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    13/09/2011

    Un film de bras cassés

    Opération : un porc pour Gaza

    Par Johan Weisz

    Le Cochon de Gaza, signé Sylvain Estibal, sera en salles à partir du 21 septembre. Une farce tragi-comique qui vient démontrer comment un gros porc peut être plus utile qu'une flotille. Mais ceci n'est que du 3e degré, cela va de soi.

    Un film de bras cassés. Qui se termine sur un plan de béquilles qui font la paix haut dans le ciel. Non, le Cochon de Gaza n’est pas un long-métrage sur les polyhandicapés. Quoi que. Dans le PalestIsrael actuel (comme aiment l’appeler les très bons Azri et Gabri qui signent la BO du film), l’image fonctionne pas mal. Pour représenter les peuples israéliens et palestiniens, incapables de faire la paix depuis 60 ans, il fallait convoquer des branquignoles.

    Un porc, un nazi et un coiffeur Le héros principal s’appelle Jafaar. Un pêcheur simplet qui n’attrape plus de poissons dans ses filets mais des tongs ou des vieilles pompes… et donc aussi un cochon. Introduire un porc à Gaza est un bon ingrédient pour faire démarrer votre farce. Convoquez un coiffeur (à la Lanzmann) membre du Hamas, un officier de l’Onu qui part dans un délire nazi (Ulrich Tukur) et un flic danseur de hip hop accroc au sperme de porcin et vous obtenez un bon début. Puis, donnez du viagra au cochon ou enroulez le d’une ceinture d’explosifs pour donner du goût.

    Troisième degré Ici tout se joue au 3e degré. Au détour d’une conversation, on apprend que Jafaar s’appelle Jafaar… Abbas. Ce qui donne : « Comment allez-vous Monsieur Abbas ? Comment vont les soldats qui campent sur votre toit ? ». C’est l’officier de l’Onu qui reçoit (Jafaar) Abbas. Très vrai. Dans le film, le pêcheur de Gaza cohabite dans une maison dévastée par les combats avec 3 conscrits israéliens qui occupent le dernier étage pour faire le guet.

    Et lorsque Jafaar apprend comment les Israéliens élèvent les porcs sur des planches au-dessus du sol, pour qu’ils ne touchent par la terre sainte : « On devrait faire pareil ici avec un étage pour les Israéliens et un étage pour les Palestiniens… Ca résoudrait le problème ».

    Tout n’est pas bon… Mais tout n’est pas bon dans le cochon. La farce a du mal à s’installer et on est loin du conte comme sait le scénariser un Radu Mihaileanu ou d’un tragi-comique à la Benigni. Le 3e degré sonne parfois trop comme le coup de sang d’un réalisateur qui a voulu dire ses 4 vérités sans parvenir toujours à décrocher mieux qu’un sourire. Un peu comme si les vannes manquaient de densité pour marquer le spectateur. Ouf, la dernière demi-heure, carrément onirique sauve le tout et permet au long-métrage de s’en sortir avec la moyenne.

    Un casting de bras cassés La force du Cochon de Gaza est à chercher dans son casting de bras cassés. Le personnage très touchant de Jafaar est campé par Sasson Gabay, un juif irakien star du cinéma israélien… mais que vous avez peut-être aperçu ici en Occident en train de camper les rôles de méchants musulmans dans des sous-super-productions hollywoodiennes (Rambo III, Delta Force One The Lost Patrol). A l’inverse, c’est Myriam Tekaïa, d’origine tunisienne, qui incarne Yelena, une juive russe qui a immigré en Israël « pour réaliser le rêve de son père » et qui lance à un Jafaar hébété « Si ça continue, peut-être que je vais retourner dans mon pays… ben oui la Russie ».

    Modernité Comme pour le rôle de Yelena, les personnages de flics et de soldats laissent apparaitre sous leurs casques une nouvelle génération d’acteurs. Un casting jeune qui donne au long-métrage un souffle de modernité, avec le tunisien Lofti Abdelli (le flic ripou qui danse le hip hop) ou l’israélien Zohar Wexler (le militaire qui garde la colonie).

    Une génération d’indignés, lassés par « une situation désespérante qui semble figée à jamais » (Myriam Tekaïa). Des jeunes acteurs qui ont du bien se marrer pendant les semaines de tournage à Malte, où a été réalisé le film. Et qui on imagine aimeraient bien voir débarquer – en vrai – un cochon sur la plage de Gaza. Il se pourrait bien que ça soit plus utile qu’une flotille.

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