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    16/05/2023

    Officiellement le magazine est indépendant, mais…

    Le Courrier messin, le magazine à la gloire du maire de Metz dans le viseur de la justice

    Par Leo Le Calvez

    Le Courrier messin est un journal très enclin à dire beaucoup de bien du maire de Metz. Pas étonnant puisqu’il ne survit que grâce aux fonds publics. Une plainte a été déposée notamment pour « détournement de fonds publics » et « favoritisme ».

    Le Courrier messin s’est lancé en janvier 2022. Le journal de 48 pages est distribué gratuitement deux fois par mois, dans toutes les boîtes aux lettres du pays messin et alentour, ainsi que dans les commerces de l’agglomération. Une nouvelle publication locale à gros tirage qui a fait parler d’elle dès son lancement : Mediapart, Le Républicain lorrain, et on en passe, se sont émus de l’arrivée de cette feuille de chou tout à la gloire du maire de Metz (57), le républicain François Grosdidier. Et pour cause, c’est lui, ou plutôt les collectivités qu’il dirige qui paient le canard officiellement indépendant. Il est en effet la propriété d’une société baptisée Indola Presse dont l’actionnaire majoritaire est un entrepreneur du coin : Abdel Aziz Mebarki. Interrogé par Mediapart, ce dernier admet que son magazine dépend « de 85% à 100% de financements publics ».

    Celui qui en parle le mieux, c’est le directeur de la Semaine, un journal local, qui s’est fendu d’un éditorial pour dénoncer cette création. Il y a, relève-t-il, « sept pages de publicité, dont six émanant de la ville de Metz, de la métropole, de son satellite Inspire Metz et une de la région. Ajoutons que ce spectaculaire soutien financier, qui interpelle aussi l’opposition municipale de gauche et d’extrême droite, est à mettre en relation avec la défiance de François Grosdidier vis-à-vis de la presse locale d’information et de ses journalistes, dont il met régulièrement en cause sur Facebook l’impartialité et le professionnalisme. » Selon Jeremy Roques, élu d’opposition Europe Ecologie Les Verts (EELV) cité par Lorraine Actu, Le Courrier messin coûterait « 41.760 euros de facture pour le contribuable messin en un mois », soit 500.000 euros par an.

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    Une plainte déposée

    L’association AC Anti-Corruption a, selon nos informations, déposé une plainte le 2 mars 2022 devant le parquet de Metz pour « prise illégale d’intérêt », « détournement de fonds publics » et « favoritisme ». StreetPress a pu consulter le document. L’association se demande si, compte tenu des articles à la gloire de François Grosdidier, de la quantité d’argent investie dans la publicité de ce magazine par la ville de Metz, le maire n’aurait pas dû passer un marché public complètement. En clair, appliquer la réglementation qui s’applique aux journaux municipaux. Ce qui soulèverait un autre problème : le principe de neutralité du service public est loin d’être respecté.

    En effet, difficile d’oublier François Grosdidier et sa majorité. Dans le premier numéro de janvier 2022, ce dernier laisse d’abord la place à son adjoint à la huitième page. Mais quatre pages plus loin, il revient inaugurer une mosquée et il réapparaît un peu plus tard pour s’exprimer sur le voisin alsacien. Au fil des numéros, on peut régulièrement suivre Grosdidier ou l’actualité de sa mairie dans des articles toujours positifs. Quant à l’opposition… Elle n’apparaît jamais !

    L’enquête préliminaire du parquet de Metz devra déterminer si François Grosdidier a eu un intérêt quelconque à subventionner ce magazine, en l’occurrence l’absence de parole donnée à l’opposition. L’enquête devra aussi démontrer dans « quelles circonstances le Courrier messin a été créé, subventionné par la commune et la métropole notamment ; la question de la nature juridique précise de la publication (communication institutionnelle ou bien entreprise privée sur fonds publics) » conclut l’association AC Anti-Corruption.

    Contacté, le parquet de Metz nous a indiqué avoir transmis le dossier au parquet de Nancy (54) qui a, selon nos informations, ouvert une enquête confiée à la division économique et financière de la police judiciaire de Nancy. François Grosdidier, n’a, quant à lui, pas répondu à nos sollicitations.

    Enquête de Léo Le Calvez, illustration de Caroline Varon.

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