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« Notre vagin leur fait peur comme s’il était empoisonné. Après nous sommes la moitié de l’humanité. Ils ont raison d’avoir peur si on l’ouvre toutes. »
À 24 ans, Lous and the Yakuza a des idées et compte bien les assumer. « Je suis une femme noire. Je suis pretty, smart et j’ai des qualités. Je ne compte pas m’excuser d’exister. » Dans sa musique, elle aborde régulièrement les questions de sexisme et de racisme. Elle n’a que trois morceaux à son actif et son premier album, Gore, est en préparation. Mais déjà son discours engagé porte : son dernier clip a dépassé les 2,5 millions de vue sur YouTube et de très nombreux médias parlent d’elle. Son univers léché et arty séduit.
Avoir un micro
Son visage fin se départit rarement d’un sourire, qui souligne ses pommettes marquées par deux sigles dont elle seule à le secret. Bavarde, elle enchaîne les sujets les uns après les autres : la nécessité de construire un féminisme inclusif, la stupidité du racisme, le manque de mémoire coloniale, la nécessité de solidarité, des idées anti-capitalistes. « J’ai la chance d’avoir un micro et j’essaie d’en faire bon usage. » La Belge, avide de réussite, voudrait jouer le rôle modèle. « C’est déjà un acte d’activisme puissant d’être quand tu es une femme noire. Si je peux inspirer des soeurs à être et leur montrer qu’elles ne sont pas seules, j’en serais heureuse. »
Lous pourrait simplement parler de sa musique, qu’elle écrit et interprète. Raconter ses inspirations multiples, ses envies de lier hip hop et musique française. Mais ça serait ignorer son univers plein d’émotion, impudique et sombre. « Je suis écoeurée par le manque de solidarité et d’empathie dans tous les domaines. » Une influence de ses parents, médecins dans l’humanitaire. Elle navigue entre le Congo, le Rwanda et la Belgique, où elle finit par s’installer à partir de ses 15 ans. Elève studieuse, elle lit et écrit beaucoup. La musique la ronge, jusqu’à être virée de chez elle. Elle vit quelques mois dans la rue, où elle constate la dureté et la précarité. Les solidarités aussi. Elle tombe dans des petits trafics, avant de sortir la tête de l’eau. Elle raconte, aussi, une maladie et des allers et retours à l’hôpital. Mais les courtes interviews de promo l’empêchent de poursuivre. Elle doit filer. Après 40 minutes de discussions, elle conclut :
« Tu ne peux pas vivre et voir autant de choses sans en parler. »