En ce moment

    22/04/2013

    « Quand on est allé au restau, par précaution j’ai pris ma batte de baseball »

    Mark et Sarah racontent leur folle semaine à Boston

    Par Antoine Massot

    Au moment des attentats, Mark buvait des bières en matant un match de Baseball à 2 blocs de l'attentat. Il a immédiatement appelé Sarah. Récit d'une semaine en enfer.

    Mark, 29 ans, comptable, regardait le match des Red Sox avec quelques potes au Mc Greevy, un pub à 400 mètres de la ligne d’arrivée du marathon de Boston quand il a entendu « le premier boum ». Il a tout de suite appelé Sarah, sa copine. Agent immobilier, elle était au boulot pour terminer « un grand projet ». Le couple termine une dernière gorgée de Bud avant d’entamer le récit de leur folle semaine. Les idées semblent se bousculer dans leur tête, et c’est avec un débit rapide que Mark et Sarah racontent une semaine en enfer.

    MARATHON DAY

    Sarah : J’ai tout de suite su que quelque chose n’allait pas puisqu’il ne m’appelle jamais au boulot. Au téléphone, je pouvais entendre les gens pleurer, crier. La panique était terrible dans le quartier autour du bar où était Mark. Personne ne comprenait ce qu’il se passait. J’essayais de parcourir les réseaux sociaux pendant que Mark demandait au barman de mettre les infos à la télé. Très vite est apparu sur Twitter une photo… Il y avait du sang partout… J’étais terrorisée. J’ai supplié Mark pour qu’il rentre à la maison. J’avais trop peur qu’il y ait une nouvelle explosion.

    Depuis mon bureau, je pouvais entendre les ambulances, les pompiers et les hélicoptères qui fonçaient vers le centre ville. Avec mes collègues, on se regardait tous sans vraiment comprendre ce qui était en train d’arriver. A un moment, mon boss a tenté une vanne du genre « Les Transformers arrivent sur Boston », mais personne n’arrivait à rire. La conversation téléphonique avec Mark a rapidement coupé. Plus tard, j’ai appris à la télé que les autorités avaient brouillé tous les appels. Je pense qu’ils voulaient éviter que des terroristes puissent activer d’autres bombes à distance.

    Mark : On a entendu un premier “Boum !”. Tout le monde pensait que c’était des jeunes qui s’amusaient avec des pétards, mais quand la seconde explosion a retenti, on s’est précipités dehors. Les rues étaient envahies par la fumée. Difficile de voir quoi que ce soit. Des marathoniens couraient dans le sens inverse de la course. Les gens criaient, hurlaient, c’était le chaos. De plus en plus de monde se réfugiait à l’intérieur du bar. A ce moment-là, un ami à moi, un ex-marines, a couru en direction de la fumée afin d’aider les policiers à secourir les victimes. Une heure après, il est revenu couvert de sang avec un ballon entre les mains. Il était complètement choqué et il portait ce ballon ensanglanté sous le bras. Il nous explique qu’il compte le remettre à la famille de l’enfant à qui il appartenait. Personne ne comprenait ce qu’il se passait réellement, et à la télévision, toujours aucune nouvelle.

    MANHUNT

    Le jeudi 18 avril au soir, un des auteurs de l’attentat tue un policier au cours d’une fusillade au Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Boston. Le meurtrier décède de ses blessures. S’ensuit une chasse à l’homme pour tenter de retrouver son frère et complice, Dzhokhar Tsarnaev. L’étudiant sera retrouvé vendredi soir, caché dans un bateau.

    Sarah : Jeudi soir, on était couchés à mater les infos. C’est là qu’on a appris qu’il y avait eu des coups de feu au MIT. On a tout de suite pensé que les échanges de tirs pouvaient avoir un lien avec les poseurs de bombes. Le lendemain à 6h30, j’ai eu un coup de fil de ma sœur qui m’annonce que Boston était quadrillée. Je me souviens avoir répondu : “What the fuck ?”. Elle a insisté pour que je ne sorte pas de la maison, que je n’aille pas travailler. On a chacun reçu des messages de nos patrons pour nous dire que les bureaux étaient fermés. Les médias indiquaient les zones dans lesquelles il ne fallait pas sortir. Il y avait aussi des sites internet sur lesquels on pouvait écouter en direct les radios des policiers. Le second suspect pouvait être n’importe où. Les gens effrayés utilisaient ces applications afin d’en savoir plus sur le déroulement de la chasse à l’homme et s’assurer qu’il n’était pas dans le coin.

    Mark : La police conseillait d’éviter les déplacements. Le vendredi soir, on a quand même voulu aller au restaurant. Par précaution, j’ai décidé de prendre ma batte de baseball, dans la voiture. Juste au cas où. En général, je déteste que les gens utilisent leur téléphone portable à table. Mais là, nous étions constamment dessus, à guetter la moindre nouvelle. Tous les clients autour de nous faisaient la même chose. C’est au restau qu’on a appris que le deuxième mec avait été capturé. Ç’a été un vrai soulagement. Finies la crainte et la peur constante de l’autre. C’était devenu fou : on en était à observer avec méfiance tous les gens qu’on croisait. On commençait presque à devenir paranoïaques. C’était un sentiment désagréable. Les gens étaient soulagés. La vie allait pouvoir reprendre son cours “normal”. Je me souviens avoir fait un “high-five” à la serveuse du restaurant…

    Il y avait aussi des sites internet sur lesquels on pouvait écouter en direct les radios des policiers

    bqhidden. Par précaution, j’ai décidé de prendre ma batte de baseball, dans la voiture. Juste au cas où

    Pour continuer le combat contre l’extrême droite, on a besoin de vous

    Face au péril, nous nous sommes levés. Entre le soir de la dissolution et le second tour des législatives, StreetPress a publié plus de 60 enquêtes. Nos révélations ont été reprises par la quasi-totalité des médias français et notre travail cité dans plusieurs grands journaux étrangers. Nous avons aussi été à l’initiative des deux grands rassemblements contre l’extrême droite, réunissant plus de 90.000 personnes sur la place de la République.

    StreetPress, parce qu'il est rigoureux dans son travail et sur de ses valeurs, est un média utile. D’autres batailles nous attendent. Car le 7 juillet n’a pas été une victoire, simplement un sursis. Marine Le Pen et ses 142 députés préparent déjà le coup d’après. Nous aussi nous devons construire l’avenir.

    Nous avons besoin de renforcer StreetPress et garantir son indépendance. Faites aujourd’hui un don mensuel, même modeste. Grâce à ces dons récurrents, nous pouvons nous projeter. C’est la condition pour avoir un impact démultiplié dans les mois à venir.

    Ni l’adversité, ni les menaces ne nous feront reculer. Nous avons besoin de votre soutien pour avancer, anticiper, et nous préparer aux batailles à venir.

    Je fais un don mensuel à StreetPress  
    mode payements

    NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
    ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER