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    05/12/2016

    5 photographes racontent leurs clichés

    Une vente aux enchères de photos pour venir en aide aux réfugiés

    Par Juliette Hochberg

    Le 9 décembre, cinq photojournalistes vendent leurs photos aux enchères pour soutenir Singa, une asso d'aide aux réfugiés. A StreetPress, les photographes expliquent les coulisses d'une de leurs images.

    Le 9 décembre, les Déclencheurs organisent à la Folie dans le 19e une vente aux enchères au profit de Singa, une asso d’aide aux réfugiés. Pour l’occasion, l’association a invité cinq jeunes photojournalistes à vendre leurs clichés pour la bonne cause. Tous ont travaillé sur les conditions de vie des réfugiés, de la Hongrie aux côtes méditerranéennes.

    Pour StreetPress, partenaire de l’évènement, ces jeunes Capa en herbe racontent les coulisses de l’une de leurs photos.

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    Hongrie, septembre 2015 / Crédits : Louis Witter pour Hans Lucas

    Louis Witter : « Hongrie, septembre 2015. Un nombre incalculable d’enfants, de femmes, de personnes en fauteuils roulants suivent ce chemin de fer qui relie la Hongrie à la Serbie. J’ai pris cette photo quelques instants avant que l’armée hongroise ne ferme la frontière avec des barbelés. À droite de la photo, il faut s’imaginer des policiers avec des gants et masques à gaz.

    Des familles entières continuaient d’arriver, dont ce père avec son gamin sur les épaules, qui venait sûrement de marcher des milliers de kilomètres. Cette photo n’est pas informative. Ça pourrait être simplement un parent en balade avec son enfant. Mais elle est importante car elle montre leur cheminement. »

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/senpau_calais_bon.jpg

    Calais, Mi-janvier 201 / Crédits : Johanna Senpau

    Johanna Senpau : « Mi-janvier 2016, fin de journée à Calais. Zaman est le premier réfugié que j’ai photographié. Il était policier en Afghanistan. Il souffrait énormément de voir la manière dont ses homologues, les CRS ici, les traitaient.

    À Calais depuis huit mois, il tenait une petite épicerie. Il m’a expliqué comment fonctionnaient les commerces. Ils étaient souvent tenus par des Afghans ou des Pakistanais, qui ont recréé une petite économie dans la jungle. Ces « boutiques » apportaient un peu de chaleur parce qu’elles étaient des endroits de rencontre. Des havres de paix qui contrastaient avec l’hostilité, les tentes, la boue, le froid, et leur précarité. Elles ont aidé les gens à tenir le coup. Cette photo m’a beaucoup marquée. »

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/gautheron_calais.jpg

    Février 2016 à Calais / Crédits : Pierre Gautheron pour Hans Lucas

    Pierre Gautheron : « Février 2016. En cette fin de matinée, dans la zone Sud de Calais, la police avait pris tout le monde par surprise. Nous étions tous persuadés que l’évacuation aurait lieu d’ici trois semaines, un mois, voire deux.

    Réfugiés et militants ont serré les rangs face aux policiers. Ils criaient : « Pourquoi vous faites ça ? », « Vous devriez avoir honte ! », « Regardez-vous ! Vous aussi vous êtes humains. Vous aussi vous avez des enfants. » Un des militants a pris un bout de verre, comme un miroir. Il voulait que les policiers se regardent.

    J’ai mis beaucoup de temps à prendre cette photo. Je ne voulais pas apparaître dans le cadre, toute la symbolique aurait été perdue ! Ni le militant ni les policiers ne bougeaient. C’était un face à face. Dans le reflet, on peut voir que les policiers se marrent. Est-ce un rire tendu ? Est-ce qu’ils rient parce que ça fait dix minutes que j’essaie de prendre ma photo ? »

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/lecat_paris_2.jpg

    Stalingrad, le 31 octobre 2016 / Crédits : Rose Lecat

    Rose Lecat : « 31 octobre 2016, Jaurès. Il est 8 heures du matin. Des fourgons de CRS arrivent. Il y a déjà beaucoup de journalistes. Les camps de Calais viennent d’être démantelés. L’évacuation de celui installé sous le métro aérien se prépare.

    Quelques minutes avant que je prenne cette photo, la police avait déjà gazé la foule. Un mouvement de protestation se dessine. Afghans et pakistanais en profitent pour faire entendre leur désarroi. Ils crient en anglais qu’ils ne sont pas des animaux. »

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/stramba-badiali_1.jpg

    Août 2015 au large des côtes libyennes / Crédits : Christophe Stramba-Badiali (Haytham – REA)

    Christophe Stramba-Badiali : « Août 2015. On venait de terminer un secours en mer aux larges des côtes libyennes. Je remontais à bord du bateau Largos de Médecins sans frontières. J’ai vu cet homme d’Afrique de l’Ouest se recueillir. Je ne lui ai pas tout de suite parlé. Je voulais le laisser évacuer tout ce stress accumulé pendant la traversée. Il avait une chance sur deux de mourir. À ce moment là, chacun réagit d’une manière différente. Il y en a qui dorment tout de suite, d’autres qui chantent, et d’autres, comme lui, qui prient. Derrière cette photo, il y a le bruit du bateau et des gros moteurs, et en même temps, le calme de la Méditerranée qui l’effraie. »

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