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    06/05/2011

    « La meilleure c'est quand Johnny a débarqué dans un Hummer tout en or avec les vêtements assortis à la voiture »

    Taillage de costard et pudding de mangue: Mon déjeuner avec Julien Dray et Jean-Paul Huchon

    Par Mathieu Molard

    Mercredi 4 mai la région Île-de-France organisait un déjeuner pour tirer le bilan des 10 ans de sa politique ciné. Au menu pudding du mangue et magret de canard. Mais surtout Jean-Paul Huchon qui imite Johnny et Dr. Dray qui clash à tout va.

    13h10: Arrivée en même temps que Julien Dray au Conseil Général d’Île-de-France, 35 boulevard des Invalides. Jean-Paul Huchon lui n’est pas encore là. Je jette un coup d’œil discret à la table. Deux fourchettes deux couteaux, trois cuillères… Tout ça s’annonce compliqué. Je tripote les fleurs pour voir si c’est des vrais. Ouf, c’est bien le cas !

    13h13: Julien Dray propose qu’on s’asseye. « Ce n’est pas très poli ! », lance sa dir-com’. Visiblement c’est elle le boss. Juju ne touche pas à la chaise.

    13h17: John-Paul Huchon arrive. Tout le monde s’assied, en tout 21 couverts. Les assistantes sont privées de déjeuner, elles ont droit d’être assises le long du mur. A la région t’es VIP ou tu ne l’es pas. Ma voisine de droite est « venu représenter Isabelle » « - Isabelle ? » « - Isabelle Giordano ! » Bien sûr, que suis-je bête !

    13h18: Jean-Paul Huchon entame un (long) discours pour expliquer pourquoi il paye son gueuleton: « L’Île-de-France, c’est la première collectivité en matière de financement du cinéma »

    13h20: La valse des serveurs commence. En entrée, un petit verre de vin et quelques beignets de crevettes sur leur lit d’algue. Personne n’ose toucher à son assiette. Tout le monde guette le top départ.

    13h25: Certains entament une razzia sur le pain. Jean-Paul Huchon tourne au vin et parle toujours : « 400 œuvres soutenues en 10 ans… Relocalisation des tournages… Budget de la culture largement maintenu… » Julien Dray lui, boit de l’eau et saute l’entrée. Ça sent le régime ! Pas moyen de voir la marque de sa montre.

    13h27: Jean-Paul Huchon y va de ses anecdotes de vieux routier: « Je me suis fait traiter de tous les noms dans les dîners ! Je me suis engueulé avec Jean Pierre Mocky: ‘Vous êtes un salaud et je le dis à tout le monde !’ J’ai eu une altercation avec Adjani qui voulait qu’on finance Adolf, je lui ai dit que ce n’était pas possible parce que le film a été tourné en Hongrie. Elle ne comprenait pas, je crois qu’elle n’a toujours pas compris ! La meilleure c’est quand Johnny a débarqué dans un Hummer tout en or avec les vêtements assortis à la voiture. (il prend la voix de Johnny) ‘Ah que faut que vous m’aidez’ – ‘Pourquoi ?’ – ‘Ah que mon film il se passe sur le périf’ – ‘Et ça parle de quoi ?’ – ‘On est poursuivi et à la fin tout le monde il est mort’. – ‘Ça doit vraiment être génial !‘ » Pendant ce temps Julien Dray picore les miettes qui traînent sur la table.

    13h30: Jean-Paul Huchon invite enfin les convives à manger. Ma voisine de droite me balance discrètement! « C’est immangeable sans les doigts ! »

    13h33: Jean-Paul Huchon passe la parole à Dr. Dray. Entre deux tours de moulin à poivre, il percute que ses collaborateurs sont en rang d’oignon le long du mur: « Apportez leur quand même une assiette ! » « - On se nourrit de vos paroles », répond du tac au tac son assistante. Il y en a une qui veut une augmentation…

    Les beignets de crevette sur le lit d’algues

    On voudrait un James Bond tourné au château de Versailles

    13h42: Arrivée du plat principal : magret de canard, sauce à la citronnelle (enfin je crois), pommes de terres et tomates cerises. Je tante d’en attraper une, projection de jus sur la nappe…

    13h45: Julien Dray en mode Laurent Blanc « Pour obtenir un financement de la région il faut atteindre un quota d’heures de travail réalisées dans la région. On intègre les heures de grèves ». Tout le monde se marre. J’ai pas compris la vanne…

    13h48: Jean-Paul Huchon : « Le seul film sur lequel on a eu un vrai retour sur investissement c’est Dans les murs. » Julien Dray: « Entre les murs ».

    13h50: Jean-Paul Huchon s’étouffe avec une tomate, sa voisine lui tape dans le dos. « On a aussi financé ‘Le piéton du Champ de Mars.‘ » « - Le promeneur », précise sa voisine. « On ne finance pas que des gros films, certains ne trouvent pas leur public. On sait de quoi on parle, une fois on s’était endormis avec Julien. »

    13h55: Ma voisine de droite lance une critique sur l’action de la région en faveur des cinés-clubs dans les établissements scolaires. « Faut arrêter de dire n’importe quoi ! Vous n’avez rien compris ! » Le ton montre. Heureusement Jean-Paul joue au gentil flic: « Il est pugnace, faut pas vous laisser abattre ».

    14h: Ronde des fromages. Ce sera du comté pour Juju, du chèvre pour Jean-Paul.

    Magret de canard, pommes de terres et tomates cerises à la sauce à la citronnelle

    14h15: Julien Dray « Synergie… Coopération… Évolution… Redistribution ». Digestion?

    14h25: Le budget de la culture qui était « largement maintenu » au moment de l’entrée est maintenant « en hausse » à l’heure du dessert: un pudding de mangue. Jean-Paul Huchon précise que c’est un choix politique, « Quand on augmente les postes dans la culture on crée moins de postes de tri informatisé. » Du tri informatisé ?

    14h27: Jean-Paul Huchon « On voudrait un James Bond tourné au château de Versailles ».

    14h30: Café ou thé ? Ma voisine de droite se barre, elle donne rendez-vous à ma voisine de gauche à Cannes. Merde ils y vont tous… Jo, tu me payes le billet et l’hôtel ? Je peux faire un article qui tue : une semaine en mode pique-assiette.

    14h40: Le repas est officiellement clos. Julien Dray se fait taper sur les doigts par son assistante « T’es malade de lui parler comme ça! C’est une journaliste de la presse professionnelle! » « - Oui mais ce qu’elle racontait était vraiment idiot ». Avec Dr. Dray: Qui s’y frotte s’y pique !

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