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    30/11/2015

    250 policiers, 27 camionnettes, 3 caisses et 1 bus

    Perquisition : quand Dark Vador et ses troupes réveillent un squat

    Par Tomas Statius

    Vendredi au petit matin, la police débarque en force pour perquisitionner un squat de militants plus connus pour leurs soupes que pour des actions violentes. Imitation de Dark Vador et photos souvenir, les policiers se sont bien marrés, pas les écolos.

    Le Pré Saint-Gervais (93) – Il est 8h00 du mat’ vendredi 27 novembre quand les flics débarquent à l’Annexe sans faire toc toc toc. Dans le squat, certains habitants prennent le petit déj, d’autres sont encore assoupis. Depuis plusieurs mois, 34 personnes vivent dans la grande maison, réunies pour préparer le contre-sommet de la COP 21.

    « A 8h00 un squatteur, ça dort » ironise Camille*. Ce matin-là, le jeune homme est parti tôt au taf. Quand il apprend qu’une perquisition est en cours à l’Annexe, il rebrousse vite chemin.

    SWAT

    (img) Occupy the street keufcote.jpg

    150 CRS, 27 camionnettes, 1 bus, 2 bagnoles de déminage, 1 voiture de police scientifique : C’est le dispositif plutôt vénère que Camille découvre quand il se pointe devant l’Annexe, quelques minutes après l’avoir quittée. La rue du squat est bloquée, l’ambiance est plutôt tendue :

    « Une voisine sortait sa voiture au moment de la perquis’. Les flics l’ont prise pour une des nôtres et l’ont bloquée avec nous. »

    Quand il pénètre dans la vaste maison, ses potes sont à terre. Certains sont menottés, d’autres maintenus au sol par des CRS plutôt tendus alors que la perquisition est en cours :

    « Ils ont débarqué par le toit et par la porte d’entrée. Ils ont fait toutes les pièces et ont demandé aux gens de se mettre à terre. Bouclier de kevlar en avant. »

    Ménage de printemps

    Pendant 2 heures, les CRS fouillent la maison, retournent les armoires et arrachent même les coussins des chaises. « Ils n’ont pas arrangé le bordel de la maison » s’amuse le jeune homme :

    « Mais bon j’ai entendu parler de perquisitions qui avaient été plus violentes »

    L’ambiance finit quand même par se détendre. Et Camille assiste à quelques scènes étonnantes :

    « Un policier a enfilé un masque de soudure et s’est mis à imiter Dark Vador. D’autres ont posé bras dessus bras dessous pour une photo de famille. C’était un peu surréaliste »

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/keufmontage.jpg

    150 CRS, 27 camionnettes, un bus, 2 bagnoles de déminage, 1 voiture de police scientifique... / Crédits : Eglantine Dijkstra

    « On a des éléments tangibles »

    Alors que les troupes sont en train de retourner la baraque, Camille aborde un policier resté en retrait. Ce dernier se demande un peu ce qu’il fait là, raconte le jeune homme :

    « Il nous a dit que la police avait découvert l’existence de l’Annexe il y a 48h à peine. »

    Selon cet officier de police, la perquis’ a été décidée à la hâte, en raison de l’Etat d’urgence. Elle a été motivée par l’engagement politique de certains de ses habitants. « Si on perquisitionne, c’est qu’on a des éléments tangibles. Y’a pas de hasard. On est obligé d’aller voir, on ne sait pas sur qui on peut tomber en face » assure à StreetPress une source policière.

    Pas compris

    Après la perquisition, c’est toujours l’incompréhension qui domine à l’Annexe. Aucun habitant n’a été interpellé et rien n’a été saisi hormis quelques tracts. « Le squat est toujours ouvert. S’il y avait une enquête en cours, la police aurait pu venir nous voir », raconte Camille.

    Sur l’ampleur du dispositif, le jeune homme rappelle que lui et ses potes n’ont rien de black blocs :

    « Dans le milieu squat, on est connu pour être des gentils, ceux qui proposent de la bouffe pas cher et qui organisent des évènements à prix libre. Ils le savent à la préfecture. Je ne comprends pas. »

    Preuve de sa bonne foi, l’entente avec le proprio qui leur a confié le bâtiment pour 4 mois et les bonnes relations qu’ils entretiennent avec le voisinage. Mais après les évènements de vendredi, Camille et ses potes ont vu certains regards changer :

    « Tu vois les voisins à la fenêtre maintenant. Ils regardent dès qu’il y a un peu de bruit. »

    (*) Prénom modifié à la demande de l’intéressé.

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