En ce moment

    24/01/2025

    Le double jeu du maire, Jean-Luc Moudenc

    Le coup de pouce de la mairie de Toulouse au collectif d'extrême droite Némésis

    Par Mathieu Molard , Gael Cérez

    Côté pile, le maire de Toulouse Jean-Luc Moudenc prend un arrêté pour interdire une conférence du groupuscule d’extrême droite Némésis. Côté face, son directeur de cabinet dégote une solution de repli aux militantes fémo-nationalistes.

    « On l’a fait ! », fanfaronne sur le réseau social X, le collectif identitaire Némésis, ce jeudi 23 janvier dans la soirée. « Notre conférence a bien pu se tenir à Toulouse (31) », malgré les protestations des forces politiques de gauche. Et surtout malgré l’arrêté d’interdiction de réunion pris, plus tôt dans la journée, par le maire de la ville, Jean-Luc Moudenc. Si le groupuscule fémo-nationaliste a pu, aussi rapidement, trouver une solution de repli, c’est selon les informations de Mediacités et StreetPress, grâce à l’intervention discrète mais efficace… du cabinet du maire de droite.

    Arrêté d’interdiction

    La venue d’Alice Cordier, cheffe de file du collectif d’extrême droite, pour une conférence hébergée dans une salle municipale a suscité l’ire de la gauche et des organisations antifascistes. Interrogée par La Dépêche du Midi sur l’accueil de militants d’extrême droite dans ses salles des fêtes, la mairie plaide la maladresse et promet de « renforcer les contrôles » pour éviter que la mésaventure se reproduise. Insuffisant aux yeux de plusieurs organisations de gauche qui appellent à un contre-rassemblement. Un mur extérieur de la salle est tagué d’un slogan antifasciste et l’une des portes est maculée d’excréments.

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/1_nemesis_toulouse.png

    Le 23 janvier, à Toulouse, le groupuscule fémo-nationaliste Némésis devait organiser une conférence dans une salle municipale. L’une des portes a été maculée d’excréments. / Crédits : via X

    « Les dégradations de la Maison Toulouse Services de la Roseraie sont une attaque révoltante et insupportable contre les services publics de proximité des Toulousains. Compte tenu de ce trouble, organisé et revendiqué par des militants d’extrême-gauche, je prends un arrêté d’interdiction de la conférence organisée par Initiative Toulousaine qui devait avoir lieu, aujourd’hui, dans la salle polyvalente », réagit le maire de Toulouse sur le réseau X.

    https://backend.streetpress.com/sites/default/files/2_nemesis_toulouse.png

    Le 23 janvier, à Toulouse, le groupuscule fémo-nationaliste Némésis devait organiser une conférence dans une salle municipale. La gauche locale et des organisations antifascistes se sont mobilisées et un mur extérieur du lieu a été tagué. / Crédits : Via X

    Double jeu

    La gauche exulte : elle a obtenu l’interdiction de la conférence organisée par le collectif d’extrême droite qui fulmine. « L’annulation de ma conférence est une atteinte aux droits des femmes. (…) C’est une atteinte grave à la démocratie et un véritable abus de pouvoir », dénonce sur X, Alice Cordier. La militante identitaire ne se démonte pas et va faire la démonstration de son savoir-faire en matière buzz médiatique pour faire pression sur la mairie, avec succès. Selon nos informations, des proches de Jean-Luc Moudenc, dont son directeur de cabinet Paul Bouscatel, se sont mis en quatre pour dénicher une solution de dernière minute. Il obtient du club privé L’Étoile, situé dans le quartier Borderouge, d’habitude fermé au public le jeudi soir, d’ouvrir ses portes aux militantes d’extrême droite. Alice Cordier et ses sympathisants ont pu s’y réunir en toute quiétude jusqu’en fin de soirée. C’est de cette salle privée qu’elle est intervenue par exemple sur CNews.

    En séjour à l’étranger, le propriétaire de l’établissement s’est montré légèrement gêné aux entournures. « Ce n’est pas Némésis qui a réservé la salle. Une dame a appelé en se présentant sous un faux nom », tente le propriétaire. « Quand le directeur du lieu a entendu des propos limites dans les discours, il leur a demandé de partir vers 22 heures », assure-t-il. Des participants n’ont pas le même souvenir de la soirée. « Nous n’avons pas été virés. Tout le monde est parti dans le calme vers 22h30, comme c’était convenu avec le gérant », conteste l’un deux.

    La gauche dénonce la complaisance du maire

    En ordre dispersé dans la perspective des municipales, l’opposition de gauche dénonce d’une voix unie le double jeu « cynique » du maire. « Je suis choqué, mais pas surpris de constater la complaisance de Jean-Luc Moudenc avec des groupes d’extrême droite », soupire l’élu écologiste d’opposition Antoine Maurice :

    « Cela montre son cynisme et son hypocrisie. C’est un pur opportuniste qui cherche avant tout à garder le pouvoir. »

    Sur le même ton, le socialiste François Briançon estime que Jean-Luc Moudenc « fait tout pour soigner son extrême-droite, dont il a des représentants dans sa majorité avec MM. de Scoraille et Arsac ». « Ce n’est pas la première fois qu’il est ambigu sur cette question. Il n’a même pas appelé pour les candidats du front républicain lors des législatives anticipées », rappelle le premier fédéral de Haute-Garonne. Pour une fois d’accord avec son camarade fauriste, sa collègue insoumise Agathe Roby voit dans l’événement « une énième preuve des accointances de Jean-Luc Moudenc avec les groupuscules d’extrême droite ». « Après avoir cédé aux sirènes de l’extrême droite en annulant la lecture publique des drag-queens devant un public d’enfants, en 2023, il aide le collectif Némésis. Quelle sera la prochaine étape ? », s’interroge-t-elle.

    Contactés, les principaux protagonistes ont refusé de réagir sur le sujet. « Vous êtes un média islamo-gauchiste, je refuse de vous répondre M. Molard », a répondu Alice Cordier à StreetPress. Quant à la mairie de Toulouse, elle « ne commente pas cette rumeur grotesque », a-t-elle fait savoir à Mediacités par l’intermédiaire de son service de presse.

    NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
    ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER