11/09/2025

Le couple était au mariage du militant néonazi Marc de Cacqueray-Valmenier.

Le fiancé fan du IIIe Reich de Louise Morice, l’égérie du média « Frontières »

Par Sébastien Bourdon

Animatrice de la matinale de la web-radio de « Frontières » et nouveau visage féminin de la sphère médiatique de l’extrême droite, Louise Morice s’est récemment fiancée à un militant radical et collectionneur acharné d’objets liés au IIIe Reich.

Tout sourire, Louise H., prend la pose pour un selfie. Plus connue sous le pseudonyme de Louise « Morice », celle qui œuvre en tant que journaliste pour le média d’extrême droite « Frontières » (anciennement « Livre Noir ») met sa main gauche bien en évidence. À son annulaire apparaît la bague de fiançailles qu’elle vient de recevoir. En l’espace de deux ans, la présentatrice de 25 ans s’est imposée comme l’un des piliers de la rédaction dirigée par Erik Tegnér — l’ex-militant Les Républicains qui a œuvré pour « l’Union des droites ».

Habituée aux plateaux et studios de CNews et Europe 1, Louise Morice incarne ainsi cette nouvelle génération de journalistes Bolloré-compatibles, et en est devenue l’un des visages féminins. Chez « Frontières », elle anime depuis une saison une web-radio matinale, prélude au lancement annoncé d’une radio émettant 24 heures sur 24 et sept jours sur sept dès la rentrée. En avril, celle-ci faisait partie du trio de journalistes de « Frontières » exfiltrés de l’Assemblée nationale suite aux tensions survenues lors d’un rassemblement visant à protester contre un de leurs articles, dont le titre est « LFI le parti de l’étranger ».

Le fiancé de Louise Morice, égérie du média d'extrême droite Frontières, est un compagnon de route de l'extrême droite radicale via Génération identitaire et est en plus un collectionneur assidu d’objets liés au IIIe Reich. / Crédits : DR

Sur le même selfie, apparaît à l’arrière-plan son fiancé. Barbe soignée, lunettes de soleil, celui-ci affiche un air plus réservé. Vêtu d’une « janker », une veste traditionnelle autrichienne, l’heureux élu qui a publié la photo sur son profil Facebook est un certain Andreï T. Sa particularité ? Être un collectionneur assidu d’objets liés au IIIe Reich. Sur le réseau social Instagram, il partage sa passion via deux pages dédiées, donnant ainsi un aperçu en images des antiquités bien souvent marquées de croix gammées qu’il accumule.

Sur le réseau social Instagram, le fiancé de Louise Morice partage sa passion via deux pages dédiées, donnant ainsi un aperçu en images des antiquités bien souvent marquées de croix gammées qu’il accumule. / Crédits : DR

Le musée et les vacances nazis

On y découvre en plans serrés son intérieur, véritable musée avec de multiples bustes de mannequins revêtus d’uniformes de SA — les sections d’assaut du parti d’Adolf Hitler — ou de la Luftwaffe. Mais aussi des couteaux gravés de la devise nazie « Blut und Ehre » (« Sang et honneur ») et autres dagues, une casquette et un calot de la SS, et d’innombrables fanions, insignes, médailles en lien avec le IIIe Reich.

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Pour parfaire le voyage temporel que ce lieu offre, une photo encadrée, posée sur un meuble, montre Adolf Hitler signant un autographe à des cadets des Jeunesses hitlériennes. Au mur, la Une du journal de propagande nazi « Signal » dédiée au Waffen-SS belge Léon Degrelle est aussi encadrée.

Andreï T. aime vraiment beaucoup collectionner les uniformes et objets liés à l'Allemagne nazie. / Crédits : DR


Mais vraiment beaucoup. / Crédits : DR

Mais cette passion pour le IIIe Reich suit également Andreï T. en vacances. Comme en août, lorsqu’il prend la route avec sa fiancée en direction de la Roumanie, d’où il tire ses origines familiales. Tandis que Louise Morice profite de la place passagère pour deviser, auprès de ses plus de 30.000 abonnés sur Instagram, sur une prétendue absence « d’insécurité » en ces contrées, lui met côte à côte les photos de leurs étapes avec celles des mêmes lieux sous la bannière nazie.

Une halte à Nuremberg ? Tiens, c’est dans cette rue aujourd’hui touristique qu’a été immortalisé en 1935 un défilé des Chemises brunes SA sous les yeux d’Adolf Hitler, le bras tendu comme il se doit. Une visite du château de Prague ? Comment oublier que c’est dans l’une de ses cours que Heinrich Himmler a été photographié passant en revue des troupes SS en 1940.

Et puis, quel meilleur souvenir rapporté de ce périple en amoureux à travers l’Europe que des autocollants rouges frappés : « Ils ont acheté chez les Juifs ! Nous veillons » ? Les mêmes qui étaient collés dans les années 1930 sur les portes des Allemands, qui ne se pliaient pas au boycott des commerces tenus par des Juifs pour les intimider.

En août 2025, en voyage avec Louise Morice, Andreï T publie côte à côte les photos de leurs étapes avec celles des mêmes lieux sous la bannière nazie. À Nuremberg, il faut immortaliser un défilé des SA devant Adolf Hitler. À Prague, il faut se remémorer Himmler devant les SS. / Crédits : DR


Passionné par le IIIe Reich, Andreï T. a ramené des souvenirs de ses vacances, comme ces autocollants rouges intitulés : « Ils ont acheté chez les Juifs ! Nous veillons. » Les mêmes qui étaient apposés sur les portes des Allemands qui ne boycottaient pas les commerces Juifs pour les intimider. / Crédits : DR

Croix celtique autour du cou

Collectionnite aiguë et sens du voyage aux accents historiques suffisent-ils pour autant à faire d’Andreï T. un néonazi convaincu ? Contactés, ni l’intéressé ni Louise Morice n’ont répondu à nos questions. Sur l’une des pages Instagram dédiées à ses antiquités, Andreï T. précise que celle-ci est « uniquement à but historique ! ». Sur l’autre : « Page historique, pas de politique. » Des avertissements qui interrogent au regard de ses fréquentations et de ses engagements.

Quoique plus discret sur cet autre aspect de sa personnalité, Andreï T. est bel et bien un compagnon historique de la mouvance d’extrême droite radicale. Il apparaît croix celtique en pendentif sur une photo prise il y a plusieurs années, en compagnie d’un militant du Groupe union défense (Gud), groupuscule néonazi historique dissous en juin 2024 par le gouvernement. Un autre cliché le montre en Ukraine début 2022 aux côtés du militant néofasciste Xavier Maire — le même qui s’improvisait en 2024 journaliste pour « Frontières » le temps d’un reportage dithyrambique sur le régiment Azov

Un bon habitué de l’extrême droite radicale

Enfin, un selfie montre Andreï T. aux côtés des frères Édouard et Hugues Michaud, passés par les rangs de Génération identitaire, tous deux fils d’un Gudard historique et mécène de la mouvance récemment décédé. Le premier est aujourd’hui le leader du groupuscule Les Natifs, dont treize membres ont été jugés en juin pour le déploiement d’une banderole raciste s’opposant à la participation de la chanteuse Aya Nakamura à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques. Le jugement doit être rendu le 17 septembre.

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C’est d’ailleurs en lien avec Édouard Michaud et le déploiement d’une autre banderole xénophobe qu’Andreï T. était nommément cité en février 2021 dans une lettre du ministère de l’Intérieur. Alors adressée au président de Génération identitaire, pour annoncer l’ouverture d’une procédure de dissolution de l’organisation, celle-ci relevait la qualité de militant « de l’ultra droite » d’Andreï T — comprendre de l’extrême droite radicale — et sa passion de « collectionneur d’objets en lien avec le IIIe Reich ».

Andreï T. avait, avec le leader du groupe néofasciste versaillais Auctorum, Paul Pichon, été en contact avec Édouard Michaud « pour transporter des militants de Paris vers Conflans-Sainte-Honorine », après l’assassinat de Samuel Paty en octobre 2020. Le 25 octobre 2020, Andreï T. avait participé au déploiement d’une banderole : « Agression, attentats, l’immigration tue. » Il était également en contact « à la même période » selon l’Intérieur, avec l’antenne rennaise de Génération identitaire.

Son intérieur est un véritable musée fait de multiples bustes de mannequins revêtus d’uniformes de SA – les sections d’assaut du parti d’Adolf Hitler. Mais aussi des dagues, casquette, calot de la SS, et d’innombrables fanions, insignes, médailles en lien avec le IIIe Reich. / Crédits : DR


Sur l’une des pages Instagram, Andreï T. précise tout de même que celle-ci est « uniquement à but historique ! ». Des mises en garde qui interrogent au regard de ses fréquentations et engagements, aux côtés des mouvements d'extrême droite Génération identitaire ou du GUD. / Crédits : DR

Des liens avec Marc de Cacqueray-Valmenier

Le couple de Louise Morice et d’Andreï T. était présent cet été au mariage de Liselotte Dutreuil — Dungelhoeff de son vrai nom — et de Marc de Cacqueray-Valmenier, comme l’a évoqué « Libération ». Successivement leader du groupuscule Zouaves Paris qui s’est fait connaître pour sa violence, dissout en 2021, puis du Gud Paris, dissout en 2024, le marié s’est imposé ces dernières années comme une figure incontournable de la mouvance d’extrême droite radicale. Le colosse de 26 ans multicondamné est employé par Vincent Bolloré pour assurer la sécurité de son île privée dans l’archipel des Glénan, comme l’a révélé « La Lettre ».

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StreetPress a également repéré le couple formé par Louise Morice et Andreï T. cet été au mariage de la journaliste de Radio Courtoisie Liselotte Dutreuil et de Marc de Cacqueray-Valmenier, figure incontournable de la mouvance d’extrême droite radicale. / Crédits : DR

Rédactrice en cheffe et animatrice de la matinale de la station Radio Courtoisie — par ailleurs condamnée en 2022 pour sa participation à des violences commises dans le cadre d’une action du mouvement Génération identitaire — cette autre figure montante du journalisme d’extrême droite a ainsi eu en mai l’opportunité d’aller couvrir à Paris le défilé néofasciste annuel du Comité du 9 Mai (C9M). Alors qu’un important service d’ordre s’évertuait à maintenir hors du cortège les journalistes et photographes présents, Liselotte Dutreuil avait au contraire pleine latitude pour déambuler et filmer en son sein. Le tout sous le regard bienveillant de son futur époux aux commandes de la marche. À peine un mois et demi plus tard, les deux se sont donc dit « oui », en attendant le futur mariage de l’égérie de « Frontières » et de son fiancé collectionneur d’objets du IIIe Reich.

On est proche de l'obsession. / Crédits : DR

Contacté via les réseaux sociaux, Andreï T. n’a pas donné suite à nos messages. Il a néanmoins désactivé son compte personnel ainsi que les deux comptes liés à sa collection.

Contactée, Louise Morice n’a pas donné suite à nos questions.

Joint par l’intermédiaire de son avocat, Marc de Cacqueray-Valmenier n’a pas souhaité répondre à nos questions.

Contactée par mail, Liselotte Dutreuil a répondu à nos questions avec ironie. Interrogée sur le conflit d’intérêts relatif à sa couverture du défilé du C9M sous la houlette de son futur mari, elle indique toutefois qu’il « aurait été anti-professionnel de ne pas y aller pour des raisons personnelles, d’autant [qu’elle avait], en effet, un accès privilégié ». Au sujet de l’action de Génération identitaire, Liselotte indique que celle-ci était « en réalité, parfaitement pacifique » et que sa condamnation en 2022 permettrait « de mesurer le deux poids, deux mesures de notre système judiciaire ».

Erik Tegnér, directeur de la rédaction de « Frontières » n’a pas donné suite à nos questions.

Illustration de Une réalisée par Mila Siroit.