La première terrasse ensoleillée sera la bonne. A deux pas du canal Saint-Martin, dans le 10e arrondissement de Paris, c’est l’heure du café-coca. Pierre, décontracté, accepte pour StreetPress de remonter quelques mois en arrière, en juillet dernier. Au moment où il quitte son job d’acheteur, en priant très fort pour repérer un autre boulot dans les trois mois qui viennent. Sauf que, depuis, il n’a rien retrouvé. Après Gaëlle et Émilie, Pierre a accepté de raconter à StreetPress son quotidien de jeune chômeur.
Tout le monde te demande « Et toi, tu fais quoi dans la vie ? » Qu’est-ce que tu peux répondre ?
ASV 27 ans, homme, Paris. J’ai quitté mon boulot d’acheteur en juillet dernier, après 3 ans passés dans la même boîte. J’avais l’impression d’en avoir fait le tour, sans avoir franchement d’opportunités pour évoluer dans mon entreprise. Alors je me suis dit : « allez, saute dans le vide ! » Et j’ai démissionné. Bon honnêtement, si c’était à refaire, je ne pense pas que je le referai de la même manière !
Les premiers mois, j’ai pas trop cherché. Je me levais à midi, je me faisais plaisir. D’abord parce que j’avais envie de profiter de l’été, de mes potes. Mais surtout parce qu’en août, j’ai voulu jouer un peu au basket et… comment dire… je pense qu’on peut parler d’un échec : rupture des ligaments croisés ! J’ai été alité pendant deux mois, obligé de retourner chez mes parents à Toulouse, sans rien pouvoir faire. Sympa.
Ton activité la plus récurrente ? Tu sais, mes journées se ressemblent beaucoup : lever vers 9h30/10h, aller courir deux fois par semaine, et en début d’après-midi, pendant deux ou trois heures, chercher du travail, envoyer CV et lettres de motivation et se préparer pour les entretiens. C’est important de tenir un rythme, ça permet de ne pas trop se laisser aller. De se doucher, par exemple !
Mon rythme s’accélère surtout quand je passe des entretiens. Le plus dur quand t’es au chômage, je crois, c’est cet ascenseur émotionnel : être pris pour un entretien, puis un deuxième, puis un troisième, te retrouver dans le top 3 et finalement échouer à la toute fin. Y’a pas longtemps, ça m’est arrivé pour un poste en Californie. J’avais déjà commencé à m’imaginer vivre là-bas. Quand tu redescends de ton petit nuage, c’est dur.
[La carte des Street Chômeurs]
A quoi t’as renoncé ? À prendre des vacances ! Je culpabiliserais trop. Et puis ce serait trop dur de se remettre à la recherche de boulot… Mais je ne me prive pas particulièrement : je sors une ou deux fois par semaine, comme avant… Faut préciser que je n’ai pas d’appart’ à payer, ça aide… En réalité, ce qui me pèse, c’est pas tant de me priver ou non de soirée, c’est plutôt quand, dans ces mêmes soirées, tout le monde te demande « Et toi, tu fais quoi dans la vie ? » Qu’est-ce que tu peux répondre ? Tu vas pas dire : « Je réfléchis sur le sens de mon existence… » Merci l’image de toi que tu renvoies !
Ton petit plaisir grâce au chômage Aller voir une expo quand y’a personne, au milieu de la journée ? Franchement, j’en vois peu, des petits plaisirs… T’es quand même souvent tout seul, chez toi, en pleine journée. Ah si ! Tu peux faire tes courses quand y’a personne dans les magasins. Bon, ça ne rend pas le chômage plus épanouissant pour autant…
Le job le plus débile proposé par Pôle Emploi ? Absolument aucun, la première fois que j’ai eu un entretien avec ma conseillère, c’était il y a deux semaines – je te rappelle que je suis au chômage depuis juillet… Et puis, comme j’ai démissionné, je ne reçois aucune alloc’ (je vis grâce à la prime de non-concurrence que m’envoie mon ancienne entreprise – j’y ai droit pendant deux ans) donc ils ne s’intéressent pas à moi, au Pôle Emploi.
Ce que le chômage a changé en toi ? Honnêtement, rien de fondamental. Ah si : au début, j’avais envie d’un boulot différent, pourquoi pas de partir à l’étranger, de découvrir un nouveau domaine… Mais, au fur et à mesure des mois, je reviens finalement vers un boulot d’acheteur. Je ne veux pas d’un métier où je me sens mal, mais en même temps, il faut bien être réaliste. Ceci dit, même si ma mère aimerait bien, je ne me fixe pas de limites dans le temps, je ne me dis pas « en juillet, tu as un travail ».
Son conseil ? Ouh là ! Si j’avais des conseils magiques, je ne serais pas moi-même au chômage !

Pierre | CV express
Pierre, 27 ans, Paris, permis BEtudes: Prépa et école de commerce (Edhec) à Lille (diplômé en 2008)
Expérience pro : Acheteur pendant 3 ans chez Alma Consulting
Poste recherché : Dans l’associatif, recherche de partenariats
Loisirs : sorties, expo
bqhidden. Tu peux faire tes courses quand y’a personne dans les magasins. Bon, ça ne rend pas le chômage plus épanouissant pour autant
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