas des entrepreneurs. Ce que j’appelle un « entrepreneur », c’est celui qui monte son entreprise, qui embauche et qui créé de la croissance. À ne pas confondre avec des dirigeants de grands groupes qui optimisent et licencient. Mais je comprends qu’ils le fassent, il y a une réalité économique derrière tout ça.

    Sur les auto-entrepreneurs :

    Beaucoup de nos internautes et de nos auditeurs sont des freelances, graphistes, vidéastes, parfois auto-entrepreneurs… Ces auto-entrepreneurs, ce sont aussi des entrepreneurs ?

    Oui, je crois qu’il faut résolument encourager les gens qui se prennent en main et qui se mettent à leur compte. Je suis ravi du statut de l’auto-entrepreneur, je trouve que cela a apporté beaucoup et il y a 250.000 personnes cette année qui se sont dit : « tiens, j’ai une passion, un talent ou une envie, j’en fais mon petit business à moi », et cela est très bien.

    bqhidden. Raison de plus pour prendre sa vie en main, entreprendre et ne compter que sur soi pour créer son propre emploi.

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