Une victime de harcèlement sur Internet subit de nouvelles discriminations dans le réel quand elle décide de porter plainte par exemple. Elle n’est ni accompagnée par les plateformes qui propagent les commentaires violents qu’elle a reçus, ni par l’État. Il y a encore beaucoup de travail pour que les choses changent.
1. Former le personnel éducatif
Prenons le cas d’une mineure, victime de violence sexuelle puis de revenge porn, ce qui signifie que le viol a été filmé puis diffusé sur les réseaux.
Cette même élève subit ensuite le victim blaming au sein de son collège ou lycée : Elle doit affronter les réflexions des camarades qui ont vu passer la vidéo. Parfois, elle doit aussi passer tous les jours dans le bureau du CPE pour montrer comment elle est habillée, etc.
Cela arrive encore, car toute une partie du personnel éducatif n’est pas encore formé et reproduit d’autres formes de discriminations.
2. Sensibiliser le milieu médical
Même chose dans le milieu médical. Il faut se préparer et trouver pour chacune de ces institutions la bonne personne, se dire qu’il va falloir être patient.e et persévérant.e. car les violences faites aux femmes, et plus encore les cyberviolences, ne sont pas toujours prises au sérieux. Les victimes sont encore trop souvent culpabilisées quand elles ne sont tout simplement pas crues…
3. Former les professionnels de la police et de la justice
« Les forces de l’ordre considèrent encore trop souvent que ce qui se passe sur Internet n’a pas d’existence “réelle”. »
Johanna Benamrouche, Féministe contre le cyberharcèlement
Quand la jeune fille porte plainte ensuite – si elle décide de le faire – c’est rarement bien reçu au commissariat. Un nouveau processus de culpabilisation commence, surtout pour les jeunes femmes.
L’accueil peut être très compliqué : « Est-ce qu’il vous a menacé de viol en vrai ? ».
Si on répond non, alors le problème n’existe pas ou très peu pour les forces de l’ordre qui considèrent encore trop souvent que ce qui se passe sur Internet n’a pas d’existence “réelle”, alors que les conséquences traumatiques des cyberviolences sont bien réelles et similaires à celles des violences subies hors ligne.
Certains policiers refusent même de recevoir des plaintes. Très peu de victimes de cyberviolences portent donc plainte. Par découragement, mais aussi parce que cela coûte cher.
4. Accompagner les victimes qui décident de porter plainte
Il faut plusieurs centaines d’euros pour rendre une preuve valide juridiquement : il faut faire des captures d’écran et garder les URL des messages violents. Ensuite, pour que ces preuves soient reconnues par la justice, il faut les faire valider par un huissier. C’est ce qui coûte cher. Donc, surtout, rapidement appeler son assurance, sa banque ou sa mutuelle pour savoir si notre contrat nous permet de bénéficier d’une assistance juridique. Dans le cas contraire, il est possible de demander à bénéficier d’une aide juridictionnelle auprès du tribunal de grande instance
Une fois la procédure lancée, de nombreux avocats ne comprennent pas grand chose au cyberharcèlement. Heureusement, la jurisprudence s’affine en la matière et les victimes peuvent désormais invoquer l’usurpation d’identité numérique et le harcèlement moral.
5. Durcir les peines ?
Les peines sont encore trop symboliques. On estime que le procès est gagné aujourd’hui quand le harceleur est reconnu comme un agresseur.
Les peines sont légères et se réduisent souvent à des amendes ; Elles pourraient être plus adaptées aux délits ou crimes commis et s’accompagner, par exemple, d’un suivi psychologique, de travaux d’intérêt général, de formation au droit à l’image ou au consentement.
« Nous avons besoin que la législation change. L’impunité des agresseurs sur Internet est quasi-complète. »
Johanna Benamrouche, Féministe contre le cyberharcèlement
Peu de mesures concrètes sont mises en place et les harceleurs peuvent recréer des comptes, plus anonymes, et le même combat recommence… Nous avons besoin que la législation change. L’impunité des agresseurs sur Internet est quasi-complète.
6. Faire du lobbying auprès des têtes de réseaux sociaux
L’État n’a toujours pas pris en compte ce combat.
Il faut que ses représentants fassent du lobbying auprès des grands dirigeants des médias sociaux. Il faut aussi que les responsables du pays puissent porter plainte, comme cela a déjà été fait en Allemagne, pour tout simplement défendre l’intérêt des citoyens en ligne.
Les jurisprudences doivent pouvoir servir à créer plusieurs propositions de lois plus inclusives, mais le sujet n’est pas encore à la mode en politique.
La prise de conscience chez les internautes est, elle, de plus en plus forte.
Le collectif Féministes contre le cyberharcèlement met à la disposition des internautes le guide : « Que faire en cas de cyberharcèlement ? ».
Face au péril, nous nous sommes levés. Entre le soir de la dissolution et le second tour des législatives, StreetPress a publié plus de 60 enquêtes. Nos révélations ont été reprises par la quasi-totalité des médias français et notre travail cité dans plusieurs grands journaux étrangers. Nous avons aussi été à l’initiative des deux grands rassemblements contre l’extrême droite, réunissant plus de 90.000 personnes sur la place de la République.
StreetPress, parce qu'il est rigoureux dans son travail et sur de ses valeurs, est un média utile. D’autres batailles nous attendent. Car le 7 juillet n’a pas été une victoire, simplement un sursis. Marine Le Pen et ses 142 députés préparent déjà le coup d’après. Nous aussi nous devons construire l’avenir.
Nous avons besoin de renforcer StreetPress et garantir son indépendance. Faites aujourd’hui un don mensuel, même modeste. Grâce à ces dons récurrents, nous pouvons nous projeter. C’est la condition pour avoir un impact démultiplié dans les mois à venir.
Ni l’adversité, ni les menaces ne nous feront reculer. Nous avons besoin de votre soutien pour avancer, anticiper, et nous préparer aux batailles à venir.
Je fais un don mensuel à StreetPress
NE MANQUEZ RIEN DE STREETPRESS,
ABONNEZ-VOUS À NOTRE NEWSLETTER