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    06/02/2017

    Je viens de passer 6 ans en prison et j’ai recommencé à braquer. Voici pourquoi.

    Par Alioun , Aladine Zaïane

    La prison, après une longue peine laisse des traces. Alioun, qui a purgé une longue peine pour braquage, raconte pourquoi il a récidivé.

    Ce sont mes mauvaises habitudes qui m’ont poussé à braquer de nouveau. C’est un cercle vicieux. Tu ressors pas comme ça si t’es dedans depuis des années.

    Je voulais voir si j’avais encore les couilles de braquer

    Ceux que je vois s’en sortir ont soit réussi à mettre de l’argent de côté, soit ont rencontré l’amour, soit ont vu un proche décéder. Ou alors qu’ils sont passés à autre chose, grâce à la religion. Il n’y a que ces quatre échappatoires.

    Sinon, tu gardes le nez dedans. Moi, c’est ce qui m’est arrivé. Je me rends compte que la prison m’a transformé, j’y ai perdu 6 ans de ma vie. J’en suis arrivé à vouloir me tester pour voir si j’avais encore les couilles [de braquer] ou si c’était du passé.

    «La prison m’a transformé […] J’en suis arrivé à vouloir me tester pour voir si j’avais encore les couilles [de braquer] ou si c’était du passé.»

    Alioun, ancien détenu et récidiviste

    A ma sortie de prison

    Il n’y a pas eu d’accompagnement à ma sortie. Concrètement, je rencontre la SPIP (service pénitentiaire d’insertion et de probation) chaque mois, elle me demande “Comment ça va ? Vous avez trouvé un emploi ? ”

    Si tu taffes pas, faut ramener à la SPIP des preuves que tu pointes au moins aux boîtes d’intérim. Donc faut demander aux boîtes un justificatif et leur dire… que tu sors de prison. Si tu n’as pas quelqu’un d’intelligent en face de toi qui va te donner ta chance, jamais ils te rappelleront.

    Niveau thune, c’est chaud

    À part les premiers mois où on reçoit une allocation de Pôle Emploi de 450 euros, le système ne donne rien. Et en même temps, je déteste demander quoi que ce soit.

    J’essaie d’être le plus droit possible mais quand t’as au mieux 1000 euros en poche et que tu finis le mois sans rien, tu récidives par nécessité. Donc, s’il y a un gros coup à faire, et bien j’y vais, si le risque en vaut la peine.

    «Quand t’as au mieux 1000 euros en poche […]s’il y a un gros coup à faire, et bien j’y vais, si le risque en vaut la peine.»

    Alioun, ancien détenu et récidiviste

    Avec mon casier judiciaire c’est difficile de trouver du travail sans avoir de pistons. J’ai fait les boîtes d’intérim chaque matin. Les jobs qu’ils nous proposent sont des emplois de chien.

    Quand t’as connu un certain confort avec tes “activités” tu peux pas te permettre de faire des travaux de merde : On te propose que des boulots de plonge, la plonge et encore la plonge… Ou éboueur.

    La conséquence, c’est que tu commences à penser que tu t’en sortirais mieux en étant “indépendant”. Tu te dis, qu’il faudrait que tu fasses ta propre “caisse”.

    Oui j’ai replongé

    Alors, oui, j’ai braqué à nouveau. Après avoir replongé pour faire ce dernier coup, j’ai repensé à ce que j’encourais si je me faisais attraper. Je suis donc passé à autre chose. J’ai arrêté avec les braquages.

    Je suis maintenant dans des “investissements” dans des commerces ou des salles de sport.

    Le regard des gens

    J’ai l’impression que je n’ai pas encore trouvé ma place dans cette société. Les familles du quartier disent à leurs enfants “ traîne pas avec lui, il va t’emmener en prison”. Le regard des gens me pèse.

    Il y a aussi le regard des anciens “concurrents”. Des regards qui disent : “Avant la prison, il faisait de l’argent. Maintenant regarde c’est un clochard”. Ca touche énormément mon orgueil.

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