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    12/06/2018

    Lycée Arago : pour faire taire la contestation, le gouvernement nous envoie au tribunal

    Par Jeunes révolté.e.s

    Occupation de facs, manifs… Depuis plusieurs mois la mobilisation contre Parcoursup s’organise. « Le gouvernement ne répond que par le mépris ou la violence », dénonce ce collectif de soutien aux inculpés du lycée Arago.

    Depuis des mois, des lycéens et des étudiants se mobilisent dans toute la France pour protester contre la mise en place de ParcourSup, le nouveau système d’affectation des lycéens. De nombreux établissements de l’enseignement supérieur ont été occupés par des étudiants dans toute la France, de la désormais célèbre Commune Libre de Tolbiac aux facultés Paul Valéry à Montpellier, en passant par Nanterre, Paris 3, Sciences Po ou encore Toulouse II. En signe de protestation face à cette désastreuse plateforme, des lycées se sont ralliés à la lutte et se sont appropriés des modes d’action militants : blocages, occupations, assemblées générales.

    Parcoursup creuse les inégalités sociales

    Malgré les nombreuses tentatives de la part de notre gouvernement pour mettre fin à la contestation sociale (présence massive de CRS – et ce même dans nos universités -, interpellations, mises en examen, bavures policières …), il convient de remettre au centre du débat le sens des revendications des lycéens et étudiants. La mobilisation contre la loi ORE, avec pour figure de proue la lutte contre Parcoursup, vise à s’opposer à l’élitisme et au tri social que Parcoursup rend possible de par ses algorithmes malléables au gré des envies des établissements. Par exemple, le lycée d’origine peut être un critère de sélection : alors que les premiers résultats ont maintenant été reçus, il s’avère que les lycées des zones les plus défavorisées reçoivent un taux de réponses positives nettement moins élevé que celui de lycées parisiens et/ou privés, à la grande surprise générale.

    Parce qu’un dossier d’un élève d’un lycée populaire aura moins de chance d’être bien classé que le dossier d’un élève d’un prestigieux établissement parisien à résultats égaux, Parcoursup empêche à des milliers d’élèves de s’orienter vers les études supérieures de leur choix, et pire encore, creuse les inégalités sociales entre lycéens alors même que la situation est déjà critique. Rappelons rapidement que notre pays dont la devise prône l’égalité fait partie des champions en terme d’inégalités à l’école.

    Et comme si Parcoursup n’était déjà pas suffisamment catastrophique, il est possible de retenir comme critère de sélection le redoublement ou non de l’élève : un élève qui aurait redoublé dans son parcours sera par exemple pénalisé car ce dernier engendre un malus sur son dossier. Une décision bien curieuse quand nous connaissons les multiples raisons qui peuvent être à l’origine d’un redoublement. In fine, Parcoursup impose aux élèves un modèle de société où la concurrence, l’individualisme et le chacun pour soi sont les maîtres mots.

    Quelle est la réponse de notre gouvernement ?

    Face à cette mobilisation populaire qui ne cesse de prendre de l’ampleur, il n’a su répondre que par l’ignorance, quand ce n’est pas par le mépris ou la violence ! Des revendications mensongères dans les médias aux intimidations des militants (à l’image du doyen de Montpellier qui a, semble-t-il, laissé entrer des groupuscules d’extrême droite pour sortir des étudiants mobilisés d’un amphithéâtre), le gouvernement utilise tous les moyens mis à sa disposition pour étouffer une mobilisation grandissante et décisive.

    En façade, la communication du gouvernement frôle la provocation, à l’instar de la ministre de l’enseignement supérieur qui affirme sans ciller devant les caméras qu’il n’y a aucun problème, alors même que la France entière constate, parfois à cause de la détresse dans laquelle se trouvent lycéens et lycéennes, le fiasco généralisé.

    La seule réponse apportée par notre gouvernement reste en définitive celle de la répression abusive : musellement de la contestation en envahissant nos facultés pour nous empêcher de nous réunir (comme à Nanterre le 9 avril), évacuation par les forces de l’ordre de ces dernières, interpellations lors des manifestations, mises en examen … La liste est malheureusement bien longue, et elle fait peur à lire, quand nous sommes supposés être citoyens et citoyennes d’un pays démocratique.

    Solidarité avec ceux d’Arago

    Mais bien entendu, plus de répression il y a et plus motivés nous restons : afin de continuer à faire entendre nos voix, et pour se lever contre cette criminalisation du mouvement social, nous avons décidé de nous retrouver le vendredi 15 juin devant le Tribunal de Grande Instance de Paris à 12h. À l’origine de ce rassemblement, les procès de militants et militantes interpellées au lycée Arago.

    En effet, à la fin de la manifestation du 22 mai à Paris qui rassemblait les fonctionnaires en lutte et plus largement tous les foyers de contestation, des lycéens et étudiants ont décidé de se retrouver dans le lycée Arago afin d’y tenir une assemblée générale dans le but d’échanger à propos des résultats de Parcoursup et de préparer la suite de la mobilisation.

    En moins d’une heure, les CRS sont rentrés dans le bâtiment avec violence, causant des dégâts qu’ils imputeront par la suite aux lycéens venus pacifiquement. Ils ont alors procédé à 102 interpellations, sans faire de différence pour les mineurs. Enfermés pendant près de 6h dans les fourgons de la police, sans eau ni information sur la suite des événements, ils et elles ont ensuite été placés en garde-à-vue, prolongée pour les majeurs, et ont passé une troisième nuit au dépôt après avoir été déférés. Certains ont subi des violences de la part de la police, des insultes et/ou des humiliations, comme ce mineur qui s’est vu imposé une fouille à nu pour des raisons qui restent inexpliquées.

    De l’aveu même de certains officiers, la démarche était avant tout politique. Des dossiers d’enquête vides aux interrogatoires mettant en cause les opinions politiques personnelles, il apparaît clairement que l’ensemble de ces actes relèvent d’une tentative d’intimidation du gouvernement pour briser le mouvement social et pour effrayer la jeunesse qui se soulève.

    Photo d’illustration : manifestation étudiante à Montpellier (Yann Castanier).

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