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    09/01/2023

    Elle met en cause Darmanin

    Pour la Défenseure des droits, le policier lanceur d’alerte « a été victime d’une mesure de représailles » de sa hiérarchie

    Par Mathieu Molard , Christophe-Cécil Garnier

    La Défenseure des droits juge que le ministère de l’Intérieur a injustement sanctionné le policier lanceur d’alerte qui a révélé les maltraitances au sein du tribunal de justice. Elle pointe au passage l’impunité dont ont bénéficié les mis en cause.

    Le verdict de la Défenseure des droits est des plus explicites. Le brigadier-chef Amar Benmohamed, « a été victime d’une mesure de représailles à la suite de ses signalements », juge Claire Hédon dans une décision au vitriol datée du 12 décembre 2022. Le policier avait, en interne puis dans les colonnes de StreetPress, dénoncé des centaines de cas de maltraitance policière dans les geôles du tribunal de justice de Paris. « Injures à caractère racial (…) traitements humiliants et dégradants (…), vols des affaires personnelles ». Des faits qui « compte tenu de leur gravité sont susceptibles de recevoir une qualification pénale ou de violations graves et manifestes de plusieurs engagements internationaux ratifiés par la France », pointe l’autorité indépendante.

    L’inertie du ministère de l’Intérieur

    La Défenseure des droits juge que la qualité de lanceur d’alerte ne peut être déniée à M. Benmohamed qui a appliqué à la lettre « la procédure graduée de signalement » préconisée par la loi. Il a dans un premier temps alerté sa hiérarchie, qui a fini par saisir l’IGPN. L’enquête de la police des polices « a conclu à la révélation de nombreux dysfonctionnements au sein du dépôt de Paris ». Et puis plus rien, comme l’avait révélé StreetPress.

    « Aucun changement n’est intervenu au sein du dépôt de Paris à la suite de ce rapport. » Il n’a « conduit ni à l’arrêt des agissements contestés ni à la saisine du procureur ou à des sanctions disciplinaires de tous les agents concernés », taclent les services de Claire Hédon. Ce n’est que confronté « à cette inertie et en raison des représailles subies » que le policier « a alerté l’opinion publique en témoignant auprès du média StreetPress. »

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    Pour la Défenseure des droits, le policier lanceur d’alerte « a été victime d’une mesure de représailles à la suite de ses signalements ». / Crédits : DR

    Des mesures de représailles

    Pire encore pour l’autorité indépendante, Amar Benmohamed a par la suite été victime de mesures de « représailles ». La Défenseure des droits énumère : une demande abusive d’évaluation de son état psychologique, un refus d’octroi de la protection fonctionnelle (1), un avertissement, un retrait de son mandat de représentant du personnel. Elle pointe même la responsabilité du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin en personne, lui reprochant « une annonce de sanction prononcée (…) au cours d’une audition publique par la commission des lois de l’Assemblée nationale ».

    Décision de la Défenseure d… by Garnier

    Autant d’éléments qui devraient, selon elle, pousser la justice à lever les sanctions administratives prononcées contre Amar Benmohamed. Pour Arié Alimi, avocat du lanceur d’alerte, « la décision du Défenseur des droits confirme [son] analyse » :

    « Après avoir étouffé les maltraitances racistes des détenus, le ministère de l’Intérieur et la section AC2 [section du parquet en charge des dossiers mettant en cause des policiers, ndlr] ont tout mis en œuvre pour décrédibiliser les lanceurs d’alertes, tant par la voie judiciaire que par la voie administrative. »

    Pour lire l’intégralité de la décision de la Défenseure des droits cliquez ici.

    (1) L’État est censé prendre en charge les frais juridiques des fonctionnaires quand, comme ici, les procédures sont liées à son activité professionnelle.

    Photo de Une par Yann Castanier

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