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    10/09/2018

    Enquête sur le parrain des skins français

    Serge Ayoub, l'homme qui depuis 30 ans murmure à l'oreille des meurtriers

    Par Mathieu Molard , Mathias Destal

    Clément Méric, décédé des coups portés par un protégé de Serge Ayoub. James Dindoyal, empoisonné par deux lieutenants d'Ayoub. Hervé Rybarczyk, mort noyé, un proche d'Ayoub à nouveau soupçonné. Enquête sur le parrain de l'extrême droite meurtrière.

    Assises de Paris – Jeudi 6 septembre 2018, Serge Ayoub est attendu à la barre du tribunal. Mais le quinquagénaire a fait faux bond à la Cour. Convoqué comme témoin au procès des trois skinheads poursuivis pour la mort du militant antifasciste Clément Méric, le parrain du milieu skinhead français s’est fait porter pâle, certificat médical à l’appui. II a tout de même eu la grâce de prévenir par écrit qu’il ne « souhaite pas [se] dérober à [ses] devoirs de témoin » avant la clôture des débats, le 14 septembre.

    Acteur-clé du dossier, son témoignage est plus qu’attendu. Esteban Morillo – poursuivi pour avoir porté le coup fatal à l’étudiant de 18 ans – et ses amis, Samuel Dufour et Alexandre Eyraud, comptaient parmi ses jeunes recrues au sein de Troisième Voie, mouvement néo-fasciste aujourd’hui interdit. Samuel Dufour, 20 ans à l’époque, caressait même l’espoir d’intégrer les Jeunesses nationalistes révolutionnaires (JNR). Composées d’une trentaine d’hommes gonflés aux stéroïdes, les JNR, également dissoutes, constituaient la garde prétorienne d’Ayoub. Leur devise est une maxime empruntée à Benito Mussolini :

    « Croire, combattre, obéir. »

    Les explications de Serge Ayoub sont d’autant plus nécessaires que son rôle avant et après la confrontation mortelle demeure trouble. Ce n’est pas la première fois que celui qu’on surnomme Batskin, en hommage à son amour des battes de baseball, se retrouve cité dans une affaire criminelle. L’ombre du chef de bande plane sur au moins trois morts violentes, sans qu’il n’ait jamais été condamné. Contacté par StreetPress, Serge Ayoub a décliné notre demande d’interview.

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    Serge Ayoub à la tribune du rassemblement organisé par Synthèse nationale, en 2016. / Crédits : Yann Castanier

    Allo, c’est Ayoub !

    Mercredi 5 juin 2013. Clément Méric et quatre de ses amis se rendent dans le 9ème arrondissement de Paris pour une vente privée de la marque Fred Perry. Dans l’appartement transformé en showroom, les quatre militants de l’Action antifasciste Paris-Banlieue (AFA) croisent trois skins, également adeptes de la marque au laurier. Invectives et provocations fusent de part et d’autre. Les antifas quittent les lieux et vont se poser au pied de l’église Saint-Louis d’Antin, à une vingtaine de mètres de là. Les « fafs » restent dans l’immeuble. Ils passent des coups de fil aux copains. Dont Esteban Morillo, qui débarque peu de temps après un appel de sa petite amie Katia V. présente sur place.

    Serge Ayoub, lui, n’est pas de la partie. Mais il suit les événements à distance, comme l’a révélé le dossier judiciaire consulté par StreetPress. Le chef est mis au courant de la situation par Katia V. une première fois à 18h38. Deux minutes plus tard, il appelle son poulain Morillo, alors âgé de 21 ans. Après avoir raccroché, Morillo et ses amis Dufour et Eyraud décident d’aller à la confrontation. À 18h49, alors que Clément Méric gît au sol, celui qui vient d’asséner le coup fatal rappelle Serge Ayoub.

    Moins d’une heure après, tout ce petit monde se retrouve au Local, le bar du patron de Troisième Voie et des JNR, rue Javel, dans le XVe arrondissement. Dans la salle aux murs gris tapissés de roses blanches, le taulier débriefe ses troupes pendant plus d’une heure, avant que les uns et les autres ne quittent le huis clos au compte-gouttes. À l’exception notable d’Esteban Morillo. Lequel reçoit un SMS de Samuel Dufour à 23h15 :

    « Demande à Serge si je doit nettoyer le bomber [sa veste] il est plein de sang mais c le mien. »

    Serge Ayoub et Esteban Morillo se séparent aux alentours de minuit. Mais le parrain restera en lien avec les inculpés toute la nuit. Un ami chez qui Samuel Dufour s’est réfugié confie à la police :

    « Je lui ai dit d’aller voir les bleus direct. Pendant ce temps-là, il a eu des coups de fil vers 3h du matin d’Esteban et de Serge Ayoub. »

    Il ajoute :

    « Samuel ne voulait pas que je l’emmène à la gendarmerie car Serge avait décidé autre chose. »

    Trous de mémoire…

    Le lendemain, alors qu’Ayoub est toujours en contact avec les inculpés, il prend la parole dans les médias pour démentir tout lien entre Troisième Voie, lui-même, et les jeunes nervis d’extrême droite. Convoqué par la police le 7 juin, soit deux jours après le drame, Ayoub assure qu’il n’est mis au courant de l’affaire qu’à 23h le jour des faits. À la question de savoir s’il connaît Morillo, Dufour et Eyraud, il répond :

    « À ma connaissance, ils ne sont pas membres de Troisième Voie. »

    Entendu de nouveau quatre mois plus tard, il poursuit dans ses dénégations, avouant néanmoins les nombreux échanges téléphoniques postérieurs à la mort de Clément Méric. « Je leur ai conseillé de se rendre à la police, de trouver un avocat », jure-t-il. Ce n’est que le 6 mars 2015, dans le bureau du juge, que le quinquagénaire affine son témoignage. Les coups de téléphone juste avant la confrontation ? « Je leur ai dit “Appelez la police”, “Foncez, partez”. » Dans ce cas, pourquoi sont-ils allés au contact ? « À 20 ans on écoute qui on veut. » Il ajoute :

    « Je ne suis pas leur père. »

    Bébé skin

    Serge Ayoub connaît bien les arcanes du monde judiciaire et les histoires de bagarres qui terminent mal. Ce fils de magistrate, qui a fait ses études secondaires au très bourgeois collège Saint-Sulpice dans le VIe arrondissement, est repéré assez tôt par les services de renseignement. Dans une fiche de juin 1993 que StreetPress s’est procurée, les RG déroulent son pédigree de skinhead violent. « Agression et propos racistes tenus à l’encontre d’élèves du Lycée Voltaire » (1983) ; interpellation pour « port d’arme blanche » et « vol avec violence » (avril 1984) ; « coups et blessures volontaires » (juillet 1984). Son casier fait aujourd’hui mention de six condamnations légères.

    Un temps président d’un groupe de hooligans du Parc des Princes, le Pittbull Kop, Ayoub va fédérer un groupe de cogneurs autour de lui et s’investir à plein temps dans la politique. Son ambition : devenir LE chef du mouvement skinhead. Au mitan des années 1980, il monte le Klan, un groupe qui forme le noyau dur des JNR première mouture. Parmi ses principaux lieutenants : les Havrais Joël Giraud et Régis Kerhuel. Tous deux ont commis un crime raciste qui a défrayé la chronique il y a de cela presque 30 ans, époque où ils fréquentaient assidûment Serge Ayoub.

    « Sale boucaque »

    Le 18 juin 1990, une poignée de skinheads parisiens est de passage au Havre. Les crânes rasés sont accueillis par des camarades du cru. Après un début de soirée alcoolisé dans un bunker allemand, l’équipe descend quelques barons de bière à la Bodega, un bar du coin. En fin de soirée, Joël Giraud invite la bande à une petite sortie en ville. « On bouge pour aller casser du boucaque [contraction de “bougnoule et macaque”] », rapporte un témoin cité par Libération. La suite est racontée en détail dans le livre Planète skin, les groupuscules néo-nazis face à leurs crimes, de Benoît Marin-Curtoud.

    Alors qu’ils déambulent sur la digue, la dizaine de skinheads croise la route de James Dindoyal, un Mauricien de 23 ans. L’un des membres du commando confessera aux policiers de la Rochelle la suite des événements :

    « On a vu passer un bien bronzé qui se promenait (…) On l’a insulté, traité de sale boucaque : “Retourne dans ton pays”. Il n’a rien dit. On lui a barré la route, on l’a entouré et bousculé. »

    Terrorisé, Dindoyal subit :

    « Les chefs ont décidé qu’on allait le forcer à boire. Il a vidé une bière sans rien dire. »

    Selon les différents protagonistes, Joël Giraud, Régis Kerhuel et un possible complice, dont l’identité n’est pas révélée, lui font avaler une seconde canette contenant une mixture concoctée par leurs soins. Un autre témoin décrit la suite aux enquêteurs :

    « Environ dix minutes plus tard, toute la bande (…) a emmené le gars vers la digue. Ils ont formé une mêlée et ont balancé le mec à la mer. »

    De retour à la Bodega, Giraud lance hilare :

    « On s’est bien marrés, il a bien picolé celui-là, avant de faire trempette. »

    De son côté, James Dindoyal est parvenu à sortir de l’eau. Il s’est traîné jusqu’à la porte d’un médecin. Le jeune Mauricien « se tordait de douleur, de la bave sanguinolante aux lèvres », rapporte le toubib. La canette contenait en fait « un produit caustique » : détergeant, soude ou javel. Dindoyal décède 16 jours plus tard, l’intestin rongé.

    Ayoub lâche son « meilleur ami »

    Tout au long de la procédure, Joël Giraud et Regis Kerhuel nient leur implication et assurent avoir changé de vie. Kerhuel, alias « Madskin », est devenu maître-chien et a créé la micro-société Blitz… du nom du chien de Serge Ayoub. Le soir du meurtre de Dindoyal, il assure qu’il était justement à Paris avec son « meilleur ami », Serge Ayoub. En juillet 1999, alors que la justice s’apprête à clôturer l’instruction, un témoin de dernière minute livre sa version de l’histoire : selon lui, Batskin était de la virée havraise. « Les policiers n’ont que peu investigué dans cette direction », commente un témoin privilégié du dossier, et les éléments restent minces. Serge Ayoub échappe à la mise en examen.

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    Lorsque le procès s’ouvre à la Cour d’Assises de Rouen, le 17 octobre 2000, Ayoub, cité comme témoin, ne se présente pas. Ce n’est qu’au troisième jour des débats qu’il fait son apparition. Face aux jurés, il lâche son ami Kerhuel : la nuit du meurtre, il était dans un avion en direction du Japon. À défaut de présenter un billet ou son passeport, Ayoub fournit des attestations signées de deux anciennes amies. « Salaud », murmure le camarade lâché en vol. Régis Kerhuel et Joël Giraud sont finalement condamnés à 20 ans de prison ferme.

    Ayoub, parrain d’une jeunesse ultra violente

    Serge Ayoub ne renie pas son statut de chef d’une bande biberonnée à la violence physique. Mais c’est de l’histoire ancienne, répète-t-il à qui veut l’entendre. Il n’empêche, sa réputation lui permet d’attirer des jeunes fascinés par les combats de rue et autres ratonnades, souvent en quête d’identité. « Quand je suis arrivé à Paris, j’ai regardé sur Internet où trouver un lieu pour rencontrer des natios », raconte à StreetPress un ancien skinhead entré à Troisième Voie au début des années 2010. « C’est là que j’ai vu des vidéos de Serge Ayoub, après j’ai commencé à traîner au Local. » Sous couvert d’anonymat, par crainte « d’Ayoub et ses sbires », le repenti ajoute :

    « Ayoub inspire le respect, il a du pouvoir, parce qu’il a du monde derrière lui, des gens qui lui sont dévoués. Il y a un vrai culte de la personnalité autour de lui. »

    Un temps proche du meurtrier présumé de Clément Méric, le jeune homme raconte sa relation avec les gros bras qui entourent Ayoub :

    « Ils veulent te pousser à faire de la muscu, à prendre un traitement aux stéroïdes pour que tu gonfles. Au début, on s’assure que tu n’es pas un journaliste ou un flic. Après, tu commences à faire la sécu à la porte du Local… ».

    L’objectif étant de faire de lui « un tueur de rouges », comme le lui a expliqué un aîné.

    Opération punitive

    Une autre recrue de Serge Ayoub va faire parler d’elle. Il s’agit de Jérémy Mourain, un grand brun au profil athlétique qu’Ayoub, en quête de sang neuf, a nommé responsable de la section picarde de Troisième Voie en 2011. Mourain, qui collectionne photos et icônes à l’effigie du Troisième Reich, intègre les JNR dans la foulée. Avec soirée d’intronisation au Local, en présence du patron.

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    Mourain, Mutte et les copains ! /

    En 2012, une querelle de clocher va mal tourner. Des skins affiliés au groupuscule Nationalistes Autonomes (NA) attribuent à Serge Ayoub une ascendance juive. Insulte suprême pour ces obsessionnels du bras tendu. Alors, un jour où le chef fait venir Mourain au domicile de sa mère pour y poser du placo, Ayoub lui demande, selon un autre skinhead picard, de « boucler ça ».

    Le 8 décembre 2012, Jérémy Mourain passe à l’action. « Croire, combattre, obéir »… Ce soir-là, le Picard organise une soirée dans un garage d’Estrées-Mons, dans la Somme. Il a invité des membres des NA pour une petite sauterie censée rabibocher tout le monde. Il s’agit en réalité d’un guet-apens. Sans prévenir, les skins de Troisième Voie déclenchent les hostilités. Mourain sort un couteau, blesse Clément G. au niveau des jambes avant d’essayer de le poignarder dans l’abdomen. Ce dernier porte plainte. Une dizaine de jours après les faits, Mourain et d’autres militants picards sont convoqués au Local. Serge Ayoub passe des consignes, selon un témoin présent dans la pièce : ne rien dire aux gendarmes, ne pas évoquer leur appartenance à Troisième Voie, parler d’un acte isolé. À Mourain, Batskin aurait dit : « Au moins, tu étais du bon côté du couteau ». Ou encore : « Qui s’y frotte s’y pique ». Cette affaire lui a valu une mise en examen pour complicité de « tentative d’homicide volontaire ». Ayoub conteste avoir ordonné ces représailles. Il a finalement bénéficié d’un non-lieu, en 2017.

    Malgré cette histoire, Mourain garde sa place dans le premier cercle d’Ayoub. Après les révélations sur le profil des meurtriers de Clément Méric, il fait même partie des membres des JNR appelés à Paris pour protéger le Local contre une hypothétique vengeance des « rouges ». Quelques semaines plus tard, en juillet 2013, Troisième Voie et les JNR sont dissoutes. Jérémy Mourain, lui, n’entend pas rester inactif. Il monte un groupe indépendant qui s’inspire autant d’un club de motards que des JNR : le White Wolf Klan, dont StreetPress détaillait ici les méfaits.

    « Chasse » dans les rues de Lille

    Ce qu’il ignore, c’est qu’il fait l’objet d’une surveillance étroite des gendarmes depuis le piège tendu aux NA. Braquages, vols à l’étalage, cambriolages, violences, trafics de stupéfiants… une dizaines de délits sont répertoriés. Début 2015, Mourain et ses acolytes du WWK sont finalement interpellés puis placés en détention provisoire en mars. Le leader du groupe est condamné à neuf ans de prison ferme deux ans plus tard. Incarcéré à la maison d’arrêt d’Amiens, Mourain s’est procuré un téléphone portable. Les gendarmes qui l’ont placé sur écoute ne perdent rien de ses conversations. StreetPress a pu consulter ces écoutes. Dans l’une d’elles, il évoque « Serge », l’homme qui, dit-il, « ne tombera jamais » :

    « À chaque fois que des mecs vont suivre Serge, ils vont être dans la merde, parce que Serge, une fois arrivé d’vant les flics, il dit qu’c’est pas lui, qu’il maîtrise ses gars. Alors qu’Serge, faut pas qu’il oublie une chose, c’est qu’les coups de couteau, tout ça, faut pas oublier qui c’est qui m’avait d’mandé d’les mettre. »

    Lors d’autres échanges interceptés, le détenu mentionne sa période lilloise, quand il « f’sait des bonnes soirées ». Notamment avec son copain Yohan Mutte. Ce grand gaillard au tatouage « Rijsel firm » dans le cou (Rijsel signifie Lille en flamand) a lui aussi été un membre actif de Troisième Voie et des JNR. Homme de confiance de Serge Ayoub dans le Nord, c’est d’ailleurs à lui que Batskin a confié le parrainage de Mourain, en vue de son entrée aux JNR.

    Quand ils ne sont pas au Local, à Paris, les deux skinheads picolent et « chassent » dans les rues du Vieux-Lille. Comme ce jour de novembre 2012 où ils ont surgi dans le Restau Soleil, un bar fréquenté par les antifascistes locaux, aux cris de « Atchik atchik atchik… heil ! heil ! heil ! » Plusieurs fois condamné pour des faits de violence, il est aujourd’hui suspecté dans une affaire de meurtre sur les rives de la Deûle.

