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    11/09/2018

    Que se sont-ils dit ?

    Les bons conseils de Serge Ayoub à l'homme qui a tué Clément Méric

    Par Mathieu Molard

    Avant et après le décès de Clément Méric, Esteban Morillo a rendu compte de la situation à son chef, Serge Ayoub. Ce mardi 11 septembre, le parrain des skins français témoignait aux assises.

    Assises de Paris, ce mardi 11 septembre 2018 – Cheveux ras et chemise bleue marine, Serge Ayoub s’avance à la barre. Son témoignage est particulièrement attendu. Sur le banc des accusés, Esteban Morillo, jugé pour avoir porté le coup fatal à Clément Méric, fixe la pointe de ses chaussures. Quelques minutes avant la rixe, les deux hommes ont discuté au téléphone. Ayoub assure lui avoir conseillé d’éviter la confrontation.

    Son implication ne s’arrête pas là. Après le drame, il prend à nouveau des nouvelles de ses troupes, par téléphone. Dans la foulée, Morillo et sa bande se dirigent vers le Local, le bar d’Ayoub, et le retrouvent pour un débriefing. Un rendez-vous que la petite troupe a d’abord tenté de cacher aux policiers.

    Jeu de main, jeu de vilain

    Mais cette fois-ci, face aux jurés, le taulier semble retrouver la mémoire. Il raconte la soirée qui a suivie la mort de Clément Méric. Au Local, il a d’abord écouté les récits de chacun. Ayoub juge alors « la bousculade » anodine. Il leur conseille d’attendre un peu avant de rentrer, histoire que l’affaire se tasse. Aujourd’hui encore, Serge Ayoub ne cesse de minimiser la gravité des faits :

    « À 20 – 22 ans, ils [les skins et les antifascistes] s’amusent, se poussent entre eux. C’est des gamineries. »

    À minuit, le 5 juin 2013, c’est encore Ayoub qui informe Esteban Morillo du décès de Clément Méric par téléphone. Le premier coup de fil d’une longue série : 34 au total durant la nuit du 5 au 6. Là encore, il jure avoir été de bon conseil, invitant les skins à se rendre :

    « Je leur ai dit que, puisqu’ils n’avaient fait que se défendre, avec un bon avocat c’était jouable. »

    Si les appels sont si nombreux, c’est qu’il cherchait activement un avocat, assure-t-il. Sans succès. « C’était pour le tenir informé », conclut-il sans sourciller.

    Allo la police

    Au cours de la nuit, Serge Ayoub est également en contact avec la police. Plus tôt ce matin, la partie civile interrogeait Esteban Morillo sur ces étranges coups de fils :

    « - Quand Ayoub vous avise-t-il de la mort de Clément Méric ?
    – Entre 23h et minuit.
    – Juste après il a un échange avec un service de la préfecture et le lendemain ce même service fournit vos identités. Ca ne vous interroge pas ?
    – Si.
    – Vous avez confiance en lui ?
    – Non
    – À l’époque ?
    – Oui. »

    Serge Ayoub a-t-il donné ses camarades, comme le laisse entendre cet avocat ? Batskin balaie la supposition. Il assure avoir appelé la personne en charge des partis politiques à la préfecture pour tenter d’éviter une interpellation médiatisée de ses jeunes poulains. Un coup de téléphone passé le lendemain des faits, assure sur twitter l’intéressé qui déclare n’avoir donné aucun nom (1). Voilà pour le côté factuel de l’audition. Le reste n’est que fanfaronnades.

    Relisez notre grande enquête consacrée au parrain des skins français : Serge Ayoub, l’homme qui depuis 30 ans murmure à l’oreille des meurtriers .

    1. Édit le 11/09 à 19h15.

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