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    16/01/2017

    Ancienne élue PS, je ne voterai plus jamais pour ce parti

    Par Fatou Meïté , Aladine Zaïane

    Fatou Meïté a été élue PS à Bondy (93), mais a quitté ce parti pour lequel elle ne votera « plus jamais ». Elle explique pourquoi.

    J’ai grandi à Bondy dans un bastion PS. Partout je voyais ce fameux poing avec la rose. Alors que j’étais très jeune, on m’expliquait que c’était le parti de François Mitterrand notre président de la République de l’époque. Je ne connaissais rien à la politique mais ça m’a marqué.

    A chaque élection, les candidats PS présents sur les panneaux d’affichage, m’accompagnaient dans les derniers mètres me séparant de l’entrée de l’école. Ces têtes en gros plans, avec toujours ce gros poing à la rose.

    Nous étions conditionnés pour voter PS

    Moi, comme beaucoup de mes camarades d’école, nous étions presque conditionnés par ces figures socialistes. Mon père regardait tous les dimanche le magazine 7/7, à la télé. Entre deux interviews il m’expliquait qu’il fallait voter pour la gauche. Dans la symbolique du bien et du mal, c’est ceux qui « nous veulent le moins de mal » et qui « sont le moins contre les étrangers » me disait-il.

    Du PS j’en retenais les valeurs humanistes, les acquis de la SFIO, les combats pour améliorer la vie des gens, la nôtre. C’est une belle étiquette. J’ai été bercée dans tout ce bluff.

    J’ai même été élue sur une liste PS

    Je suis entrée en politique durant les élections de 2008. J’ai vécu à Bondy, j’ai subi les nombreuses politiques de la ville. Et je voyais que l’équipe municipale socialiste était sans réaction face aux dégradations des infrastructures. Il y avait de moins en moins d’événements où les gens pouvaient se réunir.

    Je finissais mes études et je voulais mettre mes compétences au service de ma ville. En faisant le forcing, j’ai réussi à décrocher un poste éligible sur la liste socialiste et donc entrer au conseil municipal. C’était l’occasion de découvrir de l’intérieur le système politique et si cela s’était mal passé, j’aurais pu m’exprimer en connaissance de cause.

    J’avais l’espoir qu’au niveau local on puisse changer les choses car au niveau national je voyais bien que c’était plus technique… Bah en fait au niveau local c’était tout aussi « technique ».

    J’étais élue en mode figuration

    Au départ j’ai été force de proposition. J’ai commencé à travailler sur les jumelages tout d’abord. Mais les projets sont tombés à l’eau. En tant qu’élue, je pensais pouvoir pousser des projets, mais en réalité ça venait toujours du maire. J’étais en mode figuration. Je me suis rendue compte que je tournais en rond. J’avais l’impression de trahir tous ces gens qui ont donné du crédit à ce maire parce qu’ils m’ont vue à ses côtés. Je jouais une putain de pièce de théâtre. J’ai préféré me retirer.


    « Le clientélisme est bien souvent le principal levier de gouvernance au niveau local. Ils ont leur fan base qu’ils maintiennent à coup d’emplois en mairie, de logement en HLM. Ils disposent ainsi d’un électorat servile […]»

    Fatou Meité, ancienne élue PS

    Les pratiques politiciennes et électoralistes m’ont dégoutée

    Outre mon expérience personnelle désastreuse, les pratiques politiciennes et électoralistes m’ont dégoutée. Le clientélisme est bien souvent le principal levier de gouvernance au niveau local. Ils ont leur fan base qu’ils maintiennent à coup d’emplois en mairie, de logement en HLM. Ils disposent ainsi d’un électorat servile qu’ils vont mobiliser de cette manière dans l’espoir qu’ils votent à chaque fois pour eux.

    Le PS me déçoit car il y a un delta violent entre ce qu’ils prônent et ce qu’ils font.

    Le PS n’en a rien à foutre de notre gueule

    Au niveau national, ce n’est pas mieux. La loi travail reflète avec exactitude ce qu’est le PS dans sa contradiction et son hypocrisie. Cette manière de te regarder dans les yeux en te disant en même temps que t’es important, mais aussi qu’il n’en a rien à foutre de ta gueule.

    La loi travail a été une trahison des valeurs prônées et des acquis, fruits de luttes difficilement menées. On attendait ça de la droite pas du PS.

    La trahison est toujours au rendez-vous. Comme le montre l’exemple de SOS Racisme. On récupère une cause pour mieux l’étouffer. Ceux passés par cette association deviennent les bons petits soldats du PS et sont toujours là aujourd’hui. A part être passés par là, ils ont fait quoi ? Dans le même temps, nous, les femmes et hommes de terrain, on reste bloqués. On nous a fait miroiter un renouvellement politique, mais c’est Sarkozy qui a été le plus entreprenant. Ils n’ont jamais œuvré pour ça, mais sont dans une dynamique de conservation du pouvoir et de reproduction.

    Je crois aux listes citoyennes

    On a expérimenté le PS, élection après élection, on a vu le résultat. Le salut viendra de l’indépendance et des listes citoyennes. Pour le moment les gens préfèrent toujours voter pour ceux qui ont « des chances de gagner ». On n’évalue plus des idées mais on mise sur le cheval vainqueur.

    Quand il y aura vraiment des exemples de réussite, les gens changeront de grille de lecture. Cela prendra du temps mais il existe déjà quelques signes qui poussent à être optimistes. Plusieurs de ces listes ont fait des scores honorables un peu partout dans l’Hexagone. C’est un challenge qu’il faut relever. Tout passera par l’indépendance car il n’y a pas de place dans l’échiquier politique français traditionnel pour les idées nouvelles et le renouvellement.

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