    Le noyé de la Deûle

    Le 23 novembre 2011, un corps est repêché dans la rivière. Il s’agit d’Hervé Rybarczyk, le guitariste du groupe de rock Ashtones, disparu quelques jours plus tôt. La thèse du suicide a longtemps été privilégiée. Avant que l’enquête ne prenne une tout autre tournure. Grâce aux bavardages… de Jérémy Mourain. Lors d’un des nombreux coups de fil passés en prison, l’ancien lieutenant de Serge Ayoub a en effet lâché à un proche :

    « Pourvu que le juge n’aille pas chercher trop loin dans ma période lilloise. »

    Cette fameuse période correspond au moment où Mourain et Mutte faisaient les 400 coups ensemble. Interrogé sur les aventures lilloises du duo, un des anciens camarades de Mourain au WWK mentionne un « meurtre ». Il aurait été commis à l’époque ou Mourain « voulait entrer au JNR », dit-il. L’ancien skin détaille :

    « Mutte devait former Mourain. Il devait taper deux personnes et après les avoir tapées, il les a jetées dans le canal, il paraît qu’il y en a une des deux qui est décédée. »

    À ce stade, les fonctionnaires n’ont pas impliqué Jérémy Mourain. Son parrain Yohan Mutte, en revanche, a bel et bien été mis en cause, avec deux autres personnes, pour des faits de « violences volontaires ayant entraîné la mort [d’Hervé Rybarczyk] sans intention de la donner, en réunion, avec préméditation ou guet-apens et avec arme ». D’après le site Médiacité, Mutte aurait avoué aux enquêteurs avoir croisé et provoqué le guitariste de 42 ans dans la nuit du 11 au 12 novembre 2012, lui arrachant la bombe lacrymogène qu’il aurait sortie pour se défendre. À aucun moment, il ne l’a poussé dans la rivière, jure-t-il. Placé en détention provisoire au printemps 2017, le skinhead a été libéré après un an derrière les barreaux. Il a interdiction de séjourner dans les Hauts-de-France.

    Passion bécanes

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    Apéro entre potes. / Crédits : CC.

    À deux heures de Lille, un hangar aux tôles fatiguées fait office de nouveau QG. C’est ici, à Berzy-le-Sec (Aisne), coin perdu entre une départementale et une petite gare où les trains ne s’arrêtent plus, que Serge Ayoub et certains de ses lieutenants ont trouvé refuge depuis la dissolution de Troisième Voie et des JNR. Fini les bombers noirs et les défilés militaires, le grand manitou s’investit dans la moto. Désormais, les skinheads roulent en grosses cylindrées, un patch « Gremium Mc France » cousu dans le dos. Originaire d’Allemagne, ce club – dont le blason représente un poing fermé, un lever de soleil et une croix de fer, est étiqueté « 1 % ». Une référence aux 1% de motards qui ne respecteraient pas la loi, comme les Hell’s Angels, les Bandidos ou les Outlaws. Ayoub préside le chapitre français de ce club de motards baptisé Gremium.

    Pour lui, l’intérêt de cette reconversion est double : il reste un chef de bande, continue de recruter des soldats mais sans attirer l’attention des services de police, plus prompts à surveiller un mouvement politique radical qu’un club de motards. Avec son coin bar, son salon VIP aux murs capitonnés, le hangar permet d’organiser toute sorte de raouts. De la soirée « patriote » du 14 juillet, aux fêtes du nouvel an en passant par des concerts de RAC [rock against communism]. « La semaine, c’est désert, on ne voit personne, confie un voisin. En revanche, certains week-ends, ça pétarade dans tous les sens ! » Si Yohan Mutte n’a pas encore le permis moto, cela ne l’a pas empêché de participer aux bringues des Gremiums à Berzy-le-Sec. Quelques semaines avant son interpellation dans le cadre de l’enquête sur la mort d’Hervé Rybarczyk, le Lillois se déhanchait tranquillement sur le dancefloor, en arborant fièrement les couleurs du club, une pinte de bière à la main.

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    Sons of anarchy. / Crédits : CC.

    Photo principale, Serge Ayoub par Yann Castanier.

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