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    03/05/2022

    On a lu Présent, Rivarol, Jeune Nation…

    La presse d’extrême droite se demande comment gagner les législatives

    Par Pierre Plottu , Maxime Macé

    Faut-il faire l’alliance des droites qu'appelle de ses vœux Eric Zemmour ? Ou chacun doit-il partir de son côté ? Dans la presse d’extrême droite, chacun a son avis, sauf Benedetti qui veut faire la révolution.

    Deux semaines après le second tour de l’élection présidentielle, la presse d’extrême droite refait, avec un certain bonheur, le match. Mais surtout, les plumes qui y écrivent se tournent vers la bataille des législatives. « C’est Le Pen père et fille qui ont sorti ce que les médias appellent “l’extrême droite” de l’insignifiance absolue, jusqu’à attirer les suffrages de douze millions d’électeurs. Jamais, dans l’histoire de ce courant politique, un tel chiffre n’avait été atteint », note Francis Bergeron dans Présent, dernier quotidien d’extrême droite français. En France du moins.

    Et si le canard avait appelé durant l’entre-deux-tour à ce « qu’aucune voix patriote ne manque à Marine Le Pen », il a encore un peu de ressentiment contre la présidente du RN, largement fustigée pour son débat face à Macron raté. Mais aussi pour sa fin de non-recevoir à la main tendue (l’aumône ?) par Eric Zemmour qui voulait créer une grande coalition des partis d’extrême droite avec Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan.

    « Mais si la constitution d’une “grande coalition des droites et de tous les patriotes” évoquée par Zemmour n’est pas à l’ordre du jour, que le RN s’en explique et annonce très vite la formule qui serait susceptible de faire rebondir le camp national », boude déjà Bergeron. C’est raté.

    Saillie raciste et outrage aux morts

    L’heure était certes à la défaite mais ça n’a pas empêché Camille Gallic, plume de Présent et ancienne rédactrice en chef du très antisémite Rivarol de se fendre de cette brève : « Et si, au lieu d’interdire le voile, que Marine Le Pen elle-même renonce à exclure de l’espace public, on obligeait au contraire nos immigrés à circuler en gandouras, djellabas, suaires blancs pour les Algériennes, boubous pour les Africaines et longues jupes pour les Tsiganes ? ». Et une étoile jaune pour les Juifs pendant qu’on y est ?

    Cette petite saillie raciste n’a d’autre but que d’en remettre une couche sur le prétendu grand remplacement. « Non seulement ce déploiement de couleurs nous changerait du triste uniforme cagoule-sweater-baskets adopté par les Rebeus et les Blacks, mais elle permettrait surtout de mesurer l’ampleur de la présence allogène sur notre territoire », continue d’écrire Camille Gallic.

    Toujours dans l’outrance, le quotidien a également consacré une brève au décès de deux graffeurs français percuté par une rame de métro à New York le 20 avril dernier alors qu’ils étaient en train de bomber. Commentaire bien outrageux de Présent :

    « Le passage de cette rame met fin à dix ou vingt ans de dégradations et d’enlaidissements urbains. »

    Agiter le spectre du grand remplacement

    Chez Boulevard Voltaire, on est encore tout triste de la défaite de Marine Le Pen. Pour se donner un peu d’espoir, le site est allé chercher Philippe de Villiers, afin qu’il apporte quelques pensées encourageantes pour les années à venir. Des paroles que les journalistes de BV pourront ensuite rapporter sur CNews où ils ont leur rond de serviette.

    Las, le vicomte n’était pas très en verve et à juste promis que Macron allait « dissoudre la France dans l’Afrique et dans l’Europe » parce que c’est « son projet ». Pour l’enthousiasme, on repassera mais les fondamentaux sont là : agiter le spectre du grand remplacement et dire tout le mal que l’on pense de l’Union européenne.

    « Moïse » Zemmour

    Jeune Nation, le site internet du mouvement Les Nationalistes d’Yvan Benedetti, a donné la parole à son chef pour qu’il puisse donner son avis sur la présidentielle, entre deux hommages à Adolf Hitler et à Benito Mussolini. Le chef des derniers pétainistes s’est abstenu. Il n’avait de toute façon aucun favori pour la présidentielle puisqu’il a autant de mépris pour Marine Le Pen que pour Eric Zemmour. La première parce qu’elle ferait partie « du système » et ne serait qu’un pion assurant la réélection d’Emmanuel Macron. Le second, qu’il s’obstine à appeler « Moïse », parce qu’il est juif. Ce n’est pas gagné pour l’union des extrêmes droites.

    Mais heureusement, Yvan Benedetti à un programme : « Il faut arrêter de raisonner en républicain de la cinquième, celle de Rothschild, et sortir mentalement du “système”. La seule solution, c’est de bâtir une force alternative et révolutionnaire puissante qui pourra s’opposer à l’horrible politique du représentant démoniaque de l’oligarchie ». Comment ? Ce n’est pas précisé mais il demande à ses ouailles de « lui faire un peu confiance ».

    Ouin-ouin

    Antisémite toujours, avec le regard de Rivarol sur le deuxième tour du scrutin. Dans un édito assez (trop ?) long, Jérôme Bourbon, rédacteur en chef, explique en long et en large pourquoi Marine Le Pen a perdu et pourquoi il est illusoire d’attendre une union des extrêmes droites aux législatives. Il dresse aussi un inventaire à la Prévert des sévices que Macron s’apprêterait à faire subir à la France. Pêle-mêle :

    « Macron va poursuivre son œuvre de destruction, légalisera la GPA, l’euthanasie, le suicide assisté, s’en prendra aux écoles hors contrat, après avoir interdit de facto d’ici 2024 l’école à la maison, favorisera l’immigration de masse et les transitions de genre à l’école, limitera encore davantage la liberté de l’esprit, persécutera fortement les contestataires dont nous sommes. »

    Et mettre peut-être même fin à l’agrément délivré par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) dont jouit Rivarol, insiste Bourbon. Presque le meilleur porte-parole de LREM.

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