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    23/09/2025

    La bataille des municipales

    Municipales : ces dix villes qui pourraient basculer à l’extrême droite

    Par Antoine Etcheto

    Streetpress publie une cartographie des communes que l’extrême pourrait gagner aux prochaines élections municipales. Zoom sur dix villes qui ont de gros risques de basculer en 2026.

    Les élections municipales ont toujours été décevantes pour le Rassemblement national. Le scrutin de 2020 n’a pas fait exception. L’extrême droite ne s’est adjugée que treize des 1.104 communes de plus de 9.000 habitants. Et mis à part Perpignan, aucune métropole. Sauf que cinq ans plus tard, le parti lepéniste a 123 députés à l’Assemblée et peut s’appuyer sur les ex-Les Républicains (LR) d’Éric Ciotti. Une poignée de caciques locaux qui vont renforcer l’ancrage territorial du Rassemblement national.

    Le mardi 23 septembre, StreetPress publie une cartographie interactive des villes qui pourraient basculer à l’extrême droite, basée sur les travaux du chercheur Alessio Motta. Premier enseignement : le Rassemblement national (RN) a, dans les grandes villes, atteint une limite. Ses chances de victoire dans des communes de plus de 100.000 habitants sont très faibles.

    Les résultats pourraient être plus favorables pour l’extrême droite dans des communes qui comptent entre 30.000 et 50.000 habitants. Et plus particulièrement celles dont le maire sortant est peu implanté ou confronté à des ennuis avec la justice. En témoigne la situation dans ces dix villes qui, selon nos travaux, risquent fortement de tomber aux mains de l’extrême droite.


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    Les médias se focalisent sur Nice et Toulon. La seconde a déjà été aux mains de l’extrême droite de 1995 à 2001. L’ancien maire, Hubert Falco a été condamné à une peine de cinq ans d’inéligibilité pour recel de détournement de fonds publics. Celui qui dirige la ville depuis vingt ans ne pourra donc pas se représenter. En face, le Rassemblement national devrait investir Laure Lavalette, députée très en vue et très implantée dans le Var. Mais rien n’est joué, Hubert Falco vient d’officialiser son soutien à son ancien rival, Michel Bonnus La droite joue la carte de l’unité face au péril brun. C’est pourquoi nous ne retenons pas cette commune parmi les dix à plus fort risque de bascule.

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    Éric Ciotti, quant à lui, rêve d’arracher Nice à Christian Estrosi. Le duel entre les deux anciens Républicains s’annonce rude. Mais d’après nos projections, il y a peu de chances que le président de l’Union des droites pour la République (UDR) l’emporte malgré l’appui du Rassemblement national. Parce que Nice est une grande agglomération (350.000 habitants), que Christian Estrosi tient solidement la ville, où il a été élu pour un troisième mandat en 2020 avec près de 60 % des voix et qu’il pourra sans doute compter sur un bon report de voix de gauche au second tour. L’extrême droite ne prendra vraisemblablement pas non plus Marseille, même si une division de la gauche au second tour pourrait offrir une petite chance au Rassemblement national.

    Allauch (Bouches-du-Rhône)

    C’est surtout dans les villes situées aux portes de la cité phocéenne, où le Rassemblement national a réalisé des scores particulièrement élevés lors des dernières législatives, que se concentrent ses chances. C’est le cas d’Allauch. Pendant cinquante ans, il y a eu une mairie socialiste. Elle n’est passée à droite qu’en 2020. L’actuel maire, Lionel de Cala, ne dispose pas d’un ancrage particulièrement fort sur la commune. En face, le réservoir de voix pour le Rassemblement national est important. Christelle Varnier, la candidate RN pour 2026, peut compter sur le soutien de cadres locaux bien implantés, comme le député José Gonzalez, qui a recueilli plus de 60 % des suffrages en 2024 sur la commune ou Franck Allisio, candidat RN à Marseille

    Les Pennes-Mirabeau (Bouches-du-Rhône)

    Autre commune voisine de Marseille, Les Pennes-Mirabeau a été à gauche pendant des décennies. Le maire Michel Amiel est un ancien socialiste converti au macronisme, élu depuis vingt ans. Mais comme partout dans le Sud-Est, le Rassemblement national est en embuscade. Aux législatives, c’est à Pennes-Mirabeau que le parti avait réalisé sa plus grosse percée dans l’arrière-pays marseillais avec plus de la moitié des voix (67,76 %).

    Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône)

    Fos-sur-Mer, ville pourtant tenue par la gauche, a été submergée par la vague bleu marine en 2024. La ville se retrouve dans le top 5 des communes avec le plus grand réservoir de voix pour l’extrême droite selon notre cartographie. Le candidat Rassemblement national, Emmanuel Fouquart a réuni 62,78 % des voix lors des législatives anticipées. Presque le double de celui du candidat du Nouveau Front populaire, le député sortant Pierre Dharréville. Aux dernières municipales, le Rassemblement national n’avait pas présenté de liste dans cette ville. Ce ne sera pas le cas en 2026. Philippe Maurizot, élu divers droite d’opposition, arrivé second au précédent scrutin, a annoncé son ralliement au RN Une alliance qui pourrait faire basculer la commune.

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    Vitrolles (Bouches-du-Rhône)

    Dernière étape de ce tour des Bouches-du-Rhône, Vitrolles. C’est sur cette circonscription que s’est fait élire Franck Allisio, le grand organisateur des municipales au RN. Vitrolles n’est pas la ville du département où l’extrême droite est la plus haute — le RN a réalisé 18 % aux dernières municipales — mais c’est une ville importante pour le parti lepéniste. Avec Toulon ou Marignane, c’est une des premières communes de France à avoir été conquise par le Front national en 1997. Bruno Mégret en a fait son laboratoire ; la ville est devenue un symbole de ce que l’extrême droite peut faire lorsqu’elle arrive aux affaires. Le RN n’a pas encore annoncé qui le représenterait, mais le parti pourrait être tenté d’investir un poids lourd pour reprendre la ville.

    Roquebrune-sur-Argens (Var)

    Roquebrune-sur-Argens est limitrophe avec Fréjus, ville conquise par David Rachline en 2014. Ce qui fait de cette commune et de sa voisine, Puget-sur-Argens, des objectifs intéressants pour l’extrême droite varoise. Aux législatives, la candidate RN, Julie Lechanteux l’avait emporté dès le premier tour dans cette circonscription. D’après « Var matin », c’est d’ailleurs cette députée qui briguera la mairie Avec un terrain si favorable, elle a des chances d’y parvenir.

    Menton (Alpes-Maritimes)

    Pour 2026, les jeux sont ouverts à Menton. La précédente municipalité de droite s’est retrouvée mouillée dans une affaire de détournement présumé des fonds publics liée aux ports de la ville. Le maire Yves Juhel, placé sous contrôle judiciaire, ne se représentera pas. La nature ayant horreur du vide, Louis Sarkozy s’est engouffré dans la brèche pour se présenter à la mairie. En face de lui, deux autres candidats de droite, et surtout Alexandra Masson, députée RN de la circonscription élue dès le premier tour en 2024.

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    Agde (Hérault)

    Dans cette ville des forces occultes sont venues rebattre les cartes de la politique locale. Gilles d’Ettore, maire depuis vingt-trois ans, a dû démissionner suite à sa mise en examen pour détournement de fonds publics et corruption. L’élu serait tombé sous l’emprise d’une médium ventriloque. La presse locale s’interroge, le maire déchu va-t-il essayer de se présenter en 2026 ? Une incertitude qui fait les affaires d’Aurélien Lopez-Liguori. Le député RN, élu dès le premier tour dans la circonscription d’Agde, a lancé sa campagne pour 2026. Mais pour compliquer les choses, l’extrême droite agathoise doit faire face à la candidature dissidente d’une conseillère municipale RN, Fabienne Varesano.

    Montauban (Tarn-et-Garonne)

    Montauban fait figure d’exception dans le Sud-Ouest qui n’est pas — encore — une terre accueillante pour l’extrême droite. Aux dernières municipales, la liste Rassemblement national avait fait à peine 10 % au premier tour. Qu’est-ce qui a changé ? Le fait que l’ensemble de la majorité municipale Les Républicains est passée à l’Union des droites pour la République. Brigitte Barèges, maire de Montauban depuis vingt ans et réélue en 2020 sous l’étiquette Les Républicains a été l’une des premières à rejoindre Éric Ciotti, lorsque celui-ci a coupé le cordon sanitaire avec le Rassemblement national.

    La députée-maire a entre-temps vu son élection annulée en juillet par le Conseil constitutionnel, car elle a utilisé de l’argent public pour financer sa campagne. Même si elle a été déclarée inéligible, cela ne devrait pas faire chanceler l’extrême droite tarnaise. Comme le rapporte « la Dépêche du midi », les noces entre la droite et l’extrême droite sont largement consommées Pierre-Henri Carbonnel, son ancien suppléant, compte bien reprendre son siège à l’Assemblée lors des législatives anticipées en octobre. Et Marie-Claude Berly (UDR), une proche de Brigitte Barèges, qui a pris sa suite à la tête de la ville, pourrait bien être candidate à sa propre succession. La situation à Montauban illustre ce que le ralliement d’ex-LR très implantés peut rapporter au Rassemblement national.

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    Calais (Pas-de-Calais)

    Dans le département où elle est élue, Marine Le Pen rêve de conquérir une grande ville. Et pourquoi pas Calais. En 2020, le Rassemblement national avait échoué à faire tomber la maire Les Républicains sortante, Natacha Bouchart. Depuis, l’extrême droite n’a cessé de confirmer son emprise. Au point que le Rassemblement national a réussi à battre la droite aux législatives de 2024. C’est le député Marc de Fleurian qui va tenter d’empêcher Natacha Bouchart de briguer un quatrième mandat.

    Liévin (Pas-de-Calais)

    À deux pas de Lens — où le RN a aussi ses chances — et non loin d’Hénin-Beaumont, Liévin est un bastion socialiste depuis toujours. Le maire PS sortant, Laurent Duporge a été réélu dès le premier tour en 2020 avec le score soviétique de 73,51 %. Pour le défier, le RN a parachuté Dany Paiva, un trentenaire originaire du Gard. Le combat paraît déséquilibré. Mais là aussi, les scores nationaux de l’extrême droite sont si élevés dans le Nord de la France que l’extrême droite a des chances.

    Il ne s’agit là que d’un focus sur dix communes, où les risques de bascule sont particulièrement élevés. Selon notre cartographie, il y a un risque significatif de voir le Rassemblement national l’emporter dans 52 des 500 plus grandes villes de France.

    Illustration de Une par Mila Siroit.

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