En ce moment

    16/03/2022

    Le dernier épisode de notre série Knives

    Drill, gangs, pauvreté : on vous explique tout sur la guerre des couteaux en Angleterre

    Par Thomas Porlon

    À Londres, 30 adolescents ont été tués en 2021 dans ce que les médias ont baptisé « la guerre des couteaux ». D’où viennent ces violences en Angleterre ? Des conflits entre gangs aux polémiques liées à la drill, StreetPress vous explique tout.

    Knives est la nouvelle série documentaire de StreetPress sur la crise des attaques au couteau en Angleterre. Chaque mardi, on vous propose une vidéo pour comprendre ce phénomène de société qui fait des ravages outre-Manche, surtout chez les jeunes des quartiers populaires. Retrouvez ici notre dernier épisode.

    La guerre des codes postaux

    En 2021, 30 adolescents ont été assassinés selon la police de Londres. Ce chiffre est considérable. Il faut remonter à 2008 pour retrouver un chiffre aussi élevé dans la capitale anglaise. Cette année-là, ils étaient 29. Quasiment tous ces jeunes ont été assassinés dans des rixes entre gangs rivaux.

    À Londres, cette guerre des gangs a un nom : the postcode war, la guerre des codes postaux en français. Chaque quartier a son propre code postal, déterminé en fonction de si on habite au Nord, au Sud, à l’Est ou à l’Ouest. Comme si on prenait 93100 pour Montreuil ou 75019 pour le 19e arrondissement de Paris. Des conflits entre gangs des codes postaux voisins sont nés et ont crée des des frontières invisibles dans la ville. Les jeunes, qu’ils soient impliqués ou non dans les embrouilles, ne peuvent pas traverser sans prendre le risque d’être attaqués.

    Austérité et drill

    Pour comprendre l’origine du problème, il faut s’intéresser à la politique mené en Angleterre. Depuis une dizaine d’années, les différents gouvernements conservateurs ont réduit drastiquement les dépenses publiques destinées aux jeunes. Entre 2011 et 2021, à Londres, 43 millions d’euros ont été supprimés du budget alloué à la jeunesse, soit une baisse de 44%. Sur les 300 maisons de quartiers qu’il y avait au début de la décennie, 130 ont été fermés et 600 postes d’éducateurs ont été supprimés.

    Les autorités britanniques évoquent une autre raison pour expliquer cette flambée des attaques au couteau : la drill.

    Ce genre de rap est né dans les ghettos de Chicago au début des années 2010. Il a pris une autre forme en arrivant à Londres : des beats très sombres, des artistes souvent cagoulés dans les clips et des paroles très violentes. À leur manière, les drilleurs racontent la réalité de la rue et de cette postcode war. C’est justement ce qui pose problème en Angleterre. La drill est souvent accusée d’être à l’origine de cette violence

    En 2017, la police a fait supprimer de YouTube toute une série de clips et de freestyles pour leurs paroles violentes. Plusieurs groupes sont même carrément bannis de la plateforme. La justice aussi s’est saisie de la question. Depuis 2005, les paroles de la drill et du rap en général ont été utilisées à charge comme preuves lors de 70 procès d’après un décompte de la BBC.

    La quasi-totalité du temps, les prévenus étaient des adolescents noirs. Ce qui pose une question: la criminalisation de la drill n’est-elle pas surtout la criminalisation des jeunes hommes noirs ?

    C’est en tout cas ce que plusieurs voix dénoncent en Angleterre où les rapports entre les jeunes racisés et la police sont tout aussi tendus qu’ici en France. Un exemple : entre 2020 et 2021, 32% des contrôles de police ont été réalisés sur des jeunes hommes Noirs ou Asiatiques, alors qu’ils ne représentent que 2,6% de la population. Plus généralement, les Noirs ont 7 fois plus de risques de se faire contrôler par la police en Angleterre. Une situation qui crée un fossé entre les jeunes et la police et renforce les risques de violence dans la rue.

    Le journalisme de qualité coûte cher. Nous avons besoin de vous.

    Nous pensons que l’information doit être accessible à chacun, quel que soient ses moyens. C’est pourquoi StreetPress est et restera gratuit. Mais produire une information de qualité prend du temps et coûte cher. StreetPress, c'est une équipe de 13 journalistes permanents, auxquels s'ajoute plusieurs dizaines de pigistes, photographes et illustrateurs.
    Soutenez StreetPress, faites un don à partir de 1 euro 💪🙏

    Je soutiens StreetPress  
    mode payements

    NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
    ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER