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    08/08/2011

    Après les aides des Nations Unies, les ONG ont besoin du public

    Philippe Chaize de l'ONG Solidarités: « Les promesses de dons de l'Onu pour la Somalie réunissent seulement 51% des besoins »

    Par Jacques Torrance

    Sur StreetPress le directeur général de l'ONG Solidarités International Philippe Chaize rappelle que l'aide de l'Onu pour la Somalie "n'est pas suffisante." L'opinion publique et les médias doivent prendre le relais "pour mobiliser les états". 

    C’est quoi officiellement une famine pour l’Onu ?

    L’agence onusienne explique que la famine est déclarée lorsque les taux de malnutrition aigüe des enfants dépassent 30%, que plus de deux personnes sur 10.000 meurent par jour et que la population n’est pas en mesure d’avoir accès à la nourriture. Mais ces critères ne sont pas établis unilatéralement par les Nations Unies. Différents partenaires, dont des ONG, ont travaillé sur cette classification des problèmes d’insécurité alimentaire. Il y a plusieurs grades, dont le dernier est l’état de famine.

    Quels sont les différents grades de cette échelle ?

    Il y a 5 niveaux. Au premier niveau, 80% des ménages ont accès à un niveau correct d’alimentation. Ensuite un niveau un peu plus grave avec 20% des ménages qui sont en situation d’insécurité. Le troisième niveau fait état d’insécurités sévères, notamment de problèmes de ressources. Et juste avant la famine, c’est l’urgence humanitaire où 20% de la population a de sérieux problèmes d’alimentation.

    Qui constate ces paramètres sur le terrain ?

    Des ONG, des réseaux, différents organismes … Le réseau « Famine Early Warning System » par exemple qui essaie d’avoir des mesures à l’échelle mondiale sur le terrain.


    Philippe Chaize est le directeur général délégué de Solidarités International, ONG humanitaire fondée dans les années 1980. Il auparavant travaillé pendant 8 ans à Handicap International où il a entre autre occupé le poste de directeur régional Moyen-Orient.

    On a du mal à mobiliser sur la corne de l’Afrique.

    En Somalie, Solidarités International peut accéder aux zones malgré la guerre civile ?

    Sur la crise en Somalie, on a dépêché 2 experts en sécurité alimentaire à Nairobi (Kenya) pour appuyer nos équipes et définir les critères d’évaluation. Eux, ils ne peuvent pas se rendre sur place mais les équipes déjà présentes vont faire ces évaluations.

    Concrètement que font ces personnes ?

    Lors de nos évaluations dans les communautés, on procède généralement selon 3 procédés conjoints : tout d’abord on rencontre les leaders locaux afin d’obtenir leurs informations sur la situation ainsi que, bien souvent, les autorisations d’accès. Ensuite, on réalise des « focus group » où l’on collecte de l’information avec la présence de plusieurs personnes (parfois regroupées par genre où âge, en fonction des pratiques locales). Enfin, on complète ce panel avec des entretiens individuels, dans les familles, si possible de manière aléatoire.

    Est-ce que parfois vous repartez sans rien faire car les « conditions » ne sont pas remplies pour intervenir ?

    Ça pourrait être l’écueil des systèmes de classification mais ça ne se passe pas vraiment comme ça. Par exemple on travaille depuis 2006 avec la Somalie, sur l’amélioration des conditions alimentaires. En essayant de relancer l’élevage, l’agriculture, amener de l’eau etc. Et cela même si, à ce moment, nous n’étions pas dans une crise qualifiée de famine. Mais effectivement, il y a des moments pas très évidents. Ce qui est vraiment difficile aujourd’hui, c’est qu’on a du mal à mobiliser les moyens pour répondre à la crise « sécurité alimentaire – famine » sur la corne de l’Afrique.


    *Pour donner c’est ici

    Est-ce que la mobilisation de l’Onu est suffisante ?

    L’Onu a établi un appel consolidé et ses promesses de dons réunissent seulement 51% des besoins. On est encore loin du compte. Ce qui prouve que la mobilisation des Nations-Unies n’est pas suffisante. Les médias ont un rôle éminemment important pour mobiliser l’opinion publique, qui se traduit par une aide à travers les dons. Et ça aide aussi à mobiliser les états occidentaux.

    Pour ce genre d’actions, vous travaillez avec d’autres organisations ou c’est chacun pour sa pomme ?

    C’est vrai que les discussions « urgence contre développement »  sont toujours présentes. Mais nous par exemple, on répond aux urgences, comme la Somalie aujourd’hui, où on va aider les familles à acheter la nourriture, distribuer de l’eau etc. Puis on construit aussi des puits, on essaie d’aider les familles à reconstituer un cheptel ou à nourrir leur bétail. On a donc des programmes qui s’étirent dans la durée, ensuite on laisse la main à des acteurs plus de développement.

    Quelles sont les prochaines étapes en Somalie pour Solidarités International ?

    Clairement accroître nos capacités d’action dans les régions du Sud de la Somalie (Bardera, Afmadow et Adaado) pour apporter nourriture et eau aux populations dans la détresse et également du fourrage pour leur bétail. Pour cela, nous avons besoin de plus de moyens. Nous avons besoin de la mobilisation des États … et du public.

    bqhidden. La famine est déclarée lorsque les taux de malnutrition aigüe des enfants dépassent 30%, et que plus de 2 personnes sur 10.000 meurent

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