« Pour les européennes si j’étais allé voter, j’aurais foutu un bulletin Front National », lâche à StreetPress Edel Hardiess, qui se présente comme le rappeur « banlieusard », « musulman » et « patriote » du 9-4. Il a 25 ans, vient de Choisy-le-Roi, et après un premier disque en 2010, il revient dans les bacs à la rentrée avec un deuxième album et des featurings de prestige comme Sinik ou Salif.
FN vibes
Seulement deux semaines après des élections européennes qui ont placé le Front National en tête, le site du Courrier de l’Atlas publie une vidéo d’Edel Hardiess présenté comme « le rappeur FN ». Un intitulé pas vraiment du goût de l’artiste :
« Je n’irais jamais faire un concert à un meeting de Marine Le Pen. Après je pense qu’aujourd’hui [le FN] est le parti le plus proche de mes opinions. »
ALBUM Sortie prévue à la rentrée
Le site l’interview pour présenter son nouvel album : « Le titre c’est Le Chant Des Partisans. C’était l’hymne de la résistance française et donc il est très orienté sur le patriotisme. » A la question « soutenez-vous le FN ? », le rappeur répond ne pas le voir « comme un parti idéal » mais sa « détestation des traîtres du PS va faire du Front National des alliés de circonstance ». Et de citer en vrac : « le mariage pour tous, le problème des Femens, Edouard Snowden, la guerre en Syrie, etc… » Des sujets sur lesquels il se déclare « plus proche de ce que va dire le Front National que ce que va faire et dire la gauche. »
Une prise de position qui risque de faire du bruit dans le rap game. Car si Edel Hardiess n’est pas vraiment connu du grand public, il s’est fait un petit nom dans le milieu. “Sa chaîne Youtube”:https://www.youtube.com/channel/UCRfXlnVroRFa4GYe_AAMdQA totalise près de 740.000 vues. Son premier album « But en Or » était « sorti nationalement, à la Fnac, Virgin et Leclerc ». Et sur son prochain album – dans les bacs à la rentrée – il annonce des featurings avec Sinik ou Salif.
Soral beats
Du prochain album on peut déjà écouter le titre « Louis 94 ». Un son dans lequel il se présente comme « le seul rappeur français du rap français » avec en guise de refrain « dissident, dissident, dissident, dissident ». Un titre également revendiqué… par la galaxie Soral. Souvenez vous du « congrès de la dissidence » qu’elle organisait à Bruxelles, il y a seulement un mois.
« Je ne suis pas le troupeau, le troupeau j’le baise. Le berger est un américain clown sur MTV Base », chante Edel Hardiess dans son titre « Hardiesse ». Et le clip de montrer une femme musulmane qui porte un voile orné du drapeau tricolore pour illustrer son « anti-communautarisme ».
Dans « Résistant », c’est avec l’étendard français sur les épaules qu’Hardiess rappe « I love Gaza, Fuck, Fuck New York » tout en brulant une casquette des Yankees. Un message – ou une quenelle – au rap français d’aujourd’hui, qui« perd ses valeurs (…) avec des meufs à poils, des armes et une idéologie ultra capitaliste », explique-t-il à StreetPress. La scène actuelle ne semble vraiment pas à son goût :
« Si on regarde ce qui se fait aujourd’hui dans le rap français, c’est l’homosexualisation des banlieues. Vas-y qu’on se fait des teintures jaunes et des crêtes. Ca n’a rien à voir avec la virilité de l’ouvrier africain. »
« Homosexualisation des banlieues » vs. « virilité de l’ouvrier africain » : En somme « gauche du travail et droite des valeurs », le slogan d’Egalité et Réconciliation à la sauce hiphop. Et les références aux théories « dissidentes » d’Alain Soral fleurissant au détour de nombreux couplets du rappeur, on lui a posé la question :
Edel, tu te sens proche d’Alain Soral ?
Je me sens proche de l’essentiel de ce qu’il dit. Mais je n’ai pas de maître à penser Ca fait très longtemps que je mets des drapeaux français dans mes clips : Je n’ai pas attendu la mode de Soral pour être patriote ! Après c’est vrai qu’un mec comme lui te permet forcément d’avoir une autre grille de lecture. Et oui, je suis d’accord avec pas mal de ses idées.
Tu as voté aux européennes ?
Je n’ai pas pu aller voter mais si j’y étais allé, j’aurais foutu un bulletin Front National. Ma priorité principale c’est pas de savoir si on va pouvoir manger Halal dans les cantines où pas. Ce qui compte c’est des trucs beaucoup plus profonds. Et sur l’essentiel, les valeurs, on partage un socle commun avec le FN.
C’est quoi ce socle commun ?
Le seul parti qui a dit qu’il reviendrait sur le mariage gay s’il arrivait au pouvoir, c’est le FN. Sur l’affaire Dieudonné, c’est le parti qui s’est le mieux comporté en disant que c’était pas ça le problème des Français. Tout ça dans les quartiers, tout le monde pense la même chose. Les Femens qui se mettent à poils avec marqué sur leurs seins « fuck dieu, fuck allah », tout le monde est d’accord, faut les écraser.
Le FN, c’est pas un parti raciste ?
Des racistes il y en a partout ! Chez les militants FN bien-sûr, mais au PS et à l’UMP. Et même chez nous : t’as des noirs qui n’aiment pas les arabes et inversement. Des antillais qui n’aiment pas les africains, etc… Et on va être beaucoup plus proche d’un facho croyant comme nous, contre le mariage gay comme nous, et qui ne se drogue pas… qu’avec un anti-fa qui se tape des lignes de coke et qui balance « ni dieu, ni maître ». Nous on a un Dieu ! Le vote musulman, le PS ils ne l’auront plus jamais ! C’est terminé mon pote !
Madame Diallo
Aujourd’hui Edel Hardiess l’assure : « En banlieue tout le monde est sur ces positions-là » : « Le FN, il faut essayer. (…) Avec Sarko, tout le monde se disait : c’est la droite. J’ai voté Hollande pour les dégager. Maintenant on a compris. La question ce n’est pas Sarko, c’est tous ces bâtards de politiques. » Et le rappeur qui veut « que la France revienne aux Français » de citer les Balkany, Cahuzac et… DSK :
« Le mec il a violé Nafissatou Diallo, tu veux qu’on compte combien il y a de Diallo dans les quartiers ? »
Précision : Les Sharps nous signalent qu’ils ont accepté de pariciper à ce clip car au moment du tournage, le rappeur «ne défendait pas les mêmes idées. Aujourd’hui nous sommes restés les mêmes et Edel Hardiess a changé de route… Nous ne supportons pas son changement de position!»
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