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    24/02/2023

    « J'avais le droit à un : “Sale négresse ou grosse salope !” »

    Je suis noire et mon voisin est raciste

    Par Fanta Kébé , Pauline Gauer

    Saly, mère de deux enfants, est victime du harcèlement raciste de ses voisins. Des insultes régulières qui visent aussi ses enfants. Elle a porté plainte, mais la police ne s’intéresse pas vraiment à l’histoire.

    Rueil-Malmaison (92) – Assise sur le canapé d’angle de son salon, Saly (1), 36 ans, sourit. Avant de dérouler son histoire d’un ton calme, elle propose petits gâteaux et thé chaud. Depuis un an et demi, elle et ses deux filles subissent le racisme et le harcèlement de leurs voisins. Elle a déposé plainte et fournit les noms de deux témoins directs, mais la police a refusé de les entendre. Conséquence : Saly et sa famille continuent d’être victimes d’insultes racistes et de harcèlement sans aucun recours en justice.

    Retour en arrière. Début 2021, Saly, son mari et ses deux filles emménagent dans un immeuble HLM à Rueil-Malmaison. Elle fait la connaissance de Virginia (1), Christopher (1) et leurs cinq enfants. Au départ, les relations sont cordiales. Elle intègre même Virginia à leur groupe WhatsApp des voisins qu’elle a créé quelques jours plus tôt. Mais trois mois plus tard, tout se dégrade.

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    La façade de l'immeuble de Saly. / Crédits : Pauline Gauer

    Des propos racistes

    En juin 2021, Saly croise Virginia et ses enfants en allant récupérer les siens à l’école. Selon la chargée de paie, le fils de sa voisine aurait insulté sa fille de « sale noire avec son gros cul ». Virginia, une petite femme maigre aux cheveux bruns, n’aurait pas réagi aux propos racistes de son fils. À partir de là, l’affaire va s’envenimer. Saly raconte :

    « À chaque fois que je les voyais, j’avais le droit à un : “Sale négresse ou grosse salope” ! Même avec mes enfants. »

    La maman n’est pas la seule à être harcelée. Sa fille aînée de 9 ans est également prise à partie à l’école par le fils de ses voisins. Les deux enfants fréquentent le même établissement. « Il l’appelait : “La grosse baleine”, à chaque fois qu’on était à la cantine ! Tout le monde en était témoin mais le garçon n’était jamais puni », raconte Samia (1), animatrice au périscolaire à l’époque. Samia dénonce les faits auprès de sa hiérarchie. Mais l’établissement ne fait rien pour faire cesser le harcèlement scolaire.

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    La cour extérieur de l'immeuble. / Crédits : Pauline Gauer

    La police ne fait rien

    La mère de famille finit par déposer plainte. Elle transmet les déclarations écrites de voisins, témoins directs de certaines scènes. Très procédurière, elle envoie un mail circonstancié aux policiers après chaque agression. Mais la police refuse d’interroger les témoins. Aucun d’entre eux ne sera contacté.

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    Saly sur son balcon. / Crédits : Pauline Gauer

    Selon la victime, si ces derniers n’ont pas été étendus, c’est parce que la police va penser que les deux témoins sont forcément de la famille de la victime, parce que noirs. Or, ce n’est pas le cas. La même fonctionnaire va lui reprocher, sans preuve, son agressivité envers la voisine. Saly va s’en émouvoir auprès du commissaire de police qui s’excuse de la démarche cavalière. Dans la foulée, la voiture de Saly est rayée. Aujourd’hui, elle se dit épuisée. Elle a même changé ses habitudes pour éviter de croiser ses voisins :

    « J’accompagne et je récupère mes enfants à l’école en voiture. Je les laisse le plus tard possible à l’école pour ne pas les croiser. Le matin, je prends ma voiture à 8h10 parce que je sais que mon voisin récupère la sienne à 8h. C’est devenu un automatisme. »

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    La voiture de Saly a été rayée. / Crédits : Pauline Gauer

    (1) Les prénoms ont été modifiés
    Texte de Fanta Kébé. Photos de Pauline Gauer.

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