Le sourire de M.Chat n’est visiblement pas du goût de la RATP. Pour avoir apposé son célèbre personnage sur les murs de la station de métro Châtelet, le street artiste Thoma Vuille comparaissait ce mercredi 29 octobre devant la 28ème chambre du tribunal correctionnel de Paris. L’artiste n’aura même pas à prendre la parole : en cinq minutes à peine, l’affaire se dégonfle comme une baudruche. Le procès est annulé pour un surprenant vice de forme.

M.Chat sourit aux passants du métro / Crédits : Passeret
Bad buzz pour la RATP
Une issue qui étonne jusqu’à l’avocate de l’artiste, mais qui arrange bien tous les partis, tant le dossier de la RATP semblait mal ficelé. Car la « dégradation » reprochée à Thoma est des plus légères. Son délit : avoir dessiné à la peinture jaune une dizaine de chats dans les couloirs de la station de métro de Châtelet… en travaux et donc très bientôt recouverts de carrelage. Ironie de l’histoire, le projet de rénovation de la station s’intitule « un métro + beau ». La RATP, partie civile dans l’affaire, tentait de justifier sa démarche dans les colonnes de 20 minutes en invoquant une « procédure systématique ».
La régie de transport réclame tout de même à l’artiste 1.800 euros de dommages et intérêts. Convaincu de son bon droit, il refuse de payer. Mais la machine judiciaire est lancée, direction le tribunal donc. Sauf que M.Chat et son auteur sont célèbres et l’affaire fait le buzz. Une pétition en ligne sur Change.org récolte plus de 20.000 signatures, grâce au soutien appuyé de Radio Nova et aux nombreux relais médiatiques.
Les soutiens politiques de M.Chat
A la sortie de l’audience, c’est l’effervescence. Thoma, chemise en coton claire et blouson de cuir, n’est visiblement pas dans son élément. Il se prête tout de même au jeu des médias, sous l’œil attentif de « Câline », en charge notamment de ses relations presse. Les journalistes ont du monde à se mettre sous la dent : deux élus ont fait le déplacement pour témoigner en sa faveur.
> Jérôme Coumet, maire PS du 13ème, « l’arrondissement du street art à Paris ». L’élu d’expliquer sa rencontre avec M.Chat :
« J’avais posté sur Twitter une photo de l’œuvre dans le métro, parce qu’elle m’avait plu. Et j’ai ensuite appris qu’elle lui valait un passage au tribunal. Je lui ai proposé mon soutien. »
Une « très belle rencontre » s’emballe l’édile, qui décide même de lui passer commande : M.Chat s’affiche désormais sur les murs de la mairie.
> Serge Grouard, député maire UMP d’Orléans, affiche une belle complicité avec l’artiste. En 2007, Thoma Vuille, alors inconnu du grand public se fait poisser en pleine action par la police municipale. L’élu prend sa défense et lui propose même d’exposer au musée des Beaux-Arts de la ville, « qui n’a jamais été aussi plein ». Le peintre, jusque-là au RMI, peut enfin vivre de son art. Quant au Maire, il a trouvé une nouvelle égérie pour sa commune :
« Quand il m’a envoyé un message pour dire qu’il allait passer au tribunal, je lui ai bien sûr proposé mon soutien. »
Rivalité dans le monde du StreetArt
(img) Thoma Vuille devant le Palais de justice
Sauf que le succès institutionnel de M.Chat passe mal auprès d’une partie des graffeurs plus underground, et à Orléans certaines de ses œuvres sont consciencieusement recouvertes par un autre artiste du cru. Quand on demande ce qu’il pense des éternelles critiques, le discret Thoma Vuille, s’énerve :
« Tu penses que ça fait quoi quand un connard te traite de connard ? »
10h30, l’artiste fuit la cohue médiatique – « Je veux passer à autre chose et peindre » – les deux élus quant à eux quittent le tribunal ensemble : « Tu viens toujours prendre un verre ? », lance l’élu PS à son nouvel ami UMP.
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