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    23/02/2010

    Une expulsion illégale selon la Cimade

    Najlae, 19 ans : étudiante, battue, et expulsée après 15 heures de garde à vue

    Par Marie Molinario

    Élève du lycée professionnel d'Olivet près d'Orléans, Najlae a été expulsée samedi matin vers le Maroc après moins de 24h de garde à vue. Pour la Cimade, cette expulsion est illégale puisqu'une procédure était en cours.

    15h30 : garde à vue, 7h35 : décollage.

    Najlae a fuit le Maroc il y a 5 ans alors que son père voulait la marier. Elle retrouve son frère en France, mais celui-ci la maltraite. Mardi dernier, les violences augmentent et elle se réfugie chez une amie d’Internat. Vendredi elle aurait décidé de porter plainte et se rend avec sa meilleure amie à la gendarmerie de Château-Renard. « Elle n’a pas voulu déposer plainte, affirme le commandant de Montargis. Elle est venue pour signaler les faits et pour qu’on l’assiste pour récupérer ces effets. Aucune plainte n’a été déposée. » Elle a un gros hématome à l’œil, le nez enflé, des hématomes importants sur le dos, l’épaule, la cuisse, la main, indique la Cimade d’Orléan. Constatant qu’elle était en situation irrégulière, les gendarmes la place en garde à vue à 15h30. Elle décollait à 7h35 samedi matin pour Casablanca.

    « Typique du préfet du Loiret »

    « La loi n’a pas été respectée, pour moi c’est illégal », s’insurge Marie-Noëlle Vitry de la Cimade d’Orléans. Najlae avait reçu en novembre, après l’expiration de son visa, une décision de refus de séjour et d’obligation de quitter le territoire. « Pour pouvoir attaquer la décision du préfet et être défendue au tribunal par un avocat, elle a déposé une demande d’aide juridictionnelle qui permet de payer l’avocat. La décision du préfet est contestable dans le délai d’un mois, mais le dépôt de la demande d’aide juridictionnelle interrompt ce délai. Quand le bureau d’aide juridictionnelle donne sa réponse l’avocat peut déposer un recours. Ensuite le tribunal convoquera une audience. Le bureau d’aide n’avait toujours pas donné sa réponse, et elle ne peut pas être expulsée tant que le tribunal n’a pas statué », explique Marie-Noëlle Vitry. Et l’avocat a téléphoné aux gendarmes vendredi pour leur dire qu’il y avait une demande en cours. Ils n’en ont pas tenu compte, ou le préfet n’en a pas tenu compte. Cette expulsion expresse est « assez typique de ce que fait le préfet du Loiret, Bernard Fragneau, comment-t-elle. L’administration s’est dépêchée de prendre un billet d’avion dès qu’ils ont eu connaissance de la situation. » Le Loiret s’était déjà distingué en 2006 en expulsant une Malienne alors que celle-ci avait déposé un recours.

    “L’administration s’est dépêchée de prendre un billet d’avion dès qu’ils ont eu connaissance de la situation”

    “La priorité de la police et de la gendarmerie c’est de permettre aux personnes qui sont victimes de violence de se défendre et se protéger, ce n’est pas ce qui a été fait”

    Les personnes victimes de violence ne sont pas défendues.

    Najlae est restée, le week-end dernier, détenue au commissariat de Casablanca en attente de passer devant un juge. Elle en est sortie Lundi. « Cette situation est intolérable, continue Marie-Noëlle Vitry. D’une part parce que cette jeune fille était en train de suivre une formation, c’était quelqu’un d’intégré qui cherchait à construire sa vie ici, et surtout elle venait pour que la justice donne suite à sa plainte. Elle est arrivée à la gendarmerie avec les séquelles des violences qu’elle a subit, qui sont visibles, et la seule chose que les gendarmes ont fait c’est de l’emmener chez son frère pour qu’elle récupère ses affaires. La priorité de la police et de la gendarmerie c’est de permettre aux personnes qui sont victimes de violence de se défendre et se protéger, ce n’est pas ce qui a été fait. » La Cimade envisage de saisir la Cour européenne des droits de l’Homme. Une manifestation de soutien est prévue le 6 mars à Château-Renard. Deux jours avant la journée internationale du Droit des femmes.

    A voir aussi sur StreePress : Un homme qui épouse une femme sans-papier peut en faire ce qu’il veut…elle n’ira jamais porter plainte

    Source : Marie Molinario / StreetPress

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