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    30/06/2017

    « La voix des noirs est toujours sous-représentée »

    Le Tchip, le podcast militant consacré à la culture Afro

    Par Asma Benazouz

    Le Tchip est une émission de radio diffusée en podcast sur la plateforme Afrostream. On y cause afro-culture, afro-féminisme et réappropriation culturelle.

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    « Tous les noirs du monde tchippent. C’est un son propre aux noirs que tout le monde connaît », explique François, lové au fond d’un canapé. Le tchip est une onomatopée, un petit bruit de succion, un signe de désapprobation. C’est aussi le nom que François et sa bande ont donné à leur émission de radio exclusivement consacrée aux cultures afro.

    Le podcast, lancé en avril 2016, est diffusé sur Afrostream, plateforme de diffusion de films et de séries africaines et afro-américaines. On les retrouve aussi, une fois par mois, sur Arte radio, pour l’émission Noir Is the New Black. « Un nouveau podcast mensuel où trois trentenaires sympas d’origine antillaise et africaine partagent leur expérience noire », détaille le site.

    Qui sont-ils ?

    Dans un petit studio de 18 m2 au cœur du 5e arrondissement de Paname, Mélanie, François et Kévi sirotent un rhum Trois Rivières. Sur les murs sont accrochés une dizaine de posters de Martin Luther King ou des slogans comme « Equality for everybody ». Ce soir-là, comme deux fois par mois, l’appartement de Kévi s’est transformé en studio d’enregistrement.

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    FUBU /

    A 33 ans, Kévi est guide touristique. Il a créé Le Paris Noir qui organise des balades retraçant l’histoire des intellectuels noirs passés par la capitale. Sur Twitter, il suit le travail de François, alors journaliste à Konbini, avant de le rencontrer par hasard. C’est ce dernier qui lui présente Mél, 33 ans, la voix afro-fém’ de la team, également journaliste. Aujourd’hui, les deux animateurs sont collègues de travail à 20 minutes.

    C’est quoi leur baye ?

    Sur le rythme cadencé de Rude Boy de Rihanna, le trio prend un dernier snap avant de commencer l’émission. Kévi appuie sur le bouton rec. C’est parti pour une heure de débat.
     
    D’entrée de jeu, la team descend « Hyper Tranquille », le dernier son de Benjamin Biolay. Ils crient à l’appropriation culturelle. Pour François, c’est du « hit and run », « de la grosse merde ». Kévi, bonnette rouge collée aux lèvres, en remet une couche :

    « Quand, dans le hip hop, l’auto-tune était utilisé il y a quelques années, c’était de la merde. Quand c’est Biolay qui le récupère, ça devient de la variété française. Pour moi, la nouvelle variété française, c’est Booba, PNL et même Maître Gims. Elle n’est pas considérée à sa juste valeur parce qu’elle est pratiquée par les fils d’immigrés et par des banlieusards ! »

    De Frantz Fanon à Katy Perry – qui compare ses cheveux noirs à Barack Obama – le trio aborde sans langue de bois et sur un ton léger tout ce qui touche de près ou de loin à ce qu’ils appellent « la diaspora noire ». T-shirt noir et montre dorée au poignet, François poursuit :

    « On est à mi-chemin entre une émission intello et le café du commerce »

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    On air /

    Un ton engagé, une parole libre et sans concession. Le Tchip est un espace qui explore les ponts entre les différentes cultures noires mais « que les blancs aussi écoutent », précise Kévi.

    Afro militants

    L’idée du podcast a longtemps mûri dans l’esprit de ce dernier. Tout en reprenant une gorgée de son punch, il confie :
     

    « C’est quand je me suis intéressé à la pop culture américaine que ma conscience politique s’est développée. Je voulais créer un espace où l’on puisse parler de racisme, d’appropriation culturelle ou d’esclavage à travers la pop-culture afro et sur un ton rigolo. »

    Assise à sa gauche, Mélanie, short et converses rouges renchérit :

    « Dans les médias, les séries ou les films en France, la voix des noirs est toujours sous-représentée ou alors empreintes de clichés. On voulait créer un podcast “for us by us“ où les noirs et les personnes qui s’intéressent à cette culture se reconnaissent. »

    Ne leur parlez pas de communautarisme

    Pour les trois acolytes, pas question de se faire étiqueter « communautaristes » :

    « Alors que les noirs ne sont pas représentés et que nos cultures sont niées, je ne vois pas pourquoi on s’excuserait de créer un espace d’expression et d’écoute. A chaque fois qu’on parle de communautarisme, on cible les minorités. Que je sache, on n’accuse pas les rédactions parisiennes, par exemple, d’être communautaires parce qu’elles n’emploient que des blancs ! »

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