Il y a une dizaine de jours, un ami m’a alertée : le collège-lycée Emile Loubet de Valence aurait des pratiques sexistes. On contrôle la tenue vestimentaire des jeunes filles à l’entrée de l’établissement. On mesure la longueur de leur jupe, juge de leur maquillage. Je suis tombée des nues.
Les responsables de ce contrôle vestimentaire sont deux femmes, la proviseure et son adjointe. Pour se défendre contre toute attaque, la proviseure se revendique féministe. La direction joue sur le fait d’être des femmes pour faire passer des pratiques patriarcales. La preuve, elles ne contrôlent pas la tenue vestimentaire des garçons. Les lycéens nous l’ont confirmé.
Une brigade de la morale
La proviseure et son adjointe se placent à l’entrée de l’établissement et contrôlent de la tête aux pieds les jeunes filles. Le jugement tombe, devant tout le monde :
“Là c’est trop court. Il ne faut pas revenir comme ça demain sinon tu ne pourras pas rentrer.”
Et puis il y a le maquillage. Si la jeune fille met du rouge à lèvre rouge vif ou noir, ça ne passe pas.
En plus de ces contrôles aberrants, la proviseure tient des propos très graves aux jeunes filles :
“Plus tard tu vas travailler et c’est ton patron qui va te dire comment tu t’habilles”.
Incroyable. Hors uniforme spécifique, un patron n’a pas à dicter à ses salariés, hommes ou femmes, comment ils doivent s’habiller. Et créer un parallèle entre le patronat et l’Education nationale n’a aucun sens. On est en train de leur faire accepter l’idée que le patriarcat règne partout et que c’est normal.
On complexe les femmes dès leur plus jeune âge
Imaginez l’impact que ça a, surtout sur les plus jeunes qui sont au collège. Les professeurs leur enseignent qu’il ne faut pas juger une femme en fonction de sa tenue et là on a des responsables d’établissement qui font une discrimination basée sur le maquillage et la manière de s’habiller des lycéennes. Allez leur dire après ça qu’on ne traite pas une femme de “salope” si elle a une mini jupe.
On humilie ces filles. On les pousse à avoir honte de leur corps à un âge où c’est déjà très compliqué. On les enjoint à cacher leur corps. Le corps de la femme pose problème en France. Il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Si elle porte un voile, il y a un problème. Si la jupe est trop longue, ce n’est pas bon, pas assez “français”, pas “républicain”. Si elles sont habillées “trop court” ça ne va pas non plus. Elles seraient habillées “comme des salopes”.
Bon alors on en est où ? Vous nous tracez des traits sur les jambes pour décider de la bonne longueur ? Et les mecs pendant ce temps, tout va bien, ils circulent tranquillement.
Il y a un contrôle du corps des femmes qui commence à l’adolescence voire dès la primaire. Cette affaire au lycée Loubet a libéré la parole. Des mères de famille ont raconté que des responsables d’établissement les ont convoquées pour leur dire qu’il ne fallait pas que leur fille vienne avec des débardeurs à bretelle.
Lorsque les petites filles venaient en jupe on leur disait de leur mettre des collants en dessous. La raison invoquée : ça perturbe les petits garçons… Alors que ce sont les adultes qui sexualisent les rapports. Quand une petite fille fait des roulades avec sa jupe, le petit garçon n’en a rien à faire de voir sa culotte. Ça ne le perturbe en rien.
Un règlement intérieur flou
Il y a un flou dans les règlements intérieurs du lycée. On dit que les élèves doivent avoir une tenue “décente” et “correcte”. Tout ça est laissé à l’appréciation de la direction qui peut placer la barre où elle veut. On nous répond que si on ne met pas des barrières, ils vont finir par venir en maillot de bain… c’est tellement ridicule.
Combien d’entre nous ont voulu sécher les cours de natation ? Peu d’ados aiment se retrouver en moule-burne, peu de filles veulent se montrer en bikini. Les complexes sont déjà nombreux et dès l’adolescence on sait très bien mettre le curseur de nous-mêmes.
